Dans la chaleur torride d'un dimanche aprés-midi, au milieu des vic- tuailles, dans l'odeur des poissons et du laurier grillés, tous se ga- vent de nourriture, de vins, et les conversations sont joyeuses et amicales. Entre leurs collines séches et la mer, ces paysans et pé- cheurs ont la vie dure, mais ils se contentent de peu et savent ap- précier les fruits de leur travail : «C'est de Ior, disait l'oncle. Ceux qui disent que nous sommes pauvres n'ont jamais mangé un bout de pain baigné de I'huile de chez nous. C'est comme de cro- quer dans les collines d'ici. Ga sent la pierre et le soleil. Elle scin- tille. Elle est belle, 6paisse, onctueuse. L'huile d'olive, c'est le sang de notre terre.»(153). Le village n’a jamais connu époque plus paisible. Les hommes pas- sent les soirées aux terrasses des cafés, a déguster une liqueur en jouant aux cartes. La dureté des traits de leurs visages revét alors une douceur qui est celle du bonheur de vivre. Les années passent. Aprés la Seconde Guerre mondiale, |'endroit commence a devenir un lieu trés prisé des visiteurs a cause de la mer et du soleil. Des constructions d'accueil s'élévent. On est loin du Montepuccio de Luciano Malcalzone de 1870, ni de celui de Rocco, son fils. C'est devenu une petite ville prospere grace au tou- risme. Mais si les enfants peuvent maintenant aller a l"Université de Milan, ils reviennent quand méme au village car ils savent que ce n'est que dans ce lieu qu'ils garderont leur identité et la solidarité qui fait la force de ces gens-la. Ecrit en phrases simples, dans un style qui réussit a bien rendre vivante l'atmosphére de sud de I'Italie, Le soleil des Scortaa obtenu le prix Goncourt 2004. Paul Genuist Laurent Gaudé, Le soleil des Scorta, Paris, Actes Sud, 2004. Osez écrire ! Envoyez-nous vos textes : lemoustique@shaw.ca 13