16 - Le Soleil de Colombie, vendred: 8 janvier 1988 ENFANTS Entretien avec Christiane Duchesne TUniversité de Colombie- Britannique accueillera Chris- tiane Duchesne, auteure et illustratrice. Elle a écrit, entre autres, «Quel beau petit» et «Ah, ces oiseaux!». Elle sera a l'Université de Colombie-Britannique: lundi, le 25 janvier de 3h00 a 5h00, Salle 1227, Edifice Scarfe [Educa- tion] sur le campus de l’UC-B. Elle parlera de la fabrication de livres et dillustrations pour pk Sie et aussi de l’écriture = la télévision et les films. enez la rencontrer. Pour plus de pre Fe egg Sr veuillez Patricia Lamarre, Programme FOPIG Université Colombie-Britannique, «Tous les auteurs ont leurs critéres de qualité. D’aprés vous, quiest-ce qui fait dun lure un bon livre pour les enfants? - Ca, c'est un grand débat! Mot, je dirats quil faut d’‘abord parler a enfant de ce quil wt. Ca ne veut pas dire lut parler du métro ou du monde de la consomma- tion, mats lui donner des repéres quil reconnait, quil retrouve dans sa vie. Il y a des gens qui refont encore du Perrault ou de UAndersen, qui écrivent des histotres inspirées des mémes thémes. Seulement ¢a été fait souvent avant nous et ben fatt. Les contes d’Andersen ou de Lagerléf, version originale, sont trés intéressants mats ce n'est pas une raison pour en tirer des textes qui ne font que les répéter sans apporter quelque chose de neuf. La réalité d’il y a cent ans n'est pas la méme qu aujourd’hut. - Vous ne voulez pas qu'on continue dans la ligne des contes de fées ou ad histoires du. méme genre? - C'est surtout que jaimerats éviter ltmaginatire pour l’tmagt- naire. Il me semble quil y a une certaine complatsance @ se servir de limaginaire pour ne rien apprendre aux enfants. Des histotres avec des champignons rouges a pots blancs dans une forét or wt un petit lutin, c’était bon il y a cent ans ou dans des pays oi il y a une tradition de ce genre-la, comme en Scandinavee. Je ne vois pas pourquot on récrirait des histoires de pseudo- imagination farfelue dont tous les éléments sont copiés de contes déja vieux et qui de plus ne font rien découvrir aux lecteurs. nd vous écrivez, que cherchez-vous a apprendre aux enfants? - Je n’essate pas de faire passer des notions précises. Mais je garde en téte que le lecteur auquel je m adresse a accés 4 un matériel littéraire considérable, regarde la télévision, va au cinéma, satt beaucoup de choses. Et il vit dans un monde ot il ya une foule de réalités différentes a connaitre. Dans Uhistoire «Le loup, Voiseau et le violoncelle», un des sonnages est un loup rose amphibie. Ca ne se peut pas un loup rose et amphibie de surcroit. Ca, c’est de limaginatre. Mais jexplique aux enfants ce que signifie amphibie: «C’était un loup bien étrange, c’est-d-dire quil vevait aussi bien sur la terre que sous l’eau [ce qui est assez rare chez les loups|.» L’autre personnage, J’owseau, pleure parce quil a _ perdu son violoncelle. Les oiseaux n'ont pas de violoncelle. Mats l'enfant qui eens <( Sc Il me semble qu'il y a une certaine complaisance a se servir de l'imaginaire pour ne rien apprendre aux enfants et) regarde le dessin apprend ce qu’est un violoncelle ; zl pourra le reconnaitre a l'avenir. Je ne dts pas que la lecgon est apprise a coup stir, mats au moins le repére est la; Vhistotre a beau ne pas étre réaliste, elle donne quand méme acces au réel. Je pense a l’histotre d'une petite goutte d’eau que jai lue. Elle passe du rutsseau @ la riviére, de la riviére au fleuve, du fleuve a la mer. C'est simple, c’est A plus B, et en méme temps c’est trés riche en informations. Le méme conte aurait pu étre trazté de fagon gaga et la méme petite goutte d’eau auratt pu étre complete- ment insipide, avec une pseudo- naiveté. Au lieu de raconter la véritable aventure de la petite goutte d'eau, l'auteur auratt pu essayer de charmer l'enfant. Heureusement, il n’est pas tombé dans la facilité et la petite goutte d’eau est tout a fart charmante en _méme temps qu'elle fait connai- tre a V'enfant le cycle de Veau. Une histoire peut étre trés douce a lire, c’est-d-dire que Venfant ne sentira pas que tu veux lui apprendre quelque chose, mais zl apprendra quand méme parce que ce quill lit i bel era LILLIES. Vintéresse. Et c'est ¢a qui importe. - Vous avez écrit plusieurs contes pour les _tout-petzts. Avez-vous lintention d’écrire un jour pour des enfants plus agés? - Out. Je pense que plus un enfant weillit plus il a le gott dapprendre. De sept a douze ans, par exemple. On est trés curieux a cet dge-la et l’école ne satisfait pas entiérement cette curiosité. On leur sert de la science- fiction, des récits d'aventures, des romans fpoliciers, c'est assez limité. J’en arrive @ avoir le gotit d’écrire une histotre plus longue, plus riche. Dans la ligne de ce que je disais tout a UVheure. Il me semble que les enfants ont besoin de contes ow il y a beaucoup dinformations, dans le style de Lewis Carroll et «Alice au pays des merveilles». Le livre que je veux écrire Sappelleratt: «Les Innombrables Enfances de Cyrus». Cyrus est un petit garcon de dix ans qui raconte tout son apprentissage de la vie. De zéro a 41 jours, c’est la premiére enfance ou il se rappelle ce quil a appris comme s'il en avait été conscient. La deuxiéme enfance, c’est une autre étape de vie, et ¢a continue comme ga. Les dix premieres enfances sont dénombrées, elles vont jusqu’a sept ou hutt ans. Cyrus est une espéce de témoimn de ce que chaque enfant apprend et c’est son témoignage qui va amener les autres enfants a explorer davantage leur monde. Quand tu crées un personnage et que tu luz fais regarder les étoiles dans le ciel, pourquoi ne pourraitt-il pas y reconnaitre des constellations et lesnommer? Sil se proméne dans le bots, pourquoi n'appellerait-il pas les plantes par leurs noms? Mon pére nous racontait des histotres ou tl nous enseignazt beaucoup de _ choses. C'est peut-étre de luz que je tzens cette fagon de raconter: c'est que jai aimé apprendre de cette manieé- re, etje me rappelle encore ce que jai appris a travers ses contes.» «Et depuis 1978, |date de Ventrevue avec Danielle Simp- son} quiest-il arrivé de ce projet de roman? “i n'a jamais vu le jour. J’y at travaillé pendant une année entzére. Quand je me suts apergue que je m’embarquats pour une encyclopédie, j'at abandonné. C'est dailleurs a cette Epoque que jai fait ausst «La maison folle». Reste qu’avec ce projet, je me suis constitué une mine didées dans laquelle je puise pour mes scénarios par | exemple. - Qu'avez-vous fait pour _les enfants depuis «Le Loup, loiseau et le vtoloncelle?» - Jai écrit un autre livre «La maison folle» que jat publié moi-méme avec une amie artiste en reliure. Nous voulions fatre peu de kvres mats de beaux livres. Mais cela n'a pas fonctionné comme nous lavions espéré. Il'y a eu des problémes de distribution, un manque de publicité. De plus, et par hasard, je me suts lancée dans la traduction. Il sagit en fait d’adaptation de contes destinés aux enfants des classes dimmersion. Car il ya un choix a faire entre garder l’esprit anglais et le donner en francais ou faire le tour du texte original et lui donner un nouvel esprit en francais. Jaime beaucoup ce travail. Les livres sont souvent informatifs et je dois faire de la recherche pour mieux en saisir le contenu. - Allez-vous nous a nouveau un album? offrir -Je wiens de participer au bestiaire «La vache et d’autres animaux» de La courte échelle. Jai choist le cochon. Limage que Marie-Louise Gay avait dessinée miinspirait beaucoup. Or. miavait demandé un _ texte rythmé, en vue d'un disque éventuellement. Jai écrit en alexandrins, c’est venu tout seul! Oui, jai dautres histotres a raconter, mats il n’y a pas que le lore. Ilya d'autres médiums avec lesquels je travaille et qui sont également destinés aux enfants». Propos recueillis par Marie- Jeanne Robin. par Francois Lagarde PARTICIPaciion Biographie Christiane Duchesne est née a Montréal en 1949. Elle y a fait ses études. Mére de deux enfants, elle a toujours. travaillé a la pige: recherche, articles pour revues et journaux, scénarisation pour la télévision, documents audio- visuels. En 1980, elle a gagné le ler prix, catégorie 30 minutes, au concours d’oeuvres dramatiques radiophoniques de Radio- — Canada. Elle a publié ses premiers albums pour enfants en 1975; elle travaille actuellement du cété du cinéma: le scénario d’un court métrage pour enfants La terre est plate, Victor? Par ailleurs, elle traduit et adapte beaucoup de contes pour -une maison d’édition torontoise. ~/ F L’automobiliste, le cycliste et le piéton | iS) ion en croit le chauffeur de taxi moyen, le pire ennemi de |’auto- mobiliste, c’est le cycliste. Et si oninterroge le cycliste moyen, on entend de nombreuses plaintes au sujet des piétons qui empruntent les pistes cyclables au lieu de marcher sur les trottoirs, qui les traversent sans regarder, ou qui restent plantés sur la chaussée, en bas du trottoir, a _admirer le paysage. Quant au piéton, il pointera rapide- ment du doigt les automobilistes trop pressés et les cyclistes qui circulent d’autant plus dangereusement qu'il n’est pas facile de les entendre venir. Bref, on a l’impression que l'automobiliste déteste le cycliste, que le cycliste hait le piéton et que le piéton abhorre tout autant les deux premiers. Le plus étonnant, c'est qu'il s'agit bien souvent de la méme personne : la plupart des automobilistes sont aussi propriétaires d'une bicyclette; la plupart des cyclistes sont au moins des marcheurs occasionnels; et la: plupart des pietons d’age adulte possédent sans doute a la fois un per- mis de conduire et un vélo. Vous ne pourrez donc pas accuser PARTICIPaction de discrimination si nous vous invitons aujourd’hui a étudier et améliorer votre comporte- ment comme automobiliste, comme cycliste et comme piéton. Cela pourra vous aider a vous réconcilier les uns avec les autres...et avec vous-méme Si vous étes les trois 4 tour de réle. Vous étes automobiliste ? Vous connaissez (ou devriez connaitre) les lois de la circulation. Et vous les respectez probablement. Permettez- nous quand méme de vous demander de faire preuve de prudence et de courtoisie lorsque vous rencontrez des plus fragiles que vous sur la voie publique — que ce soit le cycliste que vous pourriez frdler de moins prés, ou le coureur sur une petite route étroite, ou encore le piéton qui traverse la rue et qui ne vous a pas entendu approcher. Vous vous considérez plutot comme un cycliste ? En bien, nous avons des petites nouvelles pour vous. Au] Québec, cette année, les deux roues 4 pédales sont désormais considéreées— comme des véhicules. La conséquence de cette consécra- — tion, c'est que les vélos sont doréna- a ; ia vant susceptibles, comme les autres — véhicules, de mériter des contraven- tions. Donc, les cyclistes pourront: devoir payer de leur poche pour leurs — infractions au code de la route. Quelles infractions ? Montrez-moi un cycliste qui n’a jamais roulé a con- tresens dans une rue, ou circulé sur un trottoir, ou brilé un feu rouge — et je vous montrerai un cycliste qui a tou- jours laissé son vélo dans un placard. Quant aux piétons, ils ne sont pas — encore considérés comme des véhicules. Mais cela ne veut pas dire quiils peuvent traverser la rue dés que le feu passe au rouge. Le nouveau code de la route du Québec prévoit en effet des infractions pouvent attein- dre trente dollars pour les piétons aventureux. Mais les piétons, comme les cyclistes, ont une meilleure raison en- core pour respecter ces réglements : ils sont fragiles, et se faire heurter par une voiture, méme a basse vitesse, est une expérience éminemment douloureuse lorsqu’on s’en tire, et ex- trémement attristante pour sa famille lorsqu’on ne s’en tire pas. On pourrait réécrire le précepte évangélique qui veut qu'on traite les autres comme on voudrait qu’ils nous traitent, et résumer ainsi nos conseils... Si vous étes automobiliste, roulez comme les cyclistes aimeraient que vous rouliez. Si vous étes cycliste, con- duisez comme les piétons aimeraient que vous conduisiez. Si vous étes. piéton, conduisez-vous comme les automobilistes aimeraient que vous vous conduisiez. Et si vous étes les trois, efforcez- vous de vous satisfaire...tous les trois. Educateur physique, Francois Lagarde est directeur des communi- cations de PARTICIPaction.