12 Le vendredi 30 janvier 1998 a chaine de cinémas Famous Players a récem- ment annoncé l’ou- verture, en décembre prochain, d’un tout nouveau complexe de salles de cinéma Silver City. Vingt salles composant 4 500 & Coquitlam siéges. En tenant compte de Pouverture possible d’un complexe similaire 4 Granville Island, de la fermeture du Plaza, de la fermeture prochaine du Dunbar et de l'avenir incertain du Varsity, il devient clair que la région de Vancouver subit de grandes transformations quant & la nature de son parc de salles de cinéma. Famous Players ouvre la voie 4 lexpérience cinématographique de Il’a- venir : des écrans recourbés, diminuant ainsi l’angle de vue pour les spectateurs assis sur les cdtés, un systtme de son digital et enfin, des siéges confortables répartis sur des rangées superposées ; finies les grosses tétes qui bloquent la vue ! Plaidoyer pour une société Face aux enjeux des- tructeurs d’un monde idéal rempli de frustrations, Norman Nawrocki veut prendre I’ini- tiative d’une nouvelle croisade qui sortirait I’humanité de loppression. ans son premier recueil de poé- mes en francais Chasseur de tor- nade : réves, soupirs, et sacres vers un monde Iibertaire, lancé la semaine derniére au Centre culturel francophone de Vancouver, |’auteur est monté plusieurs fois au créneau pour désarmorcer la bombe qui condamnerait hommes, femmes et enfants & partager un monde noir semblable au « Black flag ». Loin de rompre avec son style rebelle et engagé, Norman Nawrocki essaie de mettre ensemble ses talents artistiques pour donner la vie & ses phrases. La substance méme de son oeuvre est : ; 7 L’occasion s’avérait toute indiquée pour visiter le complexe Silver City - Riverport récemment ouvert & Richmond, et qui déja accomplit des affaires d’or. D’entrée, le spectateur est assailli par les sens. Une trés forte musique « dance » souligne un décor techno et éclairé par des néons multicolores. Un comptoir: a guichets informatisés accueille le spectateur qui, aprés avoir franchi la premiére étape, est interpellé par le préposé au comptoir de friandises. Au plafond pendent des effigies du vaisseau spatial de la série Star Trek (Patrouille du cosmos), du bateau de Forrest Gump, de Mighty Mouse. Des affiches de films américains présents ou & venir meublent les murs entre les différentes concessions ; New York Fries, Mr. Felix and Mr. Norton, Pizza Hut, ainsi que Pinévitable Starbucks. Enfin une arcade de jeux vidéo, Techtown, occupe un espace puisée dans les anecdotes et faits courants de la société qui Ventoure ; le plus souvent dans les ruelles, les bars, les bus... Mais l’auteur a reconnu, lors de la présentation de son livre, qu'il doit son style d’abord maiquains vers les années 1985 avant de subir Vin- fluence des grands écrivains aux poetes ja- américains comme Traven. Bob Marley aura marqué aussi ses premiers pas dans la musique de cabaret. Fidéle a sa mission, |’auteur tente a travers son oeuvre de multiplier les appels 4 la mobilisation collective en faveur d’un monde meilleur, dégagé de soupirs im- placables. Le poéte-violoniste- comédien invite les lecteurs & vite tourner la page d’un quotidien bourré de tracasseries. Dans « No cash polka », Norman Nawrocki décrit avec le sens humoristique qui le stratégique, prés des guichets. Ah oui, j’oubliais |! De chaque cété de cette aire centrale se situent deux corridors ot se trouvent les salles de projection, Le tout est joyeusement arpenté par un personnel en uniforme et affublé de walkies-talkies ultramodernes. ll est vrai que les améliorations technologiques x apportent beaucoup a Yexpérience — cinématogra- phique ; que toute entreprise & but lucratif existe dans le but de maximiser ses profits ; aussi que la formule adoptée par Famous Players réussit & atteindre son public cible, majoritairement adolescent. Je ne peux cependant m’empécher de noter l’ironie d’assister en cet endroit a la projection du dernier James Bond Tomorrow Never Dies. En effet, dans ce film, le célébre héros britannique est aux prises avec un magnat de Vinformation dont V’objectif n’est pas d’informer, mais caractérise ce monde de cau- chemars. « Oui mesdames et messieurs / c’est le moment que vous attendiez ! / La fin du mois quand ces danseurs maladroits, Messieurs le Proprio, Hydro, le Gaz / et Madame Téléphone, mar- chent sur vos orteils ! / Et ca fait mal ! D’autant que vous ne les avez pas invités & danser ! / Et que vous avez le blues de n’avoir ni job, ni fric, vous joe Bea étes CaSses ! » Le point fort de ce recueil se trouve dans la nouvelle -tache que auteur s’assigne a Vaurore du XXle siécle. Celle de plaider pour les femmes victimes de violences sexuel- les, politiques et économiques. Une fois de plus la femme est a honneur. Dans « Un long voyage en bus », Norman Nawrocki ne cache pas son attachement au sexe opposé quand il pense que la solidarité des hommes a déja I’ve seen, the future baby, itis murder. Leonard Cohen, € The Future » bien d’agrandir son pouvoir. L’analogie s’impose : je me demande si par ce nouveau concept, Famous Players ne cherche pas tant a présenter des films, c’est-da-dire des oeuvres qui racontent une histoire qu’& imposer une certaine culture américaine. _L’impression d’absence @humanité nettement res- sentie au Silver City invoque une certaine inquiétude quant A V’avenir de lex- périence cinématographique. Je résiste A cet argument qui dit que « l’on donne au public ce qu'il veut ». Je crois que c’est sous-estimer le spectateur, constamment ma- traqué par d’immenses machines publicitaires. Silver City insiste sur le cété divertissement du cinéma une facette qui posséde sa place, j’en conviens. Mais qu’en est-il de Vidée de présenter des images qui nous proposent un regard attentif sur le monde qui nous entoure, des images qui provoquent la réflexion et qui n’ont pas comme seul objectif de provoquer des sensations fortes ? Possédent-elles leur place dans les salles de l’an 2000 ? Peut-étre suis-je naif de poser la question, mais j’en doute. De ne pas la poser reléverait plut6t du cynisme. Le communiqué de presse émis par Famous Players pour annoncer le Silver City de Coquitlam, propose un slogan en bas de page. Un slogan qu’on retrouve maintenant sur les encarts publicitaires en ville. Une petite anodine mais qui en dit long phrase sur l’avenir : « We’re changing the movie experience forever ! Boredom is officially extinct. » Ah oui? Je ne savais pas qu’on s’ennuyait au Caprice, au Varsity ou & la Cinémathéque. Je ne savais pas qu’avant l’arrivée du son digitale et des nachos, on s’emmerdait tant que ca. Pardonnez mon’ ignorance. SYLVAIN AUMONT égalitaire cédé la place & Vindifférence sociale. Tout en reconnaissant le mérite des femmes res- ponsables et engagées, a travers « Les Femmes fortes » et « Anne- Marie », Vauteur con- sidére toujours la femme com- me des étres exposés & ce genre de si- tuations dif- ficiles. L’unité des peuples et le brassage des cultures ne sont pas pas- sés inapercus dans la vision de auteur qui veut créer autour de lui une société hostile aux divisions artificielles ol chacun jouerait pleinement le rdle qui lui est dévolu. Au Yentretien & batons rompus cours de qu'il a eu avec Le Soleil & AD B FA YOS, COMPRES WL SACKS vers un monde libertaire occasion du lancement de son ouvrage, Norman Nawrocki a réaffirmé son adhésion & un monde sgalitaire et uste. Ce recueil e 88 pages souvre les 12 nnées de sarriere de ! ENawrocki el emarque un ournant dé- Ecisif dans son Pparcours —ar- istique. Le choix de Vancouver pour lancer recueil en son premier francais constitue une nouvelle donne du bilinguisme en Colombie- Britannique JEAN-PIERRE MULEBA