en, Sana ean on ee LES MINORITES REVISITEES | bilingue peut devenir une réalité. - Mes au cours duque Baignés dans l’ambiance d’un pays a - 95% anglophone et disséminés dans les _vastes prairies canadiennes, les quelque 150,000 francophones de |’Ouest tentent . présentement un renouveau qui permet- ait d’affirmer que le réve d'un Canada Sans préjuger de l'issue de ce réveil _ suscité par la politique du gouvernement Trudeau et par les nouvelles législations scolaires qu'elle a entrainée sur le plan rovincial, il est possible d’analyser la ture de ce renouveau. ie Voici donc les impressions recueillies a loccasion d’un voyage de deux semai- ie visitées Regi tes les grandes villes (Winnipeg, - na, SeEabon. Prince-Albert, Calgary, Edmonton) et au moins une region rura- le a forte concentration francophone dans les provinces du Manitoba, de la Saskatchewan et de l’Alberta. @le fait francais existe dans 1’Ouest canadien et il est possible pour - un journaliste de passer deux semaines a rencontrer presque exclusivement des francophones. A |’exception d’un ou deux villages, on ne se sent cependant nulle| part en “‘pays francais’ et il faut une’ démarche expresse pour entrer en con-: tact avec les francophones qui, en pu- blic, deviennent des ‘‘westerners’’ com- me tout le monde. Dans toutes les villes visitées, il est impossible, par exemple, d’obtenir des journaux francais aussi bien aux aérogares qu’aux hotels. @ Apres avoir donné des signes de fatigue et d’épuisement, ce fait francais) a connu depuis quelques années un dou- ble renouveau: eee a la politique du, bilinguisme d’Ottawa’ et grace aux sub- ventions du secrétariat d’Etat, les as- sociations francophones se sont structu- rées et multiplient les activités cultu- relles; grace aux nouvelles législations scolaires au niveau provincial, la langue francaise a fait son apparition comme langue ci. fag dans certaines classes ou écoles fréquentées par les francophones. < @ Ce renouveau ce révele cependant fragile et méme artificiel a plusieurs ints de vue. Si la bouée de sauvetage: ote par le gouvernement fédéral de- venait une mesure nte, on pour-| rait en effet se demander si les franco-, phones de |’ Quest ne sont pas devenus des: assistés culturels, En d'autres mots, | la respiration artificielle perd sa signi-; fication s'il faut la pratiquer perpétuel-; lement. D’autre part, l’ouverture de clas-: sez et d’écoles ot l'enseignement se’ fait partiellement en francais ne saurait récupérer la jeunesse actuelle qui préfe-' re l'anglais au francais. Il faudra donc attendre la pena génération pour en. we Aloe le mépris de bon aloi qu’on Males m le bon aloi entretient a l’endroit des inhumaines sta- tistiques, l’omniprésent et tout-puissant facteur de la démographie et de la géo- phie resurgit sans cesse pour hanter: - francophones de l'Ouest disséminés.. sur des milliers de milles de territoi-. re et constituant moins de 57% de la popu- — lation totale. ; ; Il importe de souligner que le fait fran- cais dans l'Ouest n’est pas une réalité monolithique. Les groupes sont au con-' traire tellement différents que la Fédé- ration des francophones de |’Ouest, mi- “se sur pied il y a quelques années, de- meure une structure incapable de rallier les francophones de !’Ouest autour d’une action commune. ae = Parmi les divers points de divergence. entre les francophones des trois provin-' ces des prairies, trois meritent une attention spéciale: les données erographi ques et démographiques; les re avec les gouvernements. provinciaux; le mode de fonctionnement des associations ; “provinciales regroupant les francophones. *.*Au-chapitre.de la population et de la’ “géographié, le Manitoba favorise beau- i ‘coup: plus les francéphones que les au-. tres provinces..*Le$ Franco-Manito- | bains constituent en effet 6.1% de la po-| pulation de la proyince. (60,547 sur 988,- : 247) et leurs effectifs sont concentrés' dans un rayon. de moins de 100 milles’ de Saint-Boniface qui est maintenant sintégré 4 la ville.de Winnipeg ntais qui! continue a afficher un certain visage: francais bien .que la population soit' a plus de 60% anglophone. . < * La Saskatchewan ne compte que 3.4% | de -sa population (31,605 sur 926,242) chez les francophones gui sont de plus: disséminés dans le nord et dans le sud! de la province, la région du centre ou! lon retrouve la.capitale, Régina, n’ayant' aucune concentration francophone. Les! francophones de: la ‘Saskatchewan se ressentent par ailletirs du climat: géné- ral de: leur province’ qui est’ de. loin: 1a) plus pauvre des prairies et qui est- la, tions © -province canadienne 4 avoir connue ta plus faible augmentation de’ population ‘de 1961 a 1971. Les choses ont: méme “empirées depuis 1971 -et' la province a perdu‘ pas ‘moins de 30,000 habitants ‘qui vont chercher du’ travail au Mani-! toba et surtout dans la riche Alberta. : En Alberta, les francophones qui cons- -tituent 2.9% de la population totale (46,498. sur 1,627,874). se xetrouvent surtout, Edmonton (environ: 20,000), ans Ia région de Saint-Paul ef Bonny- ville (12,000) et la région de Riviére- la-Paix (12,000). On retrouve également quelque 3,500 francophones perdus dans la trés riche et trés américaine ville de ;Calgary. . . .. So , » Pour compléter le, tableau, on peut: _Mentionner que la Colombie-Britanni- ué-contient aussi son contingent de rancephones: 38,034 str 2,184,621 pour 71.7% de la population totale.‘ * * : . Le pourcentage des francophones di- {minue donc: a mesute qu’on s’éloigne _vers l’ouest::6.1%. au Manitoba, 3.4% en j Saskatchewan, 2.9% en Alberta et 1.7% :en Colombie-Britannique. : ‘Au chapitre des gouvernements pro- .vinciaux qui les régisSent, les franco- phones du Manitoba sont également les -plus .choyés. Le gouvernement néo-dé- emocrate de M. Ed Schreyer s’est révélé un allié des francophones presque au sméme titre. que le gouvernement Tru- -deau. Ras Se Egalement néo-démocrate, le premier, ministre de la Saskatchewan, M. Allan :Blakeny, est, lui aussi: assez sympathi- que a la cause des francophones mais ,demeure conscient d¢.leur:faible nom- bre ef ‘se montre trés--prudent devant des reactions de la majorité anglophone. ‘Comme. deja rapporte, c’est-lui qui fai- ‘Sait remarquer: “Le francais est une des deux langues officielles du Canada jmais ce n’est sirement pas la deuxieme. Jangue de la Saskatchewan.” On'ne sait pas encoré quelle sera I’at- titude du gouvernement de M. Lougheed qui a mené le parti conservateur 3 la victoire en Alberta en aoiit dernier. On ,Sait par ailleurs que ,lés citoyens de la ‘Colombie-Britannique €lisaient hier leur “gouvernement Beovnetal 2 Les francophones des trois provinces des prairies se distinguent également par les associations provinciales qui les representent: au Manitoba, la Société Franco-Manitobaine; (SFM);, en Saskat- -chewan, |’Association culturelle franco- _ ¢anadienne (ACFC); en Alberta, I’Asso- ciation canadienne-francaise dé |’ Alber- eta(ACFA).. ee De sociétés privées au. membership facultatif (un peu comme les SSJB du . Québec), ces associations se sont tran- ‘formées, depuis l’avenement du bilin- -guisme, en représentant officiel des ‘francophones. C’est a ‘ce ‘titre qu’elles présentent des mémoires aux com- missions d’enquéte et aux gouverne- ‘ments et c’est a ce titre que les con- -sidére le secrétariat d’Etat 4 Ottawa. + Comme Yon souligné deux. étudiants idu. Collége Saint-Jean, 4 Edmoriton, Lucien Royer et Jacinthe Perreault, cette transformation dans le rdle des associations n’a pas été accompagnée dune transformation équivalente de leurs structures. Cette étude, qui por- tait exclusivement sur |’Alberta, con- clut a la non-représentativité de ! ACFA et recommande 4a cette association de se transformer ou de cesser de parler ‘au nom des francophones de la pro- Au niveau de chacune des provinces Jes. Associations different grandement. : -Au_ Manitoba, les animateurs_oeuvrant: dans le cadre d’un programme du Secrétariat d’Etat ont réussi a prendre le pouvoir a la SFM aprés avoir éclipsé ce qu’on est convenu d’appeler lestablisment traditionnel. : SFM . se‘ considére maintenant comme un organisme politique et elle ne manque aucune occasion de se prone subligereest et de dénoncer - oute injustice faite aux francophones. Le principe sous-jacent 4 ces prises de position est le suivant: on dit que le Canada est bilingue et que les deux lan- gues Officielles sont égales en statut. Ii faut le mettre en pratique ou cesser ‘deledire. — = Le président de la SFM,.M. Roger |. Collet, affirme que lors du prochain’ congres, pas moins de 5, fran- cophones auront a se prononcer sur le ' programme de la sociéte. “Les Franco-Manitobains, ajoute-t-il, -n’ont jamais été aussi proche de pou- voir discuter des options fondamentales. L’assemblée générale de la SFM aura a nous donner un mandat clair et pré- cis sur ces options fondamentales,” Cette attitude du nouveau groupe de leaders (tous des anciens animateurs so-. .Claux) n’a pas été sans’ inquiéter le Se- 4) L’Ouest bilingue, un réve? crétairé d’Etat qui a demandé une en- quéte sur l’animation sociale au Ma- nitoba. Menée par M. Pellegrin, ‘cette étude a conclu au bien-fondé de |’action menée par les animateurs. : En Alberta, c’est le contraire qui s’est produit. Les animateurs ont démission- né a tour de réle et c’est l’establis- ent traditionnel qui est demeuré en place. “‘L’animation sociale, nous ne Savons pas qu’en penser puisque nous nen avons jamais eu”, ont répondu lusieurs francophones de Alberta. ette situation tient en partie aux pro- blémes particuliers de certains ani- mateurs mais également 4 l’attitude des ‘leaders de l’ACFA. . : Secrétaire de l’ACFA depuis de :nom- breuses. années, le pere Jean Patoine, 0.m.i., a monté une solide association qui est financiérement mieux pourvue que celle des autres provinces. II n’est pas contre l’animation mais a la condi- tion que les animateurs soient 4 l’em- ploi de l’ACFA ‘et oeuvrent a la réali- sation des objectifs fixés par elle. Il croit que la SFM est trop pdlitisée et veut empécher l’animation sociale “Waller trop loin’, comme ce fut le _cas, selon lui, au Manitoba. Tout en reconnaissant le travail fait -par le pére Patoine, plusieurs francopho- nes lui reprochent de mener l'association avec quelques personnages influents d’Edmonton (Me Louis A. Desrochers, chancelier de l’université de 1) Alberta, les juges Ménard et Deschénes ainsi que quelques autres) et de favoriser la politi- que du lobbying plutot que les démarches ouvertes et pub ue : Un citoyen de Saint-Paul souhaite ainsi voir “la formule du eee existe a PACFA remplacée par plique qu’un an apres la prise du pouvoir par M. Lougheed, l’ACFA n’ait pas encore rencontre le gouvernement offi- ciellement.. Le président de l’ACFA, M. Jules Van Brabant, répond qu’il vaut mieux attendre, ‘‘d’apres les contacts des personnes influentes avec les ministres.”’ En Saskatchewan, on rencontre une si- tuation ie qui ressemble en par- tie a celle du Manitoba et en partie a celle de l’Alberta, C’est sans doute ce ui explique l’absence d’animosité a !’en- droit des autres associations qu’on re- trouve dans les deux autres provinces. Il a été trés peu fait allusion a |’atti- tude des anglophones de |’Ouest 4 !’en- droit de leurs compatriotes francophones. Ce reportage portait exclusivement. sur’ les francophones qui furent les seuls vi- sités. ; Un de cés francophones, qui m’ont dailleurs recu avec lq plus chaude hos- pitalité, qui m’ont ouvert tous leurs dos- Siers et qui m’ont permis de rencontrer_ des gens de toutes les tendances, m’a d’ailleurs dit qu'il avait l’impression de- ;faire partie d'un 200. ‘“Derniérement, a-t-il ajouté, plusieurs journalistes du Québec viennent nous visiter comme’si — nous étions des phénoménes rares.”’ Ta plus pénible impression de ce voya- _ Ze est sans doute que les minorités de ? Ouest constituent, sur l’échiquier poli- tique canadien; des piéces importantes (aussi bien pour les fédéralistes que pour les séparatistes) non en elles-mémes mais pour la protection ou l’embarras qu’elles peuvent apporter aux pieces plus importantes. ; FIN FEET tf eo SALON LUCIEN’ BELLIN — COLEFEUE FRANC aS IV, LE SOLEIL, 13 OCTOBRE 1972