ett TRL TO TENN RIN TON AN EO NN tf per pe re eee eT a - tt -_ - se cat tt ek te [ — ee a ee ae eee ee TR Tag | q ] a ee 4 - Le Soleil de Colombie, vendredt 29 mat 1987 Un nomade aux mille facettes Né en France, il meurt salué comme un grand Canadien. Fils de fermier, il sera successivement ouvrier, débardeur, marin, acrobate, légionnaire, cuisinier, placier, mineur, soldat, employé, homme d'affaires, patron de presse __ et juge de la Citoyenneté. C'est peu de dire qu'André Piolat était un homme aux mille facettes. «Le Soleil» vous retrace la vie de ce grand nomade qui n'est devenu sédentaire qu'4 Vancouver, @ 43 ans! Par Charles-Henri Buffet ' 29 octobre 1912: Naissance d’André Piolat a Paris. Ses premiéres années sont placées sous le signe de la Premiére guerre, alors que son pére est au front et que sa mére travaille dans une usine d’armements. 1920: La famille Piolat émigre au Canada. Clément Piolat, le pére d’André, travaille dans une ferme 4 Wolseley, Saskatchewan. André Piolat ira a l’école jusqu’a la huitiéme année. Mais c’est son pére qui le conseille pour ses lectures et lui apprend l’histoire francaise et canadienne-: francaise. 1928: A Vieillardville, Clément Piolat acquiert un homestead de 160 acres, pour dix dollars... Mais André n’y passera que peu de temps. Dés 1929, a l’age de dix-sept ans, il quitte la ferme familiale. Pendant prés de vingt-cing ans, sa vie sera celle d'un infatigable voyageur. 1929: Il est ouvrier dans une scierie 4 Vancouver. 1930: Il travaille dans une ferme a Lotbiniére. A Halifax, il devient débardeur, puis se fait -engager 3 la chauffeur un navire -~qui le conduira jusqu’en Europe. A Marseille, dans le Sud de la France, il fait de l’acrobatie sur la place publique, et sera méme figurant a l’opéra. 1931-1933: André Piolat s’en- gage dans la Légion étrangére. Il parcourt le bled algérien, puis devient interpréte 4 Paris, dans l'infanterie coloniale. 1934: Il s'‘installe 4 Liverpool, en Angleterre, ow il passera deux ans, comime cuisinier dans un grand hétel puis comme placier d’assurances. 1936: Sousle nom d’Hitchcock, André Piolat s’engage sur un navire a destination de New York. Hl reste deux ans dans la grande métropole, travaillant pour un oncle qui dirige une entreprise de produits de beauté. 1938: Retour en Saskatchewan. A Vieillardville, André Piolat’ loue une ferme et s’essaie a l’agriculture. Mais aprés deux années de récoltes catastrophi- ques, c’est l’abandon. 1940: Pour 65 cents de l’heure, il travaille dans une mine d’or 4 Malartic, en Abitibi. Il y reste deux ans, mais dés 1940 il s'est engagé comme volontaire dans les signalisations puis dans un régiment d’artillerie qu’il suivra a Prince Rupert, et Terrace en 1942, puis en Nouvelle-Ecosse en 1943 ot il est nommeé instructeur des nouvelles recrues. En 1944, il participe a la préparation du débarquement puis, avec le 19@me régiment de 1’Artillerie royale canadienne, il se bat en Belgique, en Hollande et en Allemagne jusqu’en 1945. 1945-1955: Penant les dix années d’aprés-guerre, le grand voyageur continue de décliner sa vie sur le mode nomade. Il travaille dans la ferme paternelle a. Vieillardville, puis comme cuisinier dans un campement de biacherons prés de Kitimat, au Nord-Ouest de la Colombie- Britannique. 1955: C’est parce qu'il a choisi de devenir sédentaire, de mettre fin a sa “vie au grand air” qu’André Piolat vient s’installer a Vancouver. Dans une agence immobiliére, il découvre le travail de bureau, auquel il va rapidement se. familiariser: dés. 1957, il fonde son propre cabinet d’huissier, le General Credit Bureau. En méme temps que ses affaires fleurissent (son cabinet emploie jusqu’a une douzaine de personnes) , André Piolat décou- vre Maillardville et la commu- nauté franco-colombienne. I. mettra notamment son expérien- ce des affaires au service de la Caisse populaire St-Sacrement, dont il sera vice-président puis président. 4 26 avril 1968: André Piolat fonde Le Soleil de Vancouver (qui deviendra, en 1974, Le Soleil de Colombie). Les débuts: du journal sont difficiles, l’équilibre financier, déja précai-. re, est sérieusement menacé quand un incendie ravage le siége de la société d’André Piolat et le local du Soleil. Alors, comme il le fera a plusieurs reprises dans les années suivantes, André Piolat y va de sa poche pour renflouer le journal. Les dangers ne sont pas seulement physiques: a plusieurs reprises, André Piolat devra défendre son enfant contre des tentatives de prises de contrdle, venant notamment de la Fédération des Franco- colombiens. L/histoire du Soleil est mouve- mentée, sa survie est presque un miracle... Pas étonnant qu’An- dré Piolat ait vu dans la création: “du Soleil de Colombie son oeuvre la plus importante. Sa grande fierté était qu’aprés dix-neuf ans d’existence son journal soit suffisamment bien établi pour pouvoir lui survivre. Mais le Soleil n’était pas tout. André Piolat, devenu pionnier de la cause francophone, se démenait sur tous les fronts. Pour encourager l'étude du francais chez les Anglophones, il créait la Fondation Le Soleil, qui distri- bue chaque année des bourses aux meilleurs étudiants de francais de la province. II avait également créé, parallélement au journal, une librairie qui existe Pour, i colstnmmiantéitcamconbaneiiestte Andes Piolat etait a! pére. Aujourd’hui les Franco-colombiens sont un peu orphelins. toujours aujourd’hui. Son engagement dépassait les limites de la province. Il fut un des membres fondateurs de l’Association de la _ presse francophone hors-Québec (’APFhQ), dont il sera vice- président en 1979-80. Ce fut Les obséques du Juge André Piolat ont été célébrées par le Curé Godard le 26 mai 1987 en l’église de la paroisse St-Sacrement. Durant son homélie le Curé Godard a raconté que deux jours avant sa mort André Piolat lui avait dit: “Demandez donc au Seigneur qu'il vienne me chercher”. également lui qui, en homme d’affaires avisé, préconisa la création au sein de l’association d’une agence de représentation commerciale, l’?OPSCOM. Personnalité entiére, André Piolat avait des idées tranchées et n’/hésitait pas a faire front a ses adversaires. Le paradoxe, c’est que ce libre-penseur soit aujour- d’hui reconnu par tous, qu’il fasse lunanimité dans la communauté franco-colombienne. (Voir por- trait dans le Soleil du 27 février 1987). Dans les derniéres années de sa vie, les honneurs s’ajoutaient aux honneurs. Le 30 mars 1984, il devenait juge de la Citoyenneté - il n’acceptait, a cette occasion, de préter serment qu’a condition qu'il puisse le faire en frangais. En 1987, ’APFhQ créait un prix André Piolat, qui sera remis chaque année a un _ journal francophone de I’association. Le 11 mars 1987, enfin, il recevait des mains de René Delille, consul général de France, ’ la médaille de l’Ordre national du mérite. C’était la derniére apparition publique d’André Piolat. On le sentait trés affaibli physiquement et la souffrance se lisait sur ses traits. Mais son esprit était toujours aussi vif. Jusqu’a son dernier moment, André Piolat a gardé une lucidité qui ne faisait que rendre plus pénible la souffrance qu'il endurait. I] attendait la mort comme une délivrance.