oe ze Reaction Ainsi donc, le président des USA se rendra en Chine, quelque part d’ici a mai 1972. La nouvelle a pris le monde entier par surprise, mais pour une fois, c’était une agréa- ble surprise. Quand les hommes qui détien- nent, selon toute apparence, le sort de la Planéte a portée de leur index respectif se donnent rendez-vous, on a tous l’impression d’obtenir un sursis. De sursis en sursis, on vit un peu. Un voyage comme celui que M. Nixon entreprendra, c’est la version contemporaine des grandes explorations qui ont caractérisé la Renaissance. Et c’est encore, en gros, la “route des Indes” qu’il s’agit, pour l’Occident, de découvrir. Pour Magellan, Marco Polo, Christophe- Colomb et méme Champlain, c’étaient les dra- gons, les gouffres appréhendés, les tempétes et méme simplement la distance qui trans- formaient leurs voyages en expéditions péril- leuses. Aujourd’hui, tout confort assuré et toute Planéte soigneusement cadastrée, c’est une distance intérieure qu’il faut franchir. Entre l’avocat républicain de Californie, WASP (White Anglo Saxon Protestant) au sourire rare et douloureux, et le révolution- naire décontracté de Pékin, il y a toute la distance d’une idéologie connue, certes, mais digérée par une culture impénétrée jusqu’a ce jour. Le rendez-vous de Nixon avec Chou En- lai constituera, au plan politique, la premiere rencontre entre l’Occident et l’Orient a leur plus fort. C’est encore l’Occidental qui se déplace, et il est toujours fort, sinon le plus fort, mais cette fois, il ne se déplacera pas en guerrier ni en colonisateur, mais en négo- ciateur de la paix. Ses intéréts le pressent d’agir ainsi, mais il y a aussi le fait que la Chine n’est plus le géant endormi dont parlait Napoléon, mais un peuple de sept cent cin- quante millions de personnes, solidement en- cadré, et assuré d’avoir a jouer un role déter- minant dans l’avenir du monde. .On peut mesurer le chemin parcouru depuis la fin de la deuxiéme guerre mondiale, et depuis les dix derniéres années en particu- lier, si l’on songe que les dirigeants chinois avaient donné congé aux éléves pour célébrer lassassinat de John Kennedy, en novembre 1963; que les mémes dirigeants faisaient pla- carder les murs des villes avec l'image du president Johnson, représenté en monstre aux naseaux fumants; que les mémes diri- geants avaient tenu leur peuple dans l’igno- rance des premiers pas de l’homme (améri- cain) sur la lune, en juillet 69. C’est les mémes dirigeants et le méme peuple qui s’apprétent a recevoir le président Nixon d’ici a quelques mois. Les dirigeants chinois n’auront aucune peine a convaincre l’opinion publique chinoise du bien-fondé de leur décision. Quand Mao dit que le président américain est un monstre sanguinaire, le peuple répéte: monstre san- guinaire. Quand Mao dit que le président ameéricain est le bienvenu, le peuple répéte - bienvenu. La dictature est confortable pour les dictateurs. On ne voit pas non plus que M. Nixon ait de la difficulte a faire accepter sa décision au peuple américain. En fait, il faudrait plutot dire que c’est l’opinion publique américaine qui a peu a peu et par divers détours imposé sa volonté aux dirigeants américains. Certes, des intéréts financiers énormes ont di exercer d’obscures pressions en ce sens, mais il y a aussi la volonté de paix qui s’exprime par la. La paix au Vietnam dépend plus de Pékin et de Washington que de Saigon et Hanoi. Les petits pays et les petits soldats peuvent toujours faire la guerre; seuls les gros peuvent faire la paix. L’annonce du voyage en Chine de M. Nixon rend, par avance, trés académique le debat prévu pour l’automne sur |’admission de la Chine a l'ONU. II est clair, cependant, que les débats anteérieurs auront joué un réle préparatoire irremplagable. On peut penser de méme que la reconnaissance de la Chine ; continentale par l’Angleterre, la France, I’Ita- ¥ lie et surtout le Canada auront également contribué a préparer le terrain. On peut dire: surtout le Canada, a cause de sa proximité geographique et de la nature de ses relations avec les USA. Par-dessus ce travail d’approche d’ordre économique et diplomatique, il y a la pression beaucoup plus directe des prochaines élec- tions présidentielles. Les chances de réélec- tion de M. Nixon seraient trés bonnes, s’il pouvait se présenter a l’automne 72 devant Velectorat americain avec la paix au Vietnam et un exemplaire autographié du petit livre rouge. _ Comme quoi les politiques de gauche sont faites par des hommes:de droite, et vice versa. "LA PRESSE; _ Jean-Paul DESBIENS ii hice Le Soleil, anciennement Le Soleil de Vancouver, fonde en 1968 et L’Appel, fondé en 1965, est un journal indépendant publieé chaque semaine par Le Soleil de Colombie Ltee, Case Postale 8190, Bureau L, Vancouver 14. C.-B. Tél. 266-942 irecteur-Rédacteurenchef: Myriam Bennett - irecteur administratif : Robert Bennett : ; Jean-Claude Arluison édacteurs : Daniel Montroty a vec la collaboration de : Gilles Aerts. - — Edmond Girault con Jacques Baillaut A.A. Hards Alain Clerc ‘Ladislas Kardos Brigitte Clerc Jennifer Lulham Gerry Decario Carmen Primeau Roger Dufrane Jean Riou II, LE SOLEIL, 23 JUILLET 1971 Coupon dabonnement Le Soleil 266-9422 Abonnement [(_] ‘Réabonnement QO NOM s ee © © ee cece cccccccccccccesccccceds ADRESSE S © © © © © oe eeeccccccccccorecaceccoce” VILEE is, e.(c: 0: ch cite: ocleleiviaie PROVINCE : occ ccccces DATE i ocis ustoesawenmucte ca ees 2 -Boite Postale 8190 | Station ; 1 an : $6.00 Nancouver, 14, B.C. 6 mois : $3.