aces Ne GY VOL 18 No 39 VENDREDI 7 FEVRIER 1986 APPCF Jf GE a Zest taso © Visite décevante Par Annie Granger Le 3 février 4 une heure de laprés-midi, 1l’Association des Parents du programme-cadre de francais et la Fédération des Franco-colombiens étaient 1a; un seul absent, leur interlocuteur, le ministre provincial de 1’éduca- tion Jack Heinrich. Ce dernier avait enfin accepté, aprés quatre années de démarches de la part des parents de les recevoir a Victoria. L’Association des parents du programme-cadre de francais (Appcf)avaitplusieurs revendica- tions a déposer auprés du minis- tre, et, plus particuliérement le respect de leurs droits fonda- mentaux constitutionnels, conte- nus dans l'article 23; a savoir les droits a l’instruction dans la langue francaise, des classes homogénes, et la gestion de celles-ci. Le ministre provincial s’était excusé et avait délégué le fonctionnaire M. Carter que l’Association connatt pour l’avoir rencontré a plusieurs reprises. Mécontentement Tl y a une semaine dans un discours 4 Vancouver, devant les représentants de ]’Appcf, le sous- ministre de l'éducation avait pour ainsi dire attirer le mécon- tentement des parents, en don- nant les grandes lignes des politiques de la nouvelle loi scolaire. I] avait alors souligné que le gouvernement ne pourrait pas refuser, dans les classes du programme-cadre,des enfants de langue maternelle anglaise. La _ A toutes voiles nour bateaux de croisiére. présidente de l’Appcf, Héléne Godin, avait alors demandé au ministére de consulter le nouveau document avant de voir le ministre. Visite, document, rien ne s'est passé comme les parents l'avaient prévu. Trés décus par la mauvaise volonté du ministére, les parents vont encore faire des pieds et des mains pour tenter d’avoir un autre rendez-vous. Quant a la Fédération des Franco-colombiens qui accom- pagnait l’Appef a Victoria, elle a exprimé son optimisme, sen- timent que ne partagent pas les représentants de parents d’en- fants dont la langue francaise et la langue maternelle. Mais les parents ne diminueront pas leurs efforts, méme s'il faut aller devant les tribunaux. Le seul journal de langue francaise de la Colombie-Britannique Alliance frangaise Courrier de 2éme classe Second class mail N° 0046 30 cents consacré & cet Apostrophes prometteur. On attendait Devos. Ce fut Hagége. Qui ca? Hagége Claude, linguiste. Inutile de faire le malin: je ne savais rien de lui, méme pas son nom, avant ce mémorable A postrophes. Bernard Pivot, en [l’invitant, ignorait sans doute lui-méme qu'il tenait un tel joker dans sa manche. Visiblement, il avait tout misé sur Raymond Devos pour mettre un peu d’ambiance. Pensum C’est que le sujet de son émission, malgré son intitulé pri- mesautier (le plaisir des mots), respirait le pensum de bon ton. Les lexicographes, lexicologues, grammairiens et sémanticiens ‘Tarement pour de joyeux - drilles. Quant aux qualités com- parées du Grand Robert et du Grand Larousse, il en faut plus pour me réveiller la nuit. Pivot, donc, qui (pas plus que son public) n’aime s’ennuyer le vendredi soir, avait fait venir lathléte complet du calembour signifiant, le virtuose des dérapa- ges verbaux. Devos, disons-le tout de suite, fut a la hauteur. Il commenga par appeler son héte Jacques Chancel, lequel, aussi sec, lui donna du Guy Bedos. La soirée s’annoncait bien. Le duo Robert-Larousse fut agrémenté de quelques sketches de Raymond-les-bretelles. Tout baignait. Puis vint le tour de Claude Coupures budgétaires Hagége. Pivot le présenta comme une espéce de phénoméne de la nature, quelqu’un qui, selon Georges Dumézil, autorité en la matiére, sait manier plus de cent cinquante langues. “Mais comment faites-vous, ‘sexclama Pivot, pour parler toutes ces langues?” Un léger sourire aux lévres, Hagége expli- qua que si Dumézil avait dit “manier”, c’était au sens précis du mot: employer, utiliser. Et non parler couramment. Nu- ance! Puis il se mit a raconter sa passion pour les langues, sa fantastique curiosité pour les autres cultures. Pendant quelques minutes, ce fut, aussi bien (je suppose) sur le plateau que dans les chaumiéres, Vahurissement le plus total: cet homme parlait comme un livre. Plus exactement: comme un essai _scientifico-philosophique du six-huitiéme siécle, brodé au point de croix. Miracle Précieux, pédant, chantourné, aux limites du supportable, tel apparut Hagége, en ce lieu voué a la culture audiovisuelle, au régne de l’oral. Et puis, miracle, prodige: plus il parla, plus il devint lumineux, sans rien changer a son style. Ses mots se firent musique, chant, poéme: leur richesse, leur préci- sion, leur extréme rareté enchan- Suite page 2 Adieu Katimavik Katimavik, c’est fini. Le Secré- taire d’Etat Benoit Bouchard a prévenu le conseil d’adminis- tration de l’organisme que le gouvernement mettait fin au programme cette année, un an plus tét que prévu. La mesure fera faire 19 millions de dollars d’économies au trésor public. Le programme Katimavik, créé par le sénateur Jacques Hébert il y a 9 ans, visait 4 donner aux 20,000 jeunes qui y ont participé depuis dix ans une éducation globale pour les préparer a la vie. L’organisation envoyait les jeunes de 17 a 21 ans vivre et travailler dans 700 communautés a travers le Canada pendant neuf mois. Katimavik était sous la menace d’une fermeture depuis que le gouvernement avait réduit le ’ budget fédéral. M. Bouchard a écrit 4 l’organisation pour an- noncer que le gouvernement interrompra son financement (dont le montant atteignait 19.7 millions de dollars) aprés le ler mars. Selon un porte-parole du ministre, des fonds seront versés afin de poursuivre les opérations déja engagées jusqu’en juin. M.Bouchard n’a pas donné les raisons de la décision gouverne- mentale ni indiqué une alter- native. Il a précisé que Katimavik avait atteint ses objectifs et suggéré qu'il était temps de créer une nouvelle organisation. “Nous voulons créer des emplois du- rables pour les jeunes Canadiens, a ajouté son porte-parole. Nous sommes attachés a l’emploi, et Katimavik n’est pas un pro- gramme d'emploi”. Quant a Jacques Hébert, il est ulcéré par cette décision. “Ce programme a été un modéle pour le monde occidental. On vient de le saboter d’un coup de plume”, a-t-il commenté, soulignant que les Nations-Unies ont décerné un prix d’excellence 4 Katimavik et que des pays comme I'Australie, l'Inde et I’Irlande I’ont copié.