« Ce poéme, qui est presque un antipoéme, m’incite 4 descendre dans mon
corps, a l’habiter. Il m’apprend 4 voir ce qui est réel autour de moi et qui, au-
trefois, m’échappe. II m’incite a gotiter, sentir, entendre. A toucher et étre tou-
chée par le secret des mousses, des écorces et d’autres formes du silences (13)

je ferme les yeux

la lumiére et les outardes

sont encore 1a (13)

Découverte du haiku, forme poétique nouvelle pour Héléne Boissé qui 1|’a-
dopte rapidement, enthousiaste et pressée d’en composer. Des faits divers dans
son entourage immédiat lui inspirent le theme du temps qui passe, d’ot des
poémes sur la mort, l’horloge, le miroir qui révéle le visage ridé peut-étre.
Paysagiste, Héléne Boissé, aime décrire les merveilles de la nature sans perdre
de temps, dés la premiére section intitulée Hors saison. Elle ne résistera pas
cependant, a évoquer les saisons, la lumiére, le soleil, les nuages, les averses,
les arbres, les mésanges, bref des éléments d’une saison douce, fraiche et sans
la moindre rigueur avant de plonger dans I’hiver.

Cinq saisons suivront ot l’hiver tient le haut du pavé, puisqu’il ouvre le calen-
drier des saisons - L’hiver dans les yeux - et revient pour le fermer - Retour de
Vhiver. Quelques perles sans doute se détachent des sujets et des images a
caractére familial, comme les deux haikus suivants :

balais renversés

les saules n’arrivent pas

4 déneiger le ciel » (33).

« de la méme couleur

que mon pamplemousse

la lune » (84).

L’hiver, tant décrié par ses propres citoyens dans ce pays du Nord, continue
pourtant a occuper une place de choix dans le cceur de ses citoyens.

Si le printemps semble encore prisonnier du tenace hiver - chemin de glace
(39), vent débridé (41), nuit d’averses (45) - la poésie y déniche parfois de
belles scénes, plus sonores que visuelles :

« dans les oreilles

bélement d’un agneau

du Mozart nature » (49).

Et lorsque |’été bat son plein, I’auteur est porté a « écrire dans l’herbe » (51)
de beaux haikus :

« précaires hamacs

toiles d’araignées nouées

a des brins d’herbe » (54).

10