Le Moustique D’abord, qu’est-ce que le génie génétique ? Lidée en est relativement simple et, comme a Phabitude, c’est son appli- cation qui est d’une grande complexité. Nous savons a présent tous que I’édification de toute espéce vivante recourt a un plan transmis, de maniére plus ou moins conforme, au cours de la reproduction de prédécesseurs. Les genes sont la retranscription chimique des informations et instructions qui constituent ce plan. Toute erreur dans cette retranscription, dont les causes sont multiples et parfaitement aléatoires, est appelée mutation. Ces derniéres peuvent étre néfastes et géner considérablement les chances de survie du nouveau-né par apparition de “ défauts de fabrication " irréparables. Ils peuvent étre neutres et disparaitre dans le fatras dinformations inutiles que les génes ont accumulés sans danger au cours des ages. Ou encore, 6étre positifs et alors transformer le nouvel étre en un instrument plus efficace sur le plan de la survie. ll est important de noter, dés a présent, combien cette notion de bonne ou mauvaise mutation est relative. Elle est, en fait, fonction d'une infinité de facteurs qui n’a d’égal que linfinie complexité de la vie. Page 12 Etre transgénique ou ne pas étre ? Volume 3 - 12‘ édition Pour illustrer ceci par un exemple grossier, il suffirait d'un nouveau déluge pour faire de toutes les mutations particulierement favorables a la conquéte du continent des mutations singuligrement négatives. Seuls parmi les animaux survivraient ceux qui auraient conservé — leurs branchies et fonctions annexes. Je veux dire que, dans_ notre environnement non minéral, n’est "bon" que ce qui est favorable ou, au moins, non défavorable a la vie. Dans ce niveau de "complexification" supérieur qui caractérise |’étre humain, toujours animal, mais un tantinet plus élaboré, surtout sur le plan de la conscience, cette sensibilité a la relativité du progres est plus aigué encore. C’est qu’avec le niveau de conscience des humains, il faut ajouter a l’efficacité de survie des notions de morale et de qualité de vie. Notions elles-mémes extrémement relatives. Au début de ce troisiéme millénaire, les cartes de notre jeu sont donc les suivantes: la connaissance de l’existence d’un code génétique essentiel a ’élaboration des étres vivants et, bientét, sa description totale et compléte ; une morale qui s'est édifigée extrémement lentement au cours des millénaires grace a Vexpérience, c'‘est-a-dire la somme considérable d’essais et d’erreurs accumulés au cours de_ cette période ; une connaissance et une technologie, le génie génétique, qui, encore balbutiant, est du moins a méme de nous faire imaginer qu'il Décembre 2000 sera un jour possible de transformer ce code. Les régles du jeu : améliorer les chances de survie ; améliorer les conditions de vie ; respecter ’éthique. Les difficultés du jeu : on pense avoir une bonne idée de ce qu’est la vie et en quoi consistent les chances de survie (la médecine a fait de tels progrés réecemment !) ; ’amélioration des conditions de vie est un concept mieux percu que compris et qui apparait terriblement relatif (ce qui est une amélioration des conditions de vie pour moi ne lest pas nécessairement pour vous) nourriture diluée.; les lois d’une éthique biogénétique (lois régissant la procréation d’étres humains par des 6étres humains) et biogénique (lois régissant la manipulation génétique) sont quasi inexistantes. Il s’agit donc d’un jeu particuliérement difficile au point que la prestigieuse Association américaine pour l’avancement des sciences et qui compte 146 000 chercheurs dans ses rangs a dit non a la manipulation génétique sur les humains. Ces experts croient que nos sociétés ne sont pas encore capables de jouer a ce jeu «de maniére équitable, juste et respectueuse de la dignité humaine». Intéressant ! Pourtant, apres de nombreuses difficultés, le génie génétique pratiqué sur les humains commengait de remporter ses premiers succes. ——_>