12 recevoir des Indiens chez moi cette aprés-midi, je vous déposerai a Hagwelget et vous pourrez revenir 4 pied, en vous promenant; ce nest pas loin. Nous avons accepté avec enthousiasme et nous sommes partis. Au départ d’Hazelton, nous filons derriére le village pour gagner une colline. Sur le versant de celle-ci, nous traversons un cimetiére indien, qui présente un aspect singulier. Chaque tombe est surmontée dune sorte de baldaquin en bois ouvragé, se terminant par une petite toiture en planches, faite de deux plans inclinés se réunissant sur la ligne de faite. L’auto de l’agent indien marche assez bien; mais notre aimable conducteur a sans doute perdu le sens des distances, car nous courons depuis longtemps et nous n’arrivons pas. Ce n'est pas loin, avait-il dit! Il s’arréte tout 4 coup. Mais nous ne sommes pas a destination. II s'arréte parce qu’une automobile nous barre la route. Elle est campée au travers de notre voie, seule, abandonnée, misérable assemblage de vieille ferraille, hors de service. Son propriétaire, découragé, devant une panne irréparable, l’a simplement laissée sur place. Elle obstrue Yentrée d’un grand pont métallique qui, de ce point, aboutit au village des Déné-Babines. L’agent indien nous révéle alors que ce pont est impraticable aux voitures; quant aux piétons, ils sont invités, avant de s’engager sur son tablier ajouré, 4 recommander leur ame a Dieu, s’ils sont sujets au vertige....Ce pont enjambe un profond ravin, au fond duquel gronde un torrent dont les eaux apparaissent d’un vert éclatant et vif, ...L’eau court encaissée entre d’immenses falaises, dont les flancs abrupts, sauvages, sont dominés par des sapins et quelques pauvres maisons en bois. Au pied de ces falaises, je découvre des échafaudages en bois de sapin qui s’avancent, plates-formes 4 claire- voie au-dessus de l’eau. Ce sont des postes de pécheurs de saumons. Nous avons traversé le pont sans accident. Cette prouesse nous donne quelque contentement intime, et nous pénétrons dans le village qui nous apparait pauvre et peu soigné, malgré ses larges rues. Les maisons en bois sont d’un aspect misérable et dispensent un relent de poisson en décomposition assez peu engageant. En dehors de la rue principale, une petite chapelle en bois dresse son clocher. Elle est desservie par un missionnaire, qui, hélas, est absent. Notre ami, l’agent indien, M. Hyde, nous méne vers une boutique sur la fagade de laquelle fleurissent quelques enseignes. Connaissant les aitres, il n’entre pas par la porte, mais nous conduit sans hésitation dans la cour, située derriére la boutique. II nous dit méme, tant il est HAZELTON a nh eee renseigné, que les propriétaires se nomment M. et Mme Donald Gray, Indiens Hwotsotennes.. . . Notre guide ouvre une porte et nous le suivons dans une salle ou l'on prépare les saumons. Des centaines de piéces pendent, accrochées au plafond. D’autres, en quantité, séchent a terre, 4 méme sur le sol. On a enlevé le “CAVIAR” et on I’a mis a part; on a détaché également les tétes, qui, en hiver, seront la nourriture des chiens... . L’agent indien, avec une éloquence presque persuasive, explique lobjet de notre venue. II déclare que nous sommes des artists peintres, M. Pepper et moi, et qu’il y a lieu de convoquer tel et tel, qui seront des modéles de choix et des types caractéristiques. Sur ce beau discours qui a l’air de laisser Mme Gray assez indifférente, il nous serre les mains et nous quitte, appelé ailleurs par ses devoirs officiels. Avec beaucoup de ditficultés j’ai pu photographier un vieillard, M. Pepper entreprend des croquis d’enfants. Quant 4 moi, je crois de bonne politique de commencer par une visite a la boutique. ...Je découvre, parmi diverses marchandises, des objets indiens, notamment des gants brodés. Je fais quelques achats et aussitét je ne suis plus regardé tout 4 fait comme un vulgaire étranger.. . . En fouillant, je trouve un singulier instrument dont lusage m’est inconnu. C’est une sorte de spatule engainée dans une enveloppe de fer blanc provenant d’une boite de conserves. —Qu’est-ce ceci? dis-je 4 mon héte. Au printemps, quant tout se met a pousser, l’homme a besoin de se rafraichir; lui aussi, il doit nettoyer son estomac. Pour ce faire, il prend ces instruments, se rend dans la forét, et va droit a un “JACKPINE.” La, avec l’outil pointu, il incise l’écorce de l’arbre et