es A3 - Le Soleil, novembre 1993 Unhabillementd’hiver Que de neige pour ces nouveaux venus! Ils n’en croient pas leurs yeux. Que la forét est donc belle sous sa parure blan- che! Mais qu’il fait froid et que 'hiver est long! Adieu les sa- bots de bois quis’enfoncentdans la neige, adieu les mains dans les poches poursetenirles doigts au chaud! Maintenant, ilfauts’ar- mer contre le froid. Alors, on se dote de tout un arsenal de véte- ments des plus impressionnants. D’abord, tout comme les Amérindiens pour éviter de se geler les pieds, nos ancétres adoptentles fameux mocassins. Puis, ils se fabriquent des man- teaux de fourrures ou de gros- ses toiles foulées qu’ils appel- lent «capot», «coupe-vent», «parka», «mackinaw», OU en- core «canadienne». Pourse pro- téger latéte et surtoutles oreilles, ils portent des tuques en laine et des toques en fourrure. Afin de couper l'air froid sur leurs visa- ges, leshommes s’emmitouflent de cache-nez qu’ils appellent «crémones» alors que les fem- mes choisissent divers foulards et chales connus sous le nom populaire de. «nuages». Inutile de dire que les grosses mitaines font partie de cet arsenal d’hiver. Moines etdemoiselles Comment nos ancétres se chauffaient Lorsque les premiers colons frangais arrivent en Nouvelle-France au XVile siécle, ils sont loin de se douter qu’ils vont devoir affronter, quelques mois, plus tard des températures telles que celles que l’on connait au Canada. Originaires de Normandie, de Champagne, de Bretagne ou de Vendée, ces nouveaux venus ont bien sar apporté leurs plus chauds vétements. Certes, les mois de décembre et janvier dans le nord et dans l’ouest de Ila France pouvaient étre rigoureux, et certains se souviennent encore des ger¢ures qu’ils attrappaient au bout des doigts lorsqu’ils allaient quérir du bois ou tirer|’eau du puits. Il leur fallait alors mettre de gros bas de laine, remplir leur sabots de paille et s’encapuchonner de lainages pour mieux résister au froid. Mais tout cela n’avait rien de comparable avec ce qu’ils allaient endurer pendant leurs premiers hivers en Amérique du Nord. Delacheminée au poéle Dés leur arrivée, les colons s'em- pressent de construire dans leurs nouveaux logis les mémes grandes cheminées de pierre qu’ils ont.con- nues enFrance. Mais bien vite, ils se rendent compte que méme instal- iées au centre dela maison, celles-ci n’arrivent pas a chauffer toute la piéce. Ils réalisent que pour avoir chaud sur tout le corps, il faut cons- tamment virevolter devant I'atre, un peu comme un poulet a la broche, sinon on risque de se rétir le ventre pendant qu’on se géle les mollets: ll n'est donc pas étonnant que dans ces conditions, les Canadiens se mettent a imiter les Européens en adoptant les mémes poéles & bois que ceux qui sont deja utilises en Europe du Nord. Mais ils coitent tres cher. Aussi a partir de 1738, commence-t-on a fabriquer ces appareils de chauffage au pays, dans les célébres forges de Saint-Maurice. Ces jolis poéles, souvent richement décorés, sont le plus souvent installés au centre de la maison afin de permettre & la chaleur de rayonner. Pour récupérer au maximum cette chaleur, on S'arrange pour que, judicieusement, le tuyau traverse toute la piece et parfois méme aille se balader al’étage superieur avant de s’enfoncer dans un trou, tout spécialement aménagé pour sa sortie, dans la cheminee. Toutefois, la venue du poéle en Nouvelle-France Bois a vendre. Enhiver, lalivraison du boisse faisaitde La ‘ : porte a porte dans des traineauxtirés pardes chevaux. n’evite pas encore la corvee du bets; Pour cela, Amnesiiveriucies viless'e1 se kscriateaeds il faut attendre l’ére industrielle et introduction. ; per ios toes _ nantesse dénudentgraduellementet d’un nouveau combustible: le charbon. "gz. tapprovisionnementen combustible devientunsérieuxprobléme. podie de fer a deux ponts Malgré I'amélioration apportée par le poéle comme moyen de chauffage, certaines piéces de la maison demeuraient froides. C’était souvent le cas des chambres a coucher. II est aujourd’hui encore des anciens qui se souviennent du petit froid glacial qui se glissait entre les draps, et du moment si redouté ou il fallait se déshabiller dans une chambre froide. Pour remédier a ceci, nos ancétres ne manquaient pas d’imagination. Le moment venu de dormir, chacun partait se coucher en emportant avec lui une espeéce de bouteille, généralement en étain, remplie d’eau chaude que I’on appelait aussi demoiselle et que l'on plagait entre les draps pour se chauffer les pieds. Mais il y avait encore mieux. On pouvait passer dans le lit un appareil appelé moine, sorte de cage faite de bois dans laquelle on enfermait un récipient contenant de la braise. Au moment de se coucher, on retirait l'appareil et l'on pouvait alors, 6 délices, se glisser dans un: lit tout chaud. Lorsqu’il n'y avait pas assez - de «demoiselles» ou de «moines» pour chauf- fer tous les lits, il arrivait que l'on fasse tiédir des fers a4 repasser ou des briques que l'on : — enveloppait dans de vieux morceaux de tis- sus. pour les rempla- cer. De la méme fa- gon, on se servait de cailloux pour se ré- chauffer les mains. C’est ainsi qu’avec imagination et: pa- tience, nos ancétres combattaient rigueurs de ’hiver. a -% + m2 = - 3 ‘ 8 * : yy Vv : SRY ‘ 4: S Coupeurde bois 4 Montréalen 1851. Jusqu'a l'avenementdu charboncommecombustible, les villes auxXIXesiécle étaient chauffées au bois etun homme pouvaittrés bien gagnersa vie en coupant des biches pour les fours et les foyers. Chauffage al’indienne Dans leurs nouvelles mai- sons de bois, les habitants de la Nouvelle-France n’arrivent pas a se réechauffer. Sans cesse, ils se plaignent du froid. Ainsi, en 1633, un religieux, le pére Paul le Jeune, écrit, «// m’est arrivé qu’en écri- vant fort prés d’un grand feu, mon, encre gelait» et plus loin d’ajouter «j'ai souvent trouvé de gros glagons attachés le matin a ma couverture, formés du souf- fle de I’haleine; et m’oubliant de les 6ter le matin, je les retrouvais le soir.» Pourtant, les Amérindiens ne se plaignent pas du froid. Mais il faut savoir qu’ils vivent différemment des Frangais. Dans leurs «longues maisons», les lroquois sédentaires ont méme plusieurs feux dont la fumée s'échappe par un trou prati- qué dans le toit. Ils ne suffoquent pas pour autant, la téte dans la fumée. Aussi souples que les bétes de leurs foréts, ils ont I’habitude de vivre dans leurs cabanes assis ou couchés et de se déplacer en mar- chant accroupis. De cette facon, ils viventconstamment au-dessous de la fumée. — les 2135 - 11871 Horseshoe Way Richmond, B.C., V7A 5H5 1-800-665-8002 demoiselle