Riel commence son journal de prison par ces mots «L'inspiration divine ma fait écrire ce livre » (67). Puis c'est I'Essence Divine, ou la Puissance Divine, ou I'Esprit de Dieu qui parle par sa bouche. Les répétitions de «O, mon Dieu» mettent en relief, la encore, aspect incantatoire du texte. Il demande a Dieu de montrer a tous que lui, Riel, est « 'Envoyé » (84). Sans cesse il demande a Dieu de {éclairer, de lui accorder raison, conscience et miséricorde, et ses réflexions ont la forme d'oraisons et de priéres. Divers articles dans cet ouvrage reprennent histoire tragique des Métis au cours des Ages et montrent aussi que, pour eux, Louis Riel reste un grand héros, un visionnaire qui envisageait l'union de tous les Métis du Canada, a l'Ouest comme a l'Est, et méme celle de toute I'Amérique du Nord comme du Sud, ce qui inspire les dirigeants actuels des mouvements métis. Ce livre est tout a fait hagiographique par la teneur des articles. Mais la lecture de ces trois journaux de Louis Riel nous le montre sous l'aspect d’un illuminé. Sur le Parti conservateur, il croit que certains membres « pensent tout haut que je suis envoyé de Dieu » (111). lla aussi d'autres vues plutot déconcertantes. Ainsi, décréte-t-il, « Le Seigneur veut que le nom paien de Atlantique soit mis de cété; et qu'il soit remplacé par celui de Saiil-Paul. Si les nations et les navigateurs veulent adopter ce nom glorieux, 'océan sera moins orageux, dit le Seigneur. Les tempétes y cau- seront moins de naufrages » (146). Pour I'océan Pacifique, il choi- sit le nom de « Simon-Pierre ». Il veut aussi que les noms des as- tres qui « ont presque tous été souillés par lidolatrie » (147) por- tent des noms plus chrétiens. Ainsi, le soleil s'appellerait Jean, la planéte Vénus, Maria, Mars deviendrait Julia, quant & la Grande Ourse, ce serait Fabien-Barnabé, du nom d'un ecclésiastique ami de Louis Riel. On apprend aussi que I'ile de Vancouver serait la Nouvelle Belgique(153). Dans les années 1870, on sait que I'Italie fit son unité et les états du Vatican se trouvérent substantiellement réduits. Tres ultramontain comme les tétes pensantes du Canada francais d'alors, Riel souhaite que le pape vienne séjourner au Québec, a défaut, que Mgr Bourget, l'évéque de Montréal, de- vienne pape. 11