Le Soleil, avril 1995 -A4 Le Soleil, avril 1995 - A5 PUIS LES CHOSES S'ENVENIMERENT Les Indiens croyaient que la terre, le ciel, les eaux et les foréts appartenaient a tout le monde. Ils ne pouvaient pas imaginer que l'on puisse acheter et revendre une parcelle de terrain ou qu'elle puisse appartenir 4 la méme personne pour toute une vie. Les Colons, eux, pensaient autrement. Au nord des Prairies, pour donner plus de terres aux fermiers, les autorités gouvernementales expulsaient les Indiens de leurs vastes territoires de chasse. Au sud, elles chassaient les Métis afin de pouvoir construire sur les lieux qu'ils occupaient le chemin de fer qui devait relier l'Atlantique au Pacifique. De plus, les Colons tuaient les bisons, non point pour se nourrir et se vétir comme le faisaient les Indiens, mais pour vendre les peaux. Bientét les relations entre les nouveaux venus et les Indiens s‘envenimérent. LSS ISS SS ra Va aa a ection Grangier A l'abri dans un train, les passagers déciment un troupeau de bisons a a a ee wa a ae ae ra Pour régler tous ces problémes, et comme il avait hate de coloniser l'Ouest, le gouvernement proposa de signer un traité avec les Autochtones. POUNDMAKER qui était trés préoccupé par tous ceschangements, posait beaucoup de questions aux représentants du gouvernement. II voulait s'assurer que son peuple ne se retrouverait pas lésé par les conditions du traité. Mais les négociateurs du gouvernement n'arrivaient pas a le considérer comme un représentant des Indiens ; ils le percevaient plut6t comme un "fauteur de troubles". Malgré tout, aprés bien des hésitations et certainementa §& contre—coeur, (sans enthousiasme, avec répugnance) les Crees finirent par accepter le traité numéro 6, que leur proposait le gouvernement. ILS LE SIGNERENT AU FORT CARLTON LE 28 AOUT, ET AU FORT PITT LE 9 SEPTEMBRE 1876. ~= SEKA-KINYAN appartenait 4 la tribu STONY qui vivait au pied des Rocheuses. Il recut le nom de Poundmaker a cause de son pére qui était bien connu pour son habileté a fabriquer d'excellents "POUNDS", ou piéges a bisons. Sa mére, originaire des Prairies, était métisse. Il était encore enfant lorsque son pére mourut. Sa mére décida alors de retourner vivre, avec ses deux fils POUNDMAKER et YELLOW BLANKET, parmi les siens dans les Prairies. Malheureusement quelques années aprés son retour, elle PPP LPI SSI TSS SS TTT, L'INCIDENT DE BATTLEFORD L'ENFANT DE TOUS | — | POUNDMAKER naquit 4 BATTLEFORD, Saskatchewan, en 1828. Son pére LA FAMP@E DANS LES "RESERVES" mourut a son tour. Les deux enfants ne restérent pas longtemps orphelins pour autant. Ils furent adoptés par une bande de Crees nomades qui s'occupérent d'eux comme s'ils faisaient partie de la bande. Malgré tout, sans leurs parents, Poundmaker et son frére durent apprendre trés jeunes 4 se débrouiller seuls. Désormais, les Crees devraient danc vivre dans les territoires qui leur avaient été alloués. [ls devraient abandonner leur mode de vie traditionnel pour devenir fermiers. Le gouvernement leur fournirait les semences, les animaux, les eS Fe K ® GRANDIR CHEZ LES CREES POUNDMAKER grandissait comme les autres petits Indiens des Plaines. Il apprenait a parler la langue des Crees, qui était aussi celle de sa mére et la plus parlée parmi les Indiens des Prairies. A mesure qu'il grandissait, il se familiarisait avec la fagon de vivre des Crees leurs coutumes, leurs croyances, enfin avec tout ce qui lui était nécessaire d'apprendre pour pouvoir devenir, un jour, un bon chasseur et un bon guerrier. C'est en écoutant et en observant les grandes personnes que le jeune Indien faisait l'apprentissage des rites de son peuple. Parfois il écoutait les Anciens raconter que le monde spirituel influengait toutes les activités des hommes ; «qu'il y avait un créateur tout puissant, qui avait fait toute chose et régnait sur tout». Ils disaient encore «que la terre était la femme de ce créateur, que toutes les plantes, tous les animaux et tous les hommes étaient leurs enfants et que dans l'ordre de la création, les hommes venaient les fy Poundmaker. Un jour, il fut assez fort pour pouvoir suivr ‘ a et l'expérience, il devint un chasseur émérite. DES ENNEMIS DE TOUJOURS POUNDMAKER avait appris que les Crees et les Pieds—Noirs, qui étaient depuis toujours des tribus = ennemies, se livraient de féroces batailles au cours fm desquelles les vainqueurs capturaientles femmes et les fay enfants et pillaient les campements afin de voler leurs chevaux. I] faut savoir que dans la culture des Crees, prendre un cheval a un ennemi était considéré comme Aun acte de bravoure. Aussi lorsque vint le temps pour POUNDMAKER de se procurer une monture, il n‘hésita fee pas a aller en chercher une dans le territoire des > ~Pieds—Noirs. POUNDMAKER était bien connu chez baa ics Pieds—Noirs pour ses exploits de chasseur mais encore plus pour ses talents de guérisseur. Avec son pére, qui avait été le sorcier de sa tribu, il avait appris le secret des divers mélanges de plantes sauvages capables de faire baisser la fiévre ou encore de soulager la douleur. Il aimait parcourir les grands espaces, et comme il errait sur le territoire des Pieds—Noirs, il avait fini par devenir aussi familier avec cette tribu que la sienne. C'est ainsi qu'un jour, il rencontra CROWFOOT. derniers puisqu'ils dépendaient des plantes et des animaux | pour assurer leur subsistance». Ainsi grandissait a la chasse les jeunes hommes de sa tribu. Avec le temps® QUAND LA HAINE FAIT PLACE A L'AMITIE -diverses tribus, mais avec le temps, les hostilités - S'atténuérent. Hélas, 4 peine la paix venait—elle outils et un petit salaire. Mais les choses ne se passérent pas aussi bien que prévu. Les terres qu'on leur avait données n'étaient pas toujours propices a la culture, et les Crees étaient avant tout des chasseursiét non des cultivateurs. Puis il y eut la chaleur et la sécheresse qui affectérent le gibier, les récoltes et les baies sauvages dont ils se nourrissaient. L’hiver de 1882 fut terrible. Latempérature varia entre —30 C et-40 C. Quand la nourriture vint 4 manquer, les vieillards, les jeunes enfants et les malades moururent. Alors la bande de POUNDMAKER organisala danse du tambour pour inviter les colons de Battleford 4 leur apporter des vivres. Cet hiver—la, POUNDMAKER conseilla 4 son peuple "DE NE PLUS COMPTER SUR LE SOU VERNEMENT POUR ASSURER SA SUBSISTANCE MAIS PLUTOT SUR LUI-MEME". a ‘exerce au tir! QUAND LA COLERE GRONDE Quand le bison vint 4 manquer et que la faim se fit sentir un pew partout dans les Prairies, la colére commenca A gronder parmi les diverses tribus. Il fut question de soulévement mm contre les colons et le gouvernement. ~, POUNDMAKER était contre la violence ~ car il Savait qu'elle n'améliorerait pas la ™ Situation désespérée de son peuple. Il W, Sc Souvenait des batailles récentes qui wm avaienteu lieu aux Etats—Unis entre - Sous l'oeil vigilant din ainé, un jeune s ’ Tous les Indiens des Plaines connaissaient CROWFOOT, | La sagesse légendaire de ce grand chef des Pieds—Noirs lui # avait acquis le respect de tous. CROWFOOT, qui faisait # partie de la CONFEDERATION DES PIEDS—NOIRS, 4 se rendait bien compte que les escarmouches 4 incessantes que se livraient les différentes tribus étaient 4 un grand malheur. I] avait luicméme perdu, pendant # l'une de ces batailles, celui qu'il considérait comme son successeur, son propre fils. En vérité, il souhaitait ® Sioux et des Nez—Percés avaient “ cnduré. Il refusa donc de se % jOindre aux Métis dans leur ® rébellion contre les autorités. POUNDMAKER son fils adoptif. Ces deux "sages" ne’ réussirent pas a obtenir immédiatement I'entente entre les de s'installer dans les Prairies que les Indiens AY i ; Poh oon S. 0 devaient déja faire face 4 un autre % & ¢ eb etter ee probleme celui que leur posaient %, ; : & ts} 1 G4néral £0 Middlaton Ssay cane M : les Colons venus de l'Est qui %, & mettre fin a la guerre. Hélas, il menacaient de leur enlever j Be e : jo he rencontra que le mépris du général et les 5. = & of we, murs:d'une cellule de prison. 4 leurs terres, tuer leurs bisons et changer leur mode traditionnel de vie. POUNDMAKER préféra partir, accompagné d'un groupe, f d‘Indiens et de Métis, rencontrer monsieur Rae, le¥ représentant des Affaires indiennes, 4 Battleford, afin’ de lui demander des provisions alimentaires pour les’ \s.." occupants des "réserves". Malheureusement les habitants de Battleford voyant arriver Poundmaker et ses hommes | - pensérent que c’était un groupe qui venait les assaillir. 3 Effrayés, ils s'enfuirent rapidement. Lorsquej ound, oa Poundmaker entra dans la ville, il la trouva déserte,# et monsieur Rae refusa de sortir du fort pour le rencontrer. Pris de colére devant ce refus, les Indiens¥ se mirent a fracasser les fenétres et A s'emparer des? provisions. POUNDMAKER fut incapable de les ‘,, controler. En représailles, les autorités ; gouvernementales décidérent d'attaquer le campement de POUNDMAKER 4 Cut Knife Hill, le 2 mai 1885. Au cours de cette bataille sanglante, les Indiens réussirent 4 vaincre. les soldats du colonel Otter. POUNDMAKER savait qu'on. avait tiré sur les siens, sur les femmes et les enfants mais: il ne voyait pas 4 quoi pourrait servir de poursuivre des. soldats déja vaincus, alors il ordonna d'arréter la fusillade par ces mots "Laissez partir les soldats ;. on les a eus, nos familles sont en sécurité, et la victoire est 4 nous". Blancs américains et Indiens, et de. tout le malheur que les tribus des UN HOMME DE PAIX | Lorsque POUNDMAKER, un peu ~ contre son gré, pritla décisionde =~ conduire un groupe de Crees vers Batoche, o& ce groupe devait se. - joindre 4 la rébellion de Louis Riel, les Indiens, qui avaient toujours un peu faim, attaquérent un train chargé , de provisions dontil s'emparérent. Durant l'échauffourée (bagarre importante et confuse), ils auraient sans doute fini par 40U> tuer le conducteur du train si Poundmaker ne les en avait empéchés. Ce grand chef cree était décidément homme de paix. | Indiens et Colons, décida de rencontrer le général Middleton afin de négocier la paix. Mais le général ne voulut rien - savoir. Pourtant Poundmaker était f venu, plein de bonne volonté, Eventuellement, il fut accusé d'attentat contre la sfreté de l'Etat. Cela voulait. dire «qu'on Jui reprochait d'avoir voulu renverser le gouvernement». | Durant la rébellion de Louis Riel, Poundmaker toujours soucieux de trouver | une solution pacifique aux différends entre _ #.ETRANGER A SON * PROPRE PROCES = * Ason procés, POUNDMAKER “eg £ plaida non coupable. Comme il 'y ne parlait pas anglais, il ne oh ‘“¢ comprit pas grand chose a ce qui e Be § se passait pendant son jugement. *y # De plus, il trouvait tout cela bien a étrange. Les femmes qui assistaient ® au procés arrivaient vétues de leurs ® plus beaux atours, les hommes ® portaient des perruques et voila que # l'accusation avait changé. On lui " reprochait maintenant d'avoir combattu la reine et de vouloir la chasser du pays. Pauvre ~ POUNDMAKER ! Non seulement il n'avait jamais eu © envie de combattre la reine Victoria, mais il ne l'avait méme jamais vue. Poundmaker fut condamné 4 trois ans de prison. Lorsqu'il apprit sa sentence, ce grand chef qui aimait tant la liberté déclara qu'il "préférait étre pendu plutdt que d'étre mis en prison". Cependant, quelques mois plus tard, sous la pression des Crees qui menagaient de se révolter, il fut libéré. QUAND ON MEURT DE TUBERCULOSE... ET DE CHAGRIN Lorsqu'il revint dans sa réserve, POUNDMAKER fut trés attristé. Celle—ci avait été dévastée et pillée par F4, les Colons qui prétendaient étre venus chercher le butin de la victoire. Son peuple qui, autrefois, parcourait la - plaine en toute liberté, devait maintenant demander la permission a4 «l'agent des Indiens» pour sortir de la réserve. Les missionnaires condamnaientouvertement les rites religieux et la danse. A l'école, on interdisait x enfants de parler leur langue. Alors Poundmaker ~, .RLA CONTRE L'HOMME BLANC COMME IL yt L'AVAIT JAMAIS FAIT ; il s'éleva contre les Ae missionnaires qui travaillaient 4 détruire les croyances indiennes». Puis il voulut revoir son vieil ami CROWFOOT. C'est-peu de ¢- temps aprés lui avoir rendu visite qu'il -- mourut. Certains disent qu'il succomba a la tuberculose qu'il avait contractée 174 en prison, d'autres assurent qu'il eut sy une crise cardiaque qui lui fut % fatale, mais les Crees savent “9. bien que POUNDMAKER a , mourut épuisé sous le poids —&, -de la lutte qu'il avait enée pour son peuple et sans doute... de chagrin aussi.