PT Granville Sud-ouest par Roger Dufrane nt nae tt ttt tt ah at a tt Nc io eee i bruissent d’une plainte con- tinue. Voici l’automne, avant-coureur des mois d’hiver. Ici et 14, quelques pommes rougies, des mar- rons aux bogues épineuses, tombent avec un bruit mat. La frafcheur du vent invite aux longues marches. Partant de Kitsilano et mon- tant McDonald Street jusqu’ a la quarante-neuviéme ave- nue, nous pousserons une pointe jusqu’au quartier de South-West Marine. D’une magnificence discréte, tapi derriére ses grands arbres, il rivalise avec le district de Shaughnessy. Pour 1’ atteindre, nous éviterons les artéres fréquentées, Dunbar ou Arbutus, od le traffic impitoyable interdit toute réverie. Nous empruntons d’étroites rues, pittoresques malgré leur rectitude, soudain inter- rompues par un escalier 4 claire-voie et reprenant plus haut leur. petit bonhomme de chemin. Les maisons, aux fenétres pareilles 4 des regards, se font coquettes a notre passage, et leurs jardins, tantdt rouges, tant6t jaunes ou verts ou diaprés,; se vétent et se dévétent com- me pour une masquarade. Et voila que soudain les ar- bres courrent en frémissant vers des lontains de brume ot ils dansent la danse mor- dorée de 1’Automne. Qu’elle est agréable la pro- menade de South-West Ma- rine! Hangars aux tons é- teints, vastes comme des maisons de campagne et cos- tumés de lierre; sentiers a- | poo - a Jour gris. Les feuilles grestes montant 4 l’assaut des talus; portails ouverts sur l’allée courbe des do- maines. N’était 1’éternel ronron des autos, on réve- rait aventures d’amour et jolies recluses. Voici une demeure A la svelte chemi- née, aux toits en forte pen- te comme celle que devait habiter Jane Eyre; eten voila | une autre, mignonne sous son chapeau de chaume fausse- ment rustique. . A voir le bon goat déployé dans l’agencement des fa- gades et des parterres, on se demande d’oi vient que les propriétaires de ces vil- las cossues, qui brassent a longueur de journée au quin- ziéme étage des buildings chiffres et rapports, ne se desséchent pas et ne donnent pas dans le mauvais godt. Car ces demeures s’ils ne les entretiennent pas eux- HTS Sea) mémes, il les ont choisies belles. A cela il faut ré- pondre que tout étre humain porte en lui plusieurs per- sonnages. Tel résident de South-West Marine, cultivé, le coeur sur la main, bon pére et bon mari, arbore dans sa vie professionnelle | un visage de granit et un coeur de marbre. Et si chaque personne ren- ferme en soi un monde de contradictions, nous admet- trons que chaque ville en re- fléte un plus multiple encore. Vancouver tend des miroirs différents aux différents vi- sages qui s’y penchent. Le facteur des postes ne voit pas la méme ville que l’ad- ministrateur de sociétés. Et le vieux rentier assis sur un banc de Maple-Grove Park, froncerait les sourcils s’il voyait les cabrioles de sa puritaine ville natale dans la | et parc, y est assez riche et ‘du passé pour enrichir 1’a- téte de linotte des jeunes et jolies passantes. A mes yeux, Vancouver est une ville adolescente. Ne s’y lévent Pas, au détour des rues, mille souvenirs historiques. Ni chateau 4 visiter, ni cha- pelle ot péleriner! en re- vanche, lanature, mer, mon- tagne et forét, plaine, colline diverse pour nous permettre d’y ratisser des trésors d’i- mages. Paysages inépuisables! Plus on s’y proméne et plus on aime s’y replonger. Un moineau qui s’envole, deux enfants qui jouent, une pas- sante en mini-jupe vers qui on se retourne, images pré- cieuses qui se cueillent ici et 14 au bord des rues; et qui s’ajoutent aux moissons venir. Isabelle par Jacques Baillaut Neige et frimas...au jardin d’Isabelle la gelée blanche a remplacé la rosée délicate. Au parc, les feuilles écar- lates des arbres sont ba- layées par l’employé muni- cipal. Le balai de bouleau pousse au long du caniveau vieux papiers et gouttes d’or tombées des branches. Les amoureux du dimanche n’ont plus de buissons ot se cacher. Les allées sont désertes et vides les plages. Au poulailler, les poules en hochant la téte....caquettent. C’en est fait de 1’été, il fait froid- maintenant, les petits sont partis se faire rotir ailleurs. La vie est plus chére chaque jour, on ne trouve plus de vermis- seaux. Le vieux coq est tout dé- plumé - ¢a ne me donne guére envie de pondre. -Ah! vous avez bien raison ma chére. _ J’ai d’ailleurs de- puis hier réduit ma produc- tion 4 un oeuf par semaine. Et caqueti...et caqueta, les poules sur leur perchoir ba- vardent en attendant que le fermier leur jette lapoignée de grains qui leur fermera le bec. Dans les franques, la pre- miére glace craque sous le pas des gens du matin qui gardent les mains dans leurs poches. La porte de l’hiver est entre- ouverte. Centennaire leger ne denier Lutham. Affilié au Playhouse est le groupe Holiday qui joue dans les @coles de C-B. Ils ont actuellement trois specta- cles; ‘The Dancing Donkey’ pour les jeunes éléves, ‘Be- ware the Quickly Who’ pour les intermédiares, et ‘Where Are You When We Need You Simon Fraser‘’ pour les écoles secondaires. Cette derniére piéce, genre de pilule compressée, ra- conte tout l’histoire de la Colombie-britannique en une heure. Elle est écrite et mise en scéne par Christo- pher Newton, un Calgarien de talent qui joue en ce moment le rOdle de Fedot, et ‘pas Fedeau dans ‘The Chemmy Circle’ ou pour l’appeler par son nom d’origine ‘La Main Passe’. Les cing acteurs du groupe Holiday montrent beaucoup de versatilité dans cette’ revue-collage. Ils chantent, ils miment, etils jouent avec un minimum d’accessoires théatraux. Brian Brown avec sa guitare est d’abord un explorateur espagnol qui céde facilement le terrain 4 un Capitaine Vancouver trés snob. Un autre pastiche amusant est le mariage sym- bolique entre 1’fle de Van- couver, représentée par une épouse Anglaise, et la pro- vince de la Colombie Britan- nique, représentée par un rude pionier Canadien. L’importance a’un chemin de fer reliant l’ouest a l’est est montré ironiquement comme premier mobile des Colombiens qui acceptent la confédération. ‘Cariboo Kate’, chanté par Jane Woods, nous montre l’apogée de Barkerville et sa ruée vers Ifor. La piéce se termine avec l’arivée des premiers voya- geurs en train. C’est un voyage aussi bien dans le temps que par 1’ espace, car aprés les aven- tures des plaines, la révolte Riel, les fléches des Indiens (que nous voyons en geste) et les delais financiers, le dernier crampon est mis. Mais Vancouver brole! Elle renaftra comme un phénix de ses cendres. Cet apercu désinvolte de I’histoire canadienne plaft beaucoup aux étudiants, mais il est possible que quelques professeurs traditionna- listes la trouvent irrévéren- cieuse. La musique entrainante a été composée par Allan Rae et Jack Simon a crée un décor evocateur avec presque rien. Vill, LE SOLEIL, 5 NOVEMBRE 197]