& — Le Soleil de Colombie, vendredi 29 avril 1983 Voyages ‘RRR ee ee I oer are EIN eee EN - Un promeneur en voyage XVI-_ - Le “‘Neetjejans’’ de Zierikzee Par Roger Dufrane [Suste] - Lundt 25, aprés-midi Ces détails techniques me fatiguent. Et, reparti, je respi- re plus librement, fenétre ouverte, au cété de mon conducteur qui fume en fi- xant la route grise. Nous fran- chissons un pont d’au moins dix kilométres et nous entrons dans la pittoresque petite ville de Zierikzee, petit port de I’fle de Schouven. Se sentir au bout du monde est une sensation étrange qu'on éprouve parfois dans les cités cétiéres. J'ai éprouvé une telle sensation 4 Dublin en nouveau cette mystérieuse nostalgie a Zierikzee, sur une petite ile de Zeelande. On n'est plus seul Sensation passagére de soli~ tude. Puis on ouvre ies yeux. On voit autour de soi ies gens qui passent. On nes: pius seul. Gens de ma génération, mes fréres, vous savez ce que je veux dire, vous gui savez comme moi gue ia vie n'est belle et supportabie qu’en société. Ensemble nous mar- chons dans la vie, ies géné- rations semboitant les unes dans les autres. Mais on ne se Aprés une course de cin- quante kilometres dans la gri-- saille, nous stoppons et un autocar touristique nous em- _cirque porte pour la visite des tra- . vaux d’aménagement des di- gues. On sait qu’en 1953 des inondations catastrophiques ont inondé la Zeelande. Prés de deux mille personnes ont péri corps et biens. Au lendemain du cata- clysme, qui n’était pas le premier dans l'histoire des Pays-Bas, le Gouvernement hollandais a décidé d’entre- prendre de gigantesques tra- vaux. Cirque apocalyptique Le Plan Delta consiste, entre autres, a fermer par des barrages plusieurs bras de mer. L’achévement des tra- vaux est prévu pour la fin de 1985. Tl aura fallu plus de ~ trente ans pour difier ‘cette titanesque défense contre les éléments. Les barrages se composent de 66 blocs de béton, m’ap- prend mon héte. “Regarde, ils pésent chacun 18500 tonnes et sont fabriqués sur place, dans ce lieu qui se nomme “Neet- jejans”, du nom d'un navire qui a couléici en 1611. “Notre auto ralentit dans une sorte de apocalyptique. Le chaos domme & ce site un caractére fantastique On pense a une cité futuriste of se dresseraienit des immeubles massifs et sans fenétres. “Et mon héte continue: “On at- tend que la marée souléve les blocs qui sont déposés sur de solides bateaux. A pied d’oeu- a été consoli par des tonnes de sable, de gravier, de grosses pierres et de goudron. Au-dessus se cimentera la chaussée qui devra dépasser de quatre mé- tres les digues de 1953.“ Zierikzee, avec ses maisons toutes de guingois, évoque les habitations en bois du Moyen Age. Je ne m’étonnerais pas que la pierre et la brique n'y masquent d’anciennes facades a encorbellement. La vieille cit€ s'agrémente d'une porte médiévale, d’un clocher bul- beux a la tour énorme et carrée, coupée de la nef, ainsi que d'un marché aux poissons percé d’arcades sous lesquel- les, paratt-il, les vieux papo- tent les soirs d’été. On trouve, sur la place, quelques beaux hétels de mat- tre de style Louis XVI et ler Empire, édifiés sous le Régime frangais. Dans un coin de la ville dort un carré d’eau ov les teinturiers du Moyen Age, trempaient leurs tissus. - Nous-nous.régalons_d’énor- mes crépes dans une salle confortable. On apercoit, a distance, le maitre queux en bonnet blanc, qui agite une poéle a frire gargantuesque, lance les crépes en l’air et les rattrape d’un poignet vigou- reux. Gotter savoureux ac- compagné d’un aromatique. café que l'on adoucit de sucre candi. A suivre >) D> |) () () () <> () 0