4— Le Soleil de Colombie, vendredi 28 octobre 1983 Société Historique Franco-Colombienne 9, Broadway Est, Vancouver, C.B. VST 1V4 Caisse populaire Saint-Sacrement par Alexandre Spagnolo AVANT-PROPOS — La Société Historique Franco- Colombienne qui se dédie a fouiller le passé des événements qui se sont déroulés au fil des ans dans le cadre de la présence francaise-canadienne en notre province, se doit de se pencher sur l’histoire de la défunte Caisse Populaire Saint-Sacrement; cela peut paraitre paradoxal, mais on ne peut oublier ce que fut oeuvre, les difficultés surmontées par ses valeureux promoteurs: ils méritent, en dépit du recul, qu’on leur rende un vibrant et qu'on les fasse connaitre, ne fut-ce qu’en tant qu’exemple pour la postérité; en méme temps, il s'agit d'une page de notre histoire. UN PREAMBULE: I] s'impo- se afin de faire connaitre Yorigine des Caisses Populai- res (en anglais, Credit Unions) , des organismes dont _ les activités s'imbriquent avec le systéme dit du coopératis- me, un mariage catholique, d'une théorie qui voit dans la coopération, la solution du probléme social et économi- que. La coopération se prévaut du fait qu'elle représente une méthode d’action économique par laquelle des personnes ayant des intéréts communs constituent une entreprise ou les droits de chaque membre sont intégrés dans la gestion de l’organisme: ils sont égaux, mais les profits éventuels sont répartis au prorata de leur apport. LE SYSTEME COOPERA- TIF: il tire ses origines de l'Allemagne, lorsque la Révo- lution Industrielle balaya YEurope de la _— fin du XVIIle siécle au commence- ment du XIXe, provoquant une effrayante secousse dans le monde des petits travail- leurs, des artisans, des fer- miers, des industries modes- tes, dites de famille, etc. Avec pareille situation, il n’était plus possible de faire face aux problémes financiers qui surgissaient. Les grandes institutions bancaires, disons plutét le capital, se dirigea vers les réalisations énormes des grandes industries nais- santes au détriment des faibles ou moyennes. UN PALLIATIF: II fut trou- vé par une timide expérience tentée par la Rochdale Society R. W. RAIFFEISEN ot Equitable Pioneers, établie en 1844, a Rochdale (Angle- terre), d’ou elle a tiré son nom, qui a vu le jour sous la forme d’une coopérative de consommation. : Les vrais apétres du coopé- ratisme furent les deux Alle- mands: Freidrich Raiffeisen et Franz Herman Schulze Delitzsch. Le principe fut doréna- vant connu sous le nom de “Principe Raiffeisen” qui fit un bon bout de chemin avec un succés total pour faire face au gigantisme industriel nais- sant et aux institutions ban- caires désintéressées vis-a-vis du petit monde des travail- leurs. Pour cela, il s’agissait de mettre en contact les pré- teurs et les emprunteurs d’ar- gent, en les englobant dans un méme organisme dont le but principal n’est pas le lucre a tout prix, mais de lui donner un caractére humanitaire que les grandes institutions finan- ciéres en sont dépourvues. UN CHEMINEMENT: Si le mouvement coopératif débuta vers 1864, suivant le “Prin- cipe Raiffeisen”, il se déve- loppa par une longue voie de l'Allemagne a l’Autriche, la Suisse, la France et:]’Angle- terre. ON cite qu’actuellement plus de 100 millions de mem- bres sont organisés dans plus de 70 pays, suivant ledit prin- cipe ou avec de légéres modi- fications en rapport avec les besoins spécifiques 4 chaque pays concerné. Puis, ce fut le bond outre- Atlantique, pour accrocher en premier lieu le Québec; Wilhem Un recul historique A. DESJARDINS - cétait en 1900, l’apdtre, le journaliste ALPHONE _ DESJARDINS, avec son insti- tution coopérative a Lévis. ALPHONSE DESJARDINS: Qui était-ilP Né a. Lévis (Bas-Canada) en 1854, fils de Francois et de Marie-Clarisse Miville-Deschéne. II travailla aux périodiques de l’Echo, de Lévis, puis au Canadien. Il publia, de 1879 a 1890, les débats de la Législature du Québec, puis devint le repor- ter officiel de ces débats a la. Chambre des Communes, de la période allant de 1892 a 1917, trois ‘ans avant son décés. Au cours de sa carriére, Alphonse Desjardins s’apercut que, selon le recensement de 1900, au Canada, presque 80% de la population, a l’époque estimée a 5 500 000 ames, étaient classés “résidents ruraux” et “mini- commercants”: les banques ne prétaient pas grande at- tention a ces gens-la, qui, pourtant avaient de grands besoins de fonds. Pour com- ble, leurs propriétés n’avaient aucune valeur pour consti- tuer une garantie par rapport a des éventuels avances de fonds. C’était effarant, si pas cruel. La seule solution a cette déplorable carence d’institu- tions plus ou moins humai- nes, consistait 4 se mettre sous la férule des usuriers. Alphonse Desjardins, jour- naliste, signalait et déplorait~ une telle situation anormale et inhumaine dans un immense pays en voie de développe- ment. UNE DECISION AUDA- CIEUSE: Desjardins, avec acharnement, adopta Je “Principe Raiffeisen” en y ap- portant certaines théories du “Principe Rochdale Society”, s'appuyant: encore sur des théories de correspondants étrangers, dont l’économiste francais Charles Gide (1847- 1932), l’Italien Luigi Luzzat- ti, ’Anglais Henry Wolff. Alphonse Desjardins décida de fonder des organismes de type coopératif, qu'il appela Caisses Populaires sur des bases propres aux besoins du Québec, en particulier, et du Canada, en général. Il leur donna des caractéristiques dé- mocratiques: un individu, un vote — l'idée du profit mesuré — une base territoriale, la paroisse — les risques limités — les préts d’honneur — les divers comités, pour les cré- dits, la surveillance des préts, la direction. F. W. Schulze-Delitzsch LE RAYONNEMENT DESJARDINS: Trente années aprés l’expérience et la bril- lante réussite des Caisses Po- pulaires Desjardins, prit corps chez les communautés anglo- phones, l’équivalent dénom- mé Credit-Union, patronné par le philanthrope de Boston, Edward A. Filene. Suivant l’ouvrage du Pro- fesseur John Robert Colombo, un ex-Universitaire de To- ronto, intitulé “Canadian Re- ferences” il reléve un ““Mouve- ment Antigonish” avec une influence internationale qui émana d’un programme ex- tensif 4 l'Université Saint- Francois Xavier, d’Antigonish (Nouvelle Ecosse) .. Cette uni- versité | romaine-catholique qui, au début, était destinée a la préparation des candidats a la prétrise, devint ensuite un grand centre éducatif et la premiére Ecole des Ingénieurs de la Nouvelle-Ecosse. Ledit programme débuta par le Pére James J. Tomp- kins (1870-1955) par un groupe d’action de six semai- nes de cours, en 1921. Huit années ‘plus tard, en 1929, a la suite des efforts du Pére Moses Michael Coady (1882-1959) et d’autres colla- borateurs, il aida les fermiers et pécheurs des Provinces Maritimes a former des coopé- ratives et des Credit-Unions. Le Coady International Ins- titute, qui ouvrit ses portes en 1960, entraina des étudiants de pays étrangers, spéciale- ment ceux des pays du Tiers- Monde, afin de leur donner la notion d’étre des “leaders” sociaux afin que femmes et hommes. puissent étre mai- tres de leur propre destinée. CREDIT-UNION ANGLAIS Le premier Credit-Union _anglais prit naissance tout naturellement 4 Antigonish (Nouvelle-Ecosse), -pépiniére d’économistes, par les soins Tél. 879-3911 d'un autre Américain, Roy F. Bergengren, mais toutefois le principal organisateur fut le susnommé Moses M. Coady, prétre et professeur a ]’Univer- _ sité St. Francois Xavier (Anti- gonish) . Le Pére M. M. Coady, a son tour, modifia les principes Raiffeisen et méme ceux d’A. Desjardins, suivant les impé- ratifs de sa province. Si cette digression histori- que est tant développée ici, c'est que poussé par le désir de mettre en relief le fait cana- dien-frangais dans le domaine du systéme coopératif dans lest canadien, c’est également par l’audacieuse action du - Québecois Alphonse Desjar- dins,. que son systéme se déve- ‘loppa dans une certaine mesu- re au nord des Etats-Unis, et ce a partir de 1900. I] faut ajouter que l’idée des coopératives dont les Caisses Populaires, suivant Desjar- dins, devait se développer en une base a l’ombre du clocher d'une paroisse, afin de consti- — tuer un embryon communau- taire homogéne avec une pers- pective d’un large rayonne-. ment. Vingt années durant, Alphonse Desjardins, l’ap6tre, s’attacha 4 son sacerdoce pour le bien des économiquement . faibles de la Caisse Popu- laire de sa ville natale de Lévis (Québec) , fondée-en 1900. A sutvre: Le glissement du systéme coopératif vers la Colombie britannique. (epi a La publication de cette page a été possible grace a une subvention du Secrétarzat d@Etat. Le bulletin trimestriel de la S.H.F.C. est sous presse. _ Trouvez-lui unnom. N’oubliez pas: la prochaine réunion mensuelle de la SHFC aura lieu le lundi 7 novembre a 19h30 dans les locaux de la Société.