228 Le Soleil de Colombie, vendredi 28 mai 1982 tt ct Lettres arts et spectacles , | SSS sss Le pouvoir de Lise Payette “Le Canada imaginaire” Un immigrant appor- te enfin sa voix dans le débat ‘actuel sur le Canada. Arrivé & Van- couver en 1954, il nous dit comment il a vécu son insertion progres- sive dans un Canada qui devint son pays. Internationalement connu pour ses travaux en écologie de la communication, An- thony Wilden écrit ic’ un pamphlet appuyé sur une_ indignation morale qui fait du bien et une intelligence critique étonnante. E- crit par un Canadien de |’ouest, ce livre est pas {'aciulaloen (Neat pas |’équivalent. dans son théo- rique, new paradoxes et sa mai- trise de l'histoire du Canada. Bref, un livre qui ne laisse pas indifférent. Au coeur. de ses propos, une question revient sans cesse qui fait |’axe _du volume: Qu’est-ce qu’un Canadien? Y a-t- il une nation cana- dienne? C’est pour ré- pondre a cette ques- tion qu’Anthony Wil- den relira I’histoire du Canada, critiquera la dans ses Constitution, analysera la mainmise des Etats- Unis sur notre écono- mie et développera la notion d’Imaginaire. Marcel Rioux dans sa préface entame im- médiatement un débat avec Wilden sur la pertinence de ses pro- pos dans le contexte québécois. L’auteur est né a Londres en 1935. Il a émigré en Colombie Britannique en . 1953, pour étre naturalisé canadien en 1959. Parmi ses publica- tions on retiendra The ~ Language of the Self: The Function of Speech and Language in Psy- choanalysis (1968; avec Jacques Lacan) et Sys- tem and Structure: in Communicsa- tion and Exchan (1972). Epistémologie & la mesure de notre temps, son oeuvre em-. brasse de facon am- bitieuse les rapports théoriques européens (marxisme, structura- lisme, lacanisme...) a la lumiére de la théorie de la communication et des systémes. (Serge Fleury, éditeur, 144 pages). ‘gouvernement. de LA BLAGUE BE LA SEMAINE Un vieillard amé- ricain a roulé sa bosse un peu partout. Un seul trait de _ son caractére est resté le méme: il a toujours été méfiant et n’a toujours cru que ce qu'il voyait de ses apergoit par la vitre un troupeau de mou- tons et s écrie: — Oh, tonton, des moutons _complete- ment rasés! Le vieillard jette un coup d’oeil et con- céde: propres yeux. Un Jour, dans un train, l'un de ses neveux Un auteur — En effet. Rasés de-ce cété-ci au moins! par semaine Gabrielle Roy Roy, Gabrielle(Mme Marcel Carbotte) (1909- ) Roman- ciére, née a Saint-Boniface (Manitoba). Aprés ses étu- des a l’Académie Saint-Jo- seph, elle devient institutri- ce, de 1929 a 1937, tout en ~ participant au Cercle Molié- re. Aprés un séjour de deux ans en Europe(1937-1939) en France et en Angleterre ot elle étudie l’art dramatique, elle s’installe au Québec et collabore & de nombreux journaux et revues: Le Bulle- tin des Agriculteurs, Le Jour, MacLean’s Magazine, Nouvelle Revue Canadienne, Revue de Paris, la Revue Moderne, Nouvelle Revue cepirtaete nea deeeietc oe reportages, ses \ . ses premiers récits. Gabriel- le Roy connaft la gloire dés son premier roman: Bonheur pauvre de la ville de Mon- tréal, l’ouvrage est un roman réaliste. La critique se plaft a souligner l'exactitude dela description et l’équilibre de la composition dans |’ensem- ble du vaste récit. La romanciére fait valoir des dons d’observation et d’ima- gination qui se complétent a merveille dans la structura- tion des personnages et dans le déroulement de la trame romanesque. “A chaque pa- ge, écrivent Roger Duhamel et Pierre de Grandpré(His- toire de la littérature francai- se du Québec, t.4), c’est une observation d'une vérité criante, l’analyse habile d’un sentiment quasi-inexprima- ble, ce sont quelques lignes qui nous font éprouver toute la poésie insoupgonnée qui habite les -humbles: plus exactement toute la poésie authentique, de la plus belle qualité, qui jaillit de la plume, toujours réservée, de Gabrielle Roy”. Bonheur d’occasion sera suivi d’autres romans et recueils de récits ot se retrouveront les dons. essentiels de I'écriture et de la fidélité au vrai. Aprés La petite poule d'eau, située dans le nord manitobain, Alexandre Chenevert(1954) est l'histoire touchante d’un humble caissier de Montréal. Rue Deschambault(1955) et, plus tard, La Route d’Alta- mont(1966) sont T’histoire d'une enfance et d’une jeu- nesse, proches de celles de Best-seller de l'année Paul-Frangois Syivestre Tout au long des années 1970, et méme avant, des milliers de téléspectateurs ont appris 4 connaitre Lise Payette. Du petit écran, elle’ est ensuite passde a |’aréne politique. Pour la majorité des gens, l’animatrice d’Ap- pelez-moi Lise ou la ministre d’Etat a la condition fémi- nine incarne |'entiére confiance en soi. Rien ne semble leffrayer. Erreur Lise Payette reste une fem- me timide, une femme qui a soif de défis et qui cherche a relever ceux qui sont les plus isqués, les plus effrayants. oila, entre autres révé- lations, ce que nous apprend son ue livre-témoi- age intit é ne Pouvoir? mnais pas aque page est remplie d’émotion et a travers chaque chapitre le lecteur découvre le difficile vécu féminin dans un monde impitoyablement masculin et macho. Le titre demeure, a cet égard, assez significatif. Lise Payette a au pouvoir parce qu’elle faisait partie du René Lévesque, du 15 novembre 1976 au 26 avril 1981, mais elle n’a pas véritablement connu le Pouvoir. Elle racon- te comment elle s’est sentie étrangére, comment il lui a fallu traduire sa pensée en langage d’homme afin d’étre comprise, comment elle a di défendre ses dossiers avec un acharnement supérieur a celui exigé de ses collégues masculins. Elle a réussi, certes, et la seule loi sur assurance automobile en témoigne. Lise Payette con- tinue néanmoins a affirmer que la politique est encore une affaire d’hommes au Québec. ~ En dépit du mal qu’elle a eu a cheminer dans le laby- rinthe du Pouvoir, l’ex-minis- tre s'est souvent imposée aupres de ses collégues, au iE A tet ma Ca le yam) Vauteyr od se joue le destin d'une vocation d’écrivain. La Montagne secréte(1961) et La Riviére sans repos(1970) sont en fait de grandes paraboles ot la dimension allégorique et mythique tend a l’emporter sur le réalisme, cependant Cet été qui-chan- tait)” voudrait n’étre que poésie des étres et des choses. Gabrielle Roy est l'un des plus authentiques écrivains du Canada Fran- cais. On a su reconnaftre ses mérites d’artiste; pour Bon- heure d’Occasion elle a recu le prix Fémina(1947); elle est aussi la premiére femme du pays & étre admise a la Société royale du Canada (1947). Par la suite, son oeuvre est réguli¢rement. saluée par les distinctions: médaille de l’Académie cana- dienne-frangaise(1946), Prix du . Gouverneur-général (1947) Médaille Lorne Pierce. (1948). Prix du Gouverneur général 4 nouveau en 1956, pour la Petite Poule d’eau et, en 1957, pour Rue Descham- bault & quoi s'ajoute le Prix Duvernay, accordé a !’auteur en 1956, pour l'ensemble de son oeuvre. Cette reconnais- ‘sance confirme les qualités exceptionnelles de l’oeuvre de Gabrielle Roy. “De méme que Balzac est francais, Di- ckens anglais, Gabrielle Roy, elle, est canadienne. Son roman appartient au Canada risque de subir la foudre d’un Jacques Parizeau.. mais aus- si de recevoir, par aprés, les excuses du ministre des Finances. Car si Lise Payette conteste les chiffres d’un collégue, c’est qu'elle connait le dossier sur le bout de ses doigts. Le Premier Ministre s'en est d’ailleurs rendu compte et n’a pas hésité a lui confier d'importantes res- ponsabilités. Au sujet du Premier Mi- nistre, l’auteur nous raconte d'intéressantes anecdotes et nous peint un portrait un peu surprenant de son ex-patron. “René Lévesque n’écoute pas quand on lui parle”, écrit- elle. “On ne fait pas de la politique avec René Léves- que, on fait de la eelltique pour René Lévesque”, préci- se Mme Payette. Elle ajoute que le Premier Ministre “n’encourage pas, ne félicite pas, ne se livre pee ment jamais”. Si elle garde de son ancien patron le souvenir d’un grand défen- seur. de la Démocratie, I’au- teur fait aussi remarquer que René Lévesque est un chef déroutant. “Il faut avoir en méme temps la vocation et la foi” pour le suivre. Lisez Le Pouvoir? Connais ‘ pas! Vous ne le regretterez | point. Vous apprendrez bien | des choses sur lesrouagesde | _ la politique et, mieux encore, | vous découvrirez a quel point le Pouvoir s’humanise bien peu entre les mains des hommes. Il est temps que les femmes prennent le pouvoir pour le transformer. Il s'est déja vendu plus de 25,000 exemplaires de ce livre. Au cours du Salon du livre, de Québec, les copies disparaissaient a raison de 500 par jour. C'est fort ‘heureux pour l’auteur, les éditions Québec-Amérique. et les lecteurs. Ces derniers sont bien servis par les deux premiers. t qu'il décrit les lieux ot il: s'installe. Le pittoresque de langue; mais il entre dans le domaine psychologique par. son message bien écrit qui passe au-dessus des modes ou des pirouettes intellec- tuelles du moment”. Moni- que Genuist souligne ainsi la pérennité de l’univers roma- nesque de Gabrielle Roy, de méme que l’ampleur d’un monde pergu a travers sa “douce émotion artistique”. Oeuvres Bonheur d’Occasion(roman) La Petite Poule d’eau(ro- man) Alexandre Chenevert(roman Rue Deschambault(roman) La Montagne secréte(roman) La Route d’Atalmont(roman) La Riviére sans repos(roman Cet été qui chantait(roman) Un jardin au bout du monde (nouvelles) Ces enfants de ma vie(roman Fragiles lumiéres de la terre ; Presque toutes les semai- nes, vous ferez connaissance avec un auteur du Québec, d’Acadie ou de France. Il va sans dire que les ouvrages de ces auteurs sont en vente dans les librairies francophones du Grand Van- couver et de la province. Ménage 4 trois, ou peut-6tre a quatre? Alanna Matthew On présente une piéce originale par Douglas Bankson a Kitsilano House Hall, Tiéme et Vine. Dirigée par Kico Gonzalez-Risso, “Felicity” est la 8iéme repré- sentation du groupe Kitsi- lano Theatre Company. La piece a été adaptée pendant les répétitions avec la parti- cipation du dramaturge, du metteur en scéne et des ac- teurs. Il s’agit de trois person- nages: la mére, le pére et la fille qui retournent sur une tle quelque part dans la Médi- terranée, ot l'enfant a été congue. Felicity a seize ans, l'age ot elle évolue et cher- che & comprendre la vie. Elle est romantique, enjoude et optimiste. Elle essaie de dissiper la tension qui existe entre ses parents par les jeux de déguisements et les réles différents. : La mére parle d’un qua- triéme personnage, un amant du temps jadis, un Eli Silvo. Peut-étre était-il le vrai pére de Felicity? Peut- étre il n’existe que dans Yimagination de Beth la mé- re? Son nom, Eli, est un anagramme du mot anglais “mensonge” ou “lie”. . PHOTO Bruce Law A tour de réle, pére, mére par les moeurs typiques | & fille s’entrechangent de place en jouant des jeux freudiens. Quelle est la réali- té? Quelle est l'illusion? Est- ce que la mémoire se trompe ou bien que la vérité est La patience est une qualité que l'on admi- re chez le conducteur 3 Pour votre lecture : francaise ou anglaise: Librairie -LE SOLEIL - @ romans policiers, espionnage, etc... _@ oeuvres classiques -@ bandes dessinées -. Ouvert du lundi au vendredi de 9h @ 17h Tél: 879-6924 _ 3213, Cambie, Vancouver _Nos prix défient toute concurrence §. LES PROFITS DE LA LIBRAIRIE VONT ALA FONDATION POUR ENCOURAGER L’ETUDE DU FRANCAIS différente pour chacun? Bankson explore les paren- tés familiales avec leurs puis- santes émotions, leurs res- ponsabilités et leurs ten- sions. La piéce, malgré quel- ques longueurs, parle a plu- sieurs niveaux et s'adresse & tout le monde. Les symboles sont drama- tiques: le jardin interdit a Felicity par sa mére (la sexualité), le cadran solaire _ot sont enterrées les cen- dres (peut-étre) de Silvo, et la rose rouge que le pére donne a sa fille. Sharon Graydon joue Feli- city avec une sensibilité: éveillée et Barbara McColl améne une coquetterie coria- ce a la mére. Stan Coutts a de bons mo- ments mais il est ‘ois inaudible dans le réle du. re. Le décor crée, avec une vraisemblance extraordinai- re, la cour d'une petite maison méridionale avec des murailles de briques chauf- fées par des siécles de soleil. Entre les actes, nos oreil- les sont ravies par la voix de Chantal Morin qui chante ses propres chansons, ou plutét des poémes musicaux qui tis- sent. un fond magique a la piéce. : C’est une surprise agrda- ble de trouver une si bonne expérience théatrale en de- hors des sentiers battus. Ne ratez pas le prochain specta- cle de la Kitsilano Theatre Company. qui nous suit mais que l'on déplore chez le conducteur qui nous précéde.