@® ¢ © @ @ @ © @ @ @ Toujours est-il qu’a l’a€ge de sept ans, j’avais déja pris une grande décision. Mystérieux cet appel de mon coeur. C’était clair, je passerais ma vie dans une école, a rechercher l’am- biance de ce lieu de vie, je deviendrais enseignante et je vi- vrais année aprés année, lorsque l’automne s’annoncerait, le grand énervement de « la rentrée ». Ce serait si bon d’étre celle qui dicterait la ligne de conduite. Enfin, pour tout dire, la veille du premier jour de classe d’une toute nouvelle année scolaire, je ne dormais pas beaucoup. Surexcitée, je repassais dans mon coeur tout le plaisir que j’au- rais a choisir ma tenue du premier jour, a humer lair frais de septembre, a rencontrer ma nouvelle maitresse, a revoir les autres écoliers vieillis d’un coup pendant l’été, a raconter mes anecdotes glanées au fil des jours chaud et a sauter a la corde dans la cour de la récréation, en faisant attention, bien enten- du, de ne pas abimer mes nouvelles chaussures, et en enton- nant : Qu’est-ce que j'aime? C’est de la créme Qu’est-ce que j’hais, c’est de la bouillie... J’aurais peut-étre la liberté de me choisir un pupitre a cété de celui de Cécile? Je jubilais a la pensée de recevoir ces nou- veaux livres qui nous attendaient dans les étagéres fermées par des portes vitrées, rangés tout prés des livres a tranche dorée et a reliure rouge. Surtout, j’étais impatiente de copier la liste des effets scolaires. Aurait-on le droit cette année d’avoir de l’encre turquoise pour notre plume fontaine? Ah! La réso- nance en moi du moment ot l’enseignante écrivait au tableau : un crayon HB, une gomme a effacer Pink Pearl, cing cahiers Hillroy, des crayons de cire Crayola, un aiguisoir, une plume Scheaffer et de l’encre noire... Tous ces objets représentaient pour moi un nouveau départ, une occasion de faire encore mieux que l'année précédente et je me sentais soudainement préte a étudier assidiment, a atteindre de nouveaux sommets comme un alpiniste, j’imagine, qui gravit une montagne. Aujourd’hui, j'ai une boite dans laquelle dorment quel- ques débris d’enfance et des images saintes, ayant allure d’antiquités avec leur papier jauni, mais qui me tiennent lieu de 22