: | 12— Le Soleil de Colombie, vendredi 19 octobre 1984 Société Historique Franco-Colombienne 9, Broadway Est, Vancouver, C.B. V5T 1V4 Tél. 879-3911 Les navigateurs francais Par Alexandre Spagnolo Le capitaine du “Lydia” Samuel Hill recut avec des honneurs, des salves de canon, ce seigneur de I’ile de Nootka, lui offrit force rasades de rhum, I'invita a visiter sa cabine et... lui passa les fers aux mains, il était son prison- nier. La foule ne voyant plus leur chef, des heures durant, se déchaina, les femmes épleu- rées, 4 genoux, demandérent a Jewitt d’intervenir afin de sauver leur demi-dieu. Les guerriers voulurent avoir la peau de Jewitt, mais se rendi- rent compte que l’esclave était devenu maitre de la situa- tion. Ici, nous avons une courte narration de Pierre Berton dans son “The Wild Frontier” (édition McClelland & Stewart Ltd. Toronto) signa- lant: le capitaine Samuel Hill, lorsque Jewitt — et Thompson vinrent libres a bord, voulut exécuter Maquinna: Jewitt;'l"homme a la Bible, intervint. en sa faveur, disant que sa longue captivité, horrible, l’avait ren- du-un expert international en matiére de sociologie de la vie des Indiens de la céte-ouest de notre grande ile Quadra- Vancouver (en effet, qui dit mieux?). Son exécution pro- voquerait par la suite une vengeance et le massacre de l’équipage du prochain navire mouillant dans les eaux de Yuquot (Friendly Cove) . Rai- sonnement logique. Maquinna passa la nuit a bord jusqu’a ce qu’on récupé- ra les restes du pillage du “Boston”, surtout les papiers du bord et le journal de Jewitt, inestimable document. Fier Maquinna devenu fla- gorneur... Départ amical, Maquinna fit offrir au capitaine Hill, 60 aux d’otaries, en revanche, il lui offrit un superbe et ample manteau de laine, avec la ferme promesse de revenir en novembre (1805) afin de commercer: le Chef lui pro- mit de lui réserver une grande quantité de peaux. A Jewitt, il voudrait le revoir comman- dant un navire, mais qu'il n’accepterait plus de lettre de recommandation d'un britan- nique, puis des larmes coulé- rent.--de {ses - yeux. crisie? non, plutét sincérité. De John trace trouvée chez les_his- toriens consultés. Jewitt ne pouvait s’attendre a revoir son pays de sitét, le “Lydia” était au début d’un long périple de deux années, d’abord a l’embouchure de notre grand fleuve Columbia, puis d’escales en escales jus- qu’en Ghine. Comme promis, Le Lydia revint a Yuquot (Friendly Cove) avec Jewitt a bord, Maquinna insista afin qu'il vienne a tefre le prendre et saluer le capitaine Hill, ce qui fut fait, entre-temps, il essaya de persuader son ancien escla- ve de rester 4 Nootka ov il avait femme et enfant de cing | mois. I] déclina l’offre. hcmpson, aucune. Le “Lydia” ne revint 4 son port d’attache, Boston, qu’en mai 1807, ot Jewitt trouva une lettre de sa mére éplo- rée, d’Angleterre. John Rodgers Jewitt n’était plus un captif de Maquinna, mais demeura toute sa vie, un captif de sa longue expérien- ce, il n’était pas en mesure de chasser de son esprit le drame vécu, il devint un errant, répétant et répétant sans cesse ses aventures d’outre-mer. Il y a de quoi... Les armateurs du _navire “Boston” lui allouérent une petite indemnité (une paille a cété des millions d’aujour- d’hui), avec laquelle il finan- ¢a l'impression de son journal, duquel, quelques copies exis- tent encore. Il tenta d’établir un atelier de forgeron a Boston, mais passa le plus clair de son temps a colporter son journal. A Noél 1809, il épousa une jeune fille de _ Bristol (Angleterre) et le couple alla s‘installer a.Middletown (Connecticut, U.S.A.) il eut cing enfants: Jewitt demeura toujours obsédé par les années de sa captivité. Il connut un riche marchand, Richard Alsop, un poéte, un trouba- dour sur les bords et les deux, en 1815, publiérent “The Adventures and Sufferings of John R. Jewitt, captive among the Nootka, 1803-1805”, cette publication obtint un succés -considérable, elle fut le livre de chevet de tous les marins bourlinguant sur les mers et les océans du monde. Plus de vingt éditions, dont plusieurs en diverses langues, dont une pour les jeunes. Le neveu d’Alsop pensa que cet ouvrage fit plus de mal que de bien a John Jewitt par sa vie désordonnée; plus tard, il alla jusqu’a jouer du mélo- drame de sa vie, méme se produire dans un cirque vétu d'un attirail d’indien et chan- tant. I] mourut a Hardford, en 1821, a l’age de 38 ans, rancon de sa captivité a Nootka, dix ans avant le décés du marquis de Roquefeuil, il avait prévu que sa jeunesse serait courte. Sil fut un personnage, a part le capitaine Cook, en 1778, qui mit notre minuscule ile de Nootka sur la carte du monde, en alerte les Cours d'Europe, face 4 face deux empires, sur les dents des historiens, c’est indiscutable- ment le capitaine brouillon John Meares: sans_ lui, Nootka, simplement un nom parmi tant d’autres. Nous laissons donc pour un autre bout de temps notre navigateur francais, pour mettre en évidence ce que fit de bien ou de mal John. Meares. John Neares . Né en 1756, entra dans la Marine Royale Britannique, a 15 ans... sur le navire “H-M.S. Cruiser”; lieutenant de vaisseau en 1778. Quittant son poste pour la Marine Mar- chande pour un voyage en Inde. Homme dur et vénal, constitua une compagnie de navigation avec des associés, a Macas (Chine) pour le com- merce trés lucratif des peaux et fourrures, a partir des cétes du nord-ouest américain, ins- piré en cela par les _pers- pectives annoncées par le capitaine Cook dans ses rela- tions de voyage, dont le capi- taine Camille-Joseph, marquis de Roquefeuil, en avait pris de la graine. Meares, a 30 ans, entreprit un périple qui devait le conduire a l’ile de Nootka, mais des ennuis, le scorbut, la température, le rendit impos- sible. Deux ans plus tard, il le reprit avec les deux navires “Felice” et “Iphigenia”, il aboutit 4 Yuquot (Friendly Cove, de Cook), le verrou de ae I =r hp? fi f J tit il Te ‘Roi d’Espagne, BES l'Es ify