Art dans la Vie de ’Homme Par Ladislas Kardos Avec la Révolution 1’Art devient presque ennuyeux. L’esprit de la raison régne. David est le photographe of- ficiel de Napoléon. Avec cet- ° te époque finissent les temps - ot l’artiste disparaissait derriére son oeuvre et ou cette oeuvre était jugée d’ aprés sa ressemblance avec l’image conventionnelle telle que tout le monde pouvait la voir les aveugles d’es- prit, inclus. Baudelaire di- sait :‘L’image est néces- saire A l’art et la base méme de l’esthétique est l’individualisme et la sin- cérité de l’artiste. Delacroix avant les im- pressionnistes disait :‘‘Un tableau n’est rien s’il ne provoque pas 1’imagination. Les plus belles oeuvres d’ art sont celles, qui expri- ment la fantaisie pure de l’artiste... Réalisme est 1’ antipode de l’art.’’Et puis il disait :“quelque chose qui illustre mieux que toute ex- plication, l’évolution de |’ art et de l’impressionnisme 4 venir.’? Avant tout une peinture doit plaire aux yeux mais cela ne veut pas dire que nous pouvons nous pas- ser de la raison. Comme en poésie, la meilleure his- toire ne fait pas un poéme si elle fait mal aux o- reilles.’’ Et Degas :‘*Une peinture demande un certain mysté- re, du vague et de la fan- taisie. Quand on met tout le temps les points sur les i, on finit par ennuyer, mé- me si l’ontravailled’aprés nature, il faut inventer.’’ Les Chinois ne travaillaient jamais d’aprés nature : l’ar- tiste voyageait, regardait, s’ imprégnait de paysages et, plus tard, les reproduisait dans son atelier, aprés les avoir digérés, absorbés dans sa propre personnalité et recomposés selon les régles esthétiques. La nature était inspiratrice et l’artiste é- tait le créateur. C’est ce que les impression- nistes ont fait. Ils ont ajouté leur personnalité et leur imagination 4 lanature. Plus ‘tard, l’art abstrait est allé un pas plus loin: il exclut la nature visible, ainsi que la raison, et les remplace par 1l’émotion. Mais en at- tendant les impressionnistes hués et ridiculisés pour leur audace, ont créé un monde nouveau. Ils _utilisent les couleurs pour créer une image; la forme méme est moins importante. Pensez aux Nymphes de Monet. Et plus important encore,ils ou- vrentles portes et les fenétres et nousménentgans lanature, non pas une nature hostile ou artificielle, mais une na- ture dans laquelle nous pou- vons respirer, vivre. C’est pourquoi, je crois, que cha- que station de sports d’hiver devrait ériger une statue en reconnaissance aux artistes impressionnistes, et le Club Méditerranée devrait nom- mer ses camps d’aprés Pis- saro, Monet, Renoir etc... Et que ferait 1’industrie des cartes postales sans Utrillo, Puis viennent Paul Klee, Braque, Picasso JuanGris... Le cubisme. L’homme sait que chaque objet adeuxtrois dix, mille faces. Pour vrai- ment voir quelque chose il faudrait faire le tour de 1’ objet et encore on serait dans l’incertitude sil’image qu’on a vue par devant n’avait pas changé pendant les quelques pas que l’on a fait pour la voir par derriére. Une cu- riosité intellectuelle, une certaine quiétude nous pous- sent et poussent l’artiste vers le cubisme. Représen- ter l’objet de tous les cdtés 4 la fois, comme l’éclat du diamant provenant de la vi- sibilité de toute les facettes, représenter une guitare non seulement comme un objet, mais comme la musique qui peut en sortir et l1’émotion que cette musique peut pro- voquer sur celui qui 1’écou- Isabelle Par Jacques Baillaut Isabelle est toute contente de sentir le soleil amoureux caresser gentiment ses pen- tes, inondant de lumiére ses rondeurs et ses creux. L’in- discret a glissé ses rayons jusqu’au fond de ses gorges, chassant l’ombre et le froid - de l’hiver. A chaque hanche, il a ac- croché les perles et les dia- mants de mille gouttes d’eau limpide, larmes de joie des sous-bois A l’approche des beaux» jours que le froid de la nuit fige encore en pouck> d’oreilles de cris- ta e L’ours est sorti de sa ta- niére ; il sifflote en tra- versant la clairiére, pous- sant sa brouette de bon ma- tin, en allant labourer son jardin. La féte du renouveau est commencée. C’était hier encore l’hiver et ce matin, 4 Vancouver, c’est déjA le printemps. Le général hiver ne fait plus le méchant ; il ramasse ses cliques et ses flaques ; téte basse, en retraite, il nous tourne le derriére, sa houppelande blanche est toute déchirée, et l’eau cou- le de ses mille blessures, tandis que la terre prépare fiévreusement sa tunique verte garnie de boutons d’or. ISABELLE peut étre enten- due A 1l’émission ‘‘Du vent dans les voiles’’ présentée par Serge Arsenault du lun- . ‘di au vendredi A 7 h, sur ‘les ondes de CRBUF-FM,97.7 - Vancouver. ISABELLE c’est pour vous. ' (Tous droits de reproduc- tion et d’adaptation réser- vés). te. Dans un portrait de fem- me il ne montre pas seule- ment le nez, finement cise- 1é, un décolleté délicieux... Chez Ingres ce décolleté en- chante le spectateur. Chez Picasso ce décolleté fait peur. Car Picasso nous mon- tre ce décolleté comme I’a- bime de cette fleur qui at- tire les insectes par ses couleurs et ses parfums mais qui se referme sur eux pour les dévorer. Pau- vres insectes que nous som- mes,Messieurs ! La grandeur de Picasso ne réside pas dans le fait que nous trouvons, dans sa pé- riode rose et bleue, un ar- tiste accompli; il y en avait d’autres qui dessinaient et peignaient aussi bien que lui, mais il est devenu le grand homme parce qu’il a donné 4 l’art un aspect romanti- que et parce qu’il avait rai- son. Le romantisme est mort et les dadaistes, les surré- alistes, les cubistes, ont éri- gé sa pierre tombale. Cette évolution a préparé le terrain alaplus grande inno- vation dans l’art depuis les peintres rupestres,... l’art abstrait. L’intelligence n’est plus en jeu, ni la foi, nila croyance dans les formes surnaturelles, ni la raison, ni le romantisme. C’est I’ art pour l’art. La réaction l’art abstrait est pure- ment émotionnelle. Il y a aussiun autre élément qui a contribué 4 cette nou- velle expression artistique : le désir de l’artiste de ne pas rendre latache au spectateur trop facile. Une oeuvre d’art ne-commence 4A vivre que si quelqu’un, en dehors de l’ar- tiste, y met du sien. Un ta- bleau, ou une statue, devrait étre un ouvrage fait en com- mun entre l’artiste et son public. Et l’artiste ne veut pas se prostituer en facili- tant les choses. Mondrien a pris longtemps pour trou- ver que la forme de la croix est une abstraction d’un ar- | La Caisse Populaire de bre et Brancusi a mis des années A réduire des blocs de pierre pour découvrir que la forme originale est l’oeuf. Malheureusement cet art paraft trop facile et puis- que nous n’avons pas encore trouvé des régles et des me- sures, tout le monde peut faire des taches sur une toile. Il peut lesfaire avec une brosse ou avec son neZ, il peut tratner une jolie fille nue, sur une surface od 1’on| a au préalable renversé ee pots de peintures, ou,on peut} faire des lignes en pressant sur le tube et en dansant devant la toile comme le fait Mathieu. Si j’étais roi, ou Malraux, j’exigerais qu chaque peintre porte un ap- pareil anti-mensonge avan de peindre, comme Fra An gelico priait avant de com- mencer un tableau. Mais j ne suis ni roi, ni Malrau et je me contente de connaf- tre autant que possible la). personnalité du peintre pou que je puisse me faire wu idée si cet homme est sin- cére ou non. Et si je peux pas le rencontrer, j’ essaye de lire un ouvrag sur lui pour préparer mo: jugement. Plus que jamai l’oeuvre s’identifie avec |’ artiste. Vous vous rappelez| ce que Baudelaire disait : ‘*La base de l’esthétique est l’individualisme et la sincé- rité.’’? Et plus que jamais 1’ oeuvre devient une autobio- graphie de l’artiste dans la- quelle le spectateur peut se retrouver.L’art devient plus que jamais hermétique, et les valeurs deviennent re- latives. Maillard ville 1013 Brunette Cog. Tél. 526 - 3774 Epargnes et préts assurés. Patronisez vos institutions. Pour un meilleur service. Faites-nous confiance. LE SOLEIL DE VANCOUVER, 26 MARS 1971, Lx. Sei iin pt ay RO, 2