A4 - Le Soleil, novembre 1994 Le Soleil, novembre 1994 - AS a Pr : " Se N / \ Uv A t -] \; +% 7 RSS * : OF F Fa 1, | ”, y { Bo \ \ —- LO” wigs cot “ye a Togs , 5) a - 77 Qwest-ce qu'une forét humide tempérée? Les foréts humides tempérées de la cSte Ouest du Canada (Colombie-Britannique) et des Etats-Unis (Californie, Washington, Oregon, et méme Alaska) sont similaires aux foréts humides tropicales que l'on retrouve entre autres au ( Brésil (en Amazonie). La différence majeure entre les deux, outre le climat beaucoup plus chaud de la forét humidetropicale, ce sont les animaux et les plantes qui y vivent. La température i des foréts humides tempérées est douce tout au long de l'année et la saison des pluies est trés longue. L’été est court et sec; il y a souvent du brouillard, ce qui maintient un excellent degré, 4 d’humidité pour les arbres et les plantes. ‘ i ~ L, e S 7 3 a Peon oe ae : 7 sr 2 ’ 3 / + : aes ey ‘ Vy va < : : / & / —— 3 ¢ "A . / y 7~ S. : / " a2 ; 2 / ye wo 3 <— r ; -—_~-~ Quels types d arbres poussent dans la forét humide tempérée: On y retrouve principalement des coniféres. Ces arbres, grace au climat doux qui prévaut, poussent rapidement, et deviennent parfois de véritables géants (aprés des centaines d’années de croissance, il va sansdire). Parmi ceux-ci, on trouve les Sapins de Douglas, qui sont la troisiéme espéce d’arbres les plus hauts au monde. Ils dominent par leur haute taille les for&ts, de la Califomie a la Colombie-Britannique, et ils poussent dans des endroits trés ensoleillés. Les cadres rouges de l'Ouest, quant & eux, ont besoin de beaucoup d’humidité. tls sont habituellement dispersés parmi d'autres sortes de coniféres, mais on les retrouve également dans des endroits tras humides, ou les racines d'autres arbres pourraient étre noyées. Les pins de l'Ouest aiment eux aussi I'humidité. Ce sont ceux que.l’on repére en plus grand nombre le long de la céte, de I'Oregon a I’'Alaska. Les épinettes de Sitka, quant a elles, sont les plus grandes, dépassant les cédres rouges et les pins dans plusieurs foréts ou le climat est trop humide pour que les sapins de Douglas puissent y survivre. oe Loe a ae Coujours plus haut... y)i\. Un endroit recherché par les gens voulant voir la forét humide tempérée \ est Cathedral Grove, dans le parc] provincial MacMillan, sur l’ile dex Vancouver. Onpeuty admirerdes sapins de Douglas hauts de 85 métres et vieux de 250 ans. L’un des plus gros arbres au Canada se trouve également sur I’ile de Vancouver, prés de Port Renfrew. Ils'agit d'un sapin de Douglas mesurant 80\ métres et ayant une circonférence de 14 métres! L’age et la taille de certains arbres peuvent étre tres impressionnants. Au nord de Port Renfrew, prés du lac \f Cheewhat, il y a une forét de cédres rouges géants ayant une circonférence moyenne de 17 métres et une eet moyenne de 70 métres. Ces coniféres | sont Agés de mille ans! Mille ans, vous \, rendez-vous compte? C'est \& extraordinaire! x os sen S red la cote Ou forestier. © Petite comparaison Ve aa, <“saumon ct la forét A 7 “—— oflle - fortt L’histoire de la fondation de Vancouver nous donne une idée de la majesté des arbres géants de nos foréts. En 1886, les habitants de ce petit patelin préparaient l'arrivée du chemin de fer du Canadien Pacifique. lls défrichaient les terres et batissaient la ville. Un homme, Alex Russell, abattit un sapin de Douglas au coin des rues Georgia et Granville mesurant 103 métres. En guise de comparaison, la hauteur moyenne des édifices présentement au centre-ville de Vancouver est de 67 métres... Vous ne savez peut-étre pas que les poissons (entre autres les saumons) Pourquoi? Parce que le couvert des arbres maintient une bonne température dans les cours d'eau. Les arbres se trouvantle long d’une riviére préviennent l’érasion des sols et diminuent le niveau de sédiments dans l'eau, la gardant ainsi claire: Lorsque des foréts entiéres sont abattues, les riviéres des environs en sont affectées. Des débris d’arbres peuvent bloquerle passage des saumons, ce qui risque de les empécher soit d'aller frayer, soit de rejoindre la mer. Pris au piége, ils peuvent en mourir. De plus, la température de l'eau peut changers’il n'y a plus d’arbres autour et les poissons sont. alors en danger. Advenant une -Les foréts humides tempérées de la c6te Ouest ont commencé a pousser aprés grosse saison des pluies, I’érosion des la demiére ére glaciaire, il y a environ 14 000 ans. Elles ont donc eu beaucoup de_pberges de Ia riviére peut étre trés grave temps pour se développer pleinement et atteindre le niveau de complexité qu’elles et jes saumons risquent de ne plus ont de nos jours. Tout un monde se cache dans la forét, tant au pied des arbres qu’a _revenir, leur habitat étant complétement leur cime. Diverses sortes de mousses et de champignons aiment I’humidité, et transformé. certains aident a ja décomposition des vieux arbres morts. II y a des vers de terre, ® —§ Ww des milliers d'insectes, une multitude de plantes, etc. Un endroit particuliérement LG, florissant dans une forét d’arbres géants est la voite des arbres. Les hautes branches hébergent un petit monde grouillant de vie, une sorte de forét dans la forét . Il y a la- Ave haut des mousses et des lichens, parfois en si grande quantité qu’on dirait un petit < jardin suspendu. Or, dans ce jardin, on peut découvrir mille et une petites bétes: = salamandres, limaces géantes, araignées, mites, mille-pattes, fourmis, bref toutes sortes d'insectes dont certains méme n'ont jamais été observés ailleurs auparavant! Pour parvenir a la voite des arbres géants, bien des chercheurs ont di surmonter leur peur des hauteurs, escaladant les arbres un peu comme des alpinistes et &e travaillant surde petites plates-formes situées a plusieurs dizaines de métres du sol... Soit dit en passant, ces plates-formes sont installées a l’aide de courroies, comme celles qu’utilisent les déménageurs. Ainsi, les arbres ne sont aucunement blessés et les chercheurs peuvent travailler en toute sécurité, s’ils n’ont pas le vertige, bien entendu! @ Yl : , iN S = tao & s Les animaux de la forét Evidemment, il n'y a pas que des insectes dans la forét humide tempérée. Comme dans toute forét qui se respecte, , ily a plusieurs espéces d'animaux quise 7 cachent ici: pics-bois, écureuils, chevreuils, oiseaux, etc. En fait, pour certains animaux, les foréts d’arbres . géants représentent beaucoup, car ils y sont a l’abri. Par exemple, l’ours grizzly et I’élan dépendent de la forét humide tempérée pour leur survie. L’ours grizzly est une espéce menacée depuis 1991, car la coupe a blanc du bois détruit ce dont il se nourrit: racines, plantes, petits fruits et saumons (jusqu’a un certain point). Les anciennes foréts d’arbres géants lui servent de demier refuge. Quant a!'’élan, il ne pourrait survivre aux hivers froids sans la protection de ces foréts qui maintiennent une température douce et lui procurent la nourriture qu'il aurait du mal a trouver sous une épaisse couche de neige. L’aigle a téte blanche dépend aussi des anciennes foréts pour construire son nid, qu’il préfére installer au sommet de vieux et gros arbres ayant des branches disposées de fagon a lui servir de plate- forme solide pour supporter ses aiglons. he = Se \~ | La coupe du bois La controverse existe depuis longtemps quant | a la coupe des arbres, igéants ou pas, en Colombie-Britannique comme ailleurs. II faut savoir que les arbres géants font partie de la meilleure réserve de bois au monde. Or, la céte Ouest de I'Amérique du Nofd ayant les coniféres les plus imposants, il va de soi qu'ils sont trés recherchés, tant pour leufitaille que pour la qualité de leur grain (plus'un arbre est vieux, moins il y a de noeuds dans le bois: il est ainsi plus beau et plus solide). On doit se rendre a l’évidence que le bois a une grande place dans nos vies: maisons, meubles, papiers et journaux, entre autres, sont fabriqués apartirde ce matériau. Toutefois, un arbre vivant est aussitrés important. C'est grace aux. arbres denos foréts qu'il y a renouvellement constant de l’oxygéne que nous respirons. Les arbres maintiennent les sols en place, contrélant par le fait méme le niveau de l’eau dans les riviéres. Les foréts abritent toutes sortes d’animaux et de plantes. Elles sont convoitées tant par les exploiteurs forestiers que par les écologistes. : dépendent des foréts pour leur survie. | En Colombie-Britannique, dont la superficie est de 95 millions d’hectares, 43 millions d’hectares sont occupés par les foréts. Environ 180 000 hectares de bois sont coupés chaque année. Est-ce qu’on en coupe trop? Faudrait-il attendre plus longtemps avantde couper certains arbres? Beaucoup de gens se penchent sur la question depuis plusieurs années et, graduellement, la gestion des foréts et de leur - exploitation se fait plus sagement. La technique : de coupe a blanc des foréts (c’est-a-dire lacoupe - de sections entiéres) est de plus en pluscritiquée_. et remise en question. Les gens travaillant en foresterie proposent plutét une coupe sélective du bois, préservant davantage l'environnement. Enfin, pour chaque arbre qui est coupé, on essaie d’en replanter un autre. Il y a une volonté de collaboration entre les gens travaillant en exploitation forestiére et les écologistes, afin de préserver nos ressources naturelles, et ce pourle bien de tous. En juin 1994, le goauvemement de la Colombie-Britannique dévoilait son plan d'utilisation des terres sur I’ile de Vancouver. Ce plan spécifiait que vingt-trois des plus importantes régions écologiques de I'ile seront désormais protégées de fagon permanente contre toute coupe de bois. Depuis 1991, le gouvernement travaille & adapter l'industrie du bois a une nouvelle pensée plus écologique, sans toutefois terrasser cette industrie, qui fait vivre plusieurs milliers de personnes dans la province. II faut que tous et chacun fassent preuve de bonne volonté. Déja, nous commengons a voir des résultats positifs et intéressants. Z ~ Naissance et renalssance d'une forét — Evidemment, iln'y apas que |'exploitation forestiére qui nuise aux foréts. Il peut survenir des maladies ou des invasions d'insectes, qui font en sorte que les arbres meurent. Les feux de foréts, rasent des kilométres et des kilométres de terrain. Toutefois, un feu de forét n'est pas fatal: la forét en renait toujours, bien que parfois différemment. Lorsque la canicule sévit pendant plusieurs jours, il ne suffit que d’un seul éclair pour déclencher un incendie monstre.’ Les animaux les plus rapides réussissent a s’enfuir. Les autres ne survivent pas. Tout est noirci et désert aprés un feu de forét, mais lentement la vie reprend son cours. Aprés un an, des plantes surgissent ca et la. Quelques graines enfouies profondément dans le sol ont été épargnées par la chaleur intense du brasier. D’autres graines ont . 6té amenées sur les lieux par le vent ou par les animaux. Les insectes et les oiseaux reviennent petit a petit. Les mousses et les champignons croissent rapidement sur tout ce bois mort. Aprés dix ans, les sapins de Douglas et les aulnes rouges luttent pour un morceau de terrain et de ciel. Les chevreuils reviennent tranquillement. Aprés cinquante ans, les sapins de Douglas affichent leur suprématie, dépassant les aulnes rouges. Eventuellement, ils les étoufferont complétement, a cause.de leur taille imposante. Aprés cent vingt ans, la forét est belle et calme. Les sapins de Douglas absorbent presque toute la lumiére, ce qui ne laisse au sol que quelques espéces de plantes (les plus résistantes), des mousses et des champignons. D'autres plantes vivent dans la vote des arbres, sur des branches couvertes de végétation diverse. On dirait un épais tapis de verdure. Aprés deux cent cinquante ans; les plus gros sapins de Douglas sont beauxetrésistants. Les plus faibles sapins tomberont, soit attaqués par les insectes ou la maladie, soit ' foudroyés par une tempéte. Aprés cing cents ans, les sapins de Douglas dépassent méme les cédres et les pins géants quiles entourent. Quantité d’arbres morts au sol ont été envahis par la mousse, les lichens, les champignons, ainsi que des petites plantes et de nouveaux arbres. Les animaux vont et viennent, 'affdt d’une nourriture abondante. Aprés mille deux cent ans, une tempéte fait tomber le dernier des sapins de Douglas de la forét et c'est enfin au tourdes pins et des cédres de dominer les alentours. La forét _ est une source constante de renouvellement, de vie. Elle grandit, meurt et se régénére. Elle est précieuse pour tous les 6tres vivants, que ce soit du monde animal ou du monde végétal. C’est pour cela qu'il faut en prendre soin. re —