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Le Soleil de Colombie, vendredi 8 avril 1983

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“Les Chroniques”’ de la

Société Historique Franco-Colombienne

9, rue Broadway est, Vancouver, C.B. V5T 1V4

Téléphone[604]879-3911

Recherches: Loutse Merler
Rédaction: Catou Lévesque

&t Gabriel Louis Jaray, en
1924, Vancouver...

(...) “Au coeur méme de la
ville de Vancouver, tout un
quartier est une colonie asia-
tique. On rencontre des jau-
nes dans la rue; a l’hétel, ot
on les emploie beaucoup, ils
glissent discrétement dans les
couloirs silencieux, propres,
vétus de pantalons noirs et
d'une courte camisole blan-
che, le visage clos et inexpres-.
sif sous les cheveux lisses. Leur
quartier n’est pas le plus
riche. Leur maisons de bois ne
sont pas repeintes a neuf. Elles
paraissent modestes, parfois
délabrées, avec des inscrip-
tions dont les signes capri-
cieux contastent avec les let-
tres dures des réclames an-
glaises. ;

Un jour, il y eut émeute
contre les Asiatiques dans les.

rues de Vancouver. Alors,
“comme le fit autrefois la plébe**
*‘yomaine, sur le Mont Sacré,
Tes petits jaunes silencieux se
retirérent dans Jeur quartier
n’en plus sortir; et la vie
fut arrétée a Vancouver, car
toute l’alimentation était en-
tre leurs mains. I] fallut leur
demander de reprendre le
travail, pour que la ville ne
mourit pas de faim.

L’Anglo-Saxon aime:a étre
servi et c'est pour suppléer au
manque de serviteurs qu'il
emploie la machine. ‘Mais la
machine ne.peut pas toujours
remplacer l'homme; ces jeu-

_ nes civilisations qui n’aiment
pom besa cultiver, ni exer-

la médaille. (..

Le tourisme en C .B.

La menace de l’empire céleste... (Suite et fin)

cer les métiers modestes de
Yalimentation - apprennent
que l'on est parfois un peu
Tesclave de ceux qui nous
servent.

Le réle que jouent 4 Van-
couver ces jaunes, est considé-

rable, a la fois recherché et

redouté. On a besoin de cette
main-d’oeuvre; sans __ elle,
point de domestique, point de
garcon d'hétel; mais sa
concurrence est terrible; il vit
sans trop peu de choses; il est
inassimilable; il reste, comme
un corps étranger dans un
organisme; on n’a aucune
espérance de pouvoir jamais
l’absorber. Aussi, ne sachant
ni interdire, ni favoriser cette
émigration, on a pris le parti
de l’accueillir en la limitant:

aux Chinois, on fait payer 500
dollars d’entrée; a l'égard des

Japonais, on a décidé,: sur ©

représentations du gouverne-
‘ment de Tokio, de n’exiger

‘aucun versement d’eux, mais
on limite annuellement. Je
nombre de leurs émigrants,”
Nous devons retourner aux
commentaires - du. Baron
Hulot, écrits en 1886, pour
avoir un apercu du revers de
.) “Ici, comme
en Californie, les nouveaux
venus offrirent leurs services et
contribuérent pour une large
part, a la construction du
chemin de fer transcontinen-
tal et a la richesse de la
Tégion. ‘Au début, ils.p t
bles; puis ‘un cou-
rant.d’opinion, (...) se pro-
duisit (. -) La legislature fut
davis “qu'll ‘était ce

d'instituer une loi prohibant
l'immigration des Chinois”, et
les représentants de la pro-
vince soutinrent cette préten-
tion au Parlement fédéral.
Sur la proposition du premier
Ministre, une enquéte fut
ouverte (session de 1884). Le
21 février 1885, le gouver-
neur général recut deux rap-
ports trés remarquables: l'un
de M. Chapleau, membre du
cabinet et président de la
commission; l'autre de M.
Gray, juge a la cour supréme
de la Colombie. Ces deux
piéces officielles et les détails
de l’enquéte ont été réunis. Ils
forment le document le plus
impartial et le plus remar-
quable que nous ayons entre
les mains. —~

(...) On parle de l'envahis-
sement de la race jaune, de
l'absorption de la race blan-
che dans la race jaune... fi: )
La lecture attentive des
sitions recueillies au cours: de’
cette enquéte permet d’énu-
mérer les différents chefs d’ac-

» cusation dirigés contre les coo-

lies. (...) Ils peuvent se for-
muler de la sorte:

— Les Chinois n'ont pas de
besoins; ils se contentent d’un
salaire insignifiant et font aux
ouvriers blancs une concur-
rence désastreuse ;

— Ils retardent, par leur seule
présence, l'immigration de la
race blanche et la colonisa-

tion dupays;
— Ils.retournent ‘toujours en -

Chine et c'est encore en Chine
quills: emportent: leurs écono-

-mies; .

— Les Chinois vivent dans la
débauche;

— Ils habitent au fond de
réduits immondes, véritables
foyers d'infection ot germent
les €pidémies;

— Ils parviennent a se sous-
traire aux poursuites ; Eools
échappent a la justice du
pays:

(.-.) Les arguments qu’on
dirige aujourd'hui. contre la
concurrence des coolies ont
déja servi aux adversaires de
Volta, de Fulton et de Watt.
“C'est qu’au fond, observe M.
Gray, si l’on considére le dé-
veloppement de la (...) Co-
lombie, les Chinois y sont des

-machines vivantes, différant
des machines inanimées en ce
que, tout en travaillant et en
arrivant au méme. but que
celles-ci, ils consomment les
produits naturels et fabriqués
du pays,-contribuent 4 son

“even, . “développent . et aug-
mentent ‘ses ressources.” Au
surplus, beaucoup de gens
sensés pensent que l’immigra-
tion chinoise a eu pour consé-
quence, non: pas de faire
baisser le prix des salaires,
CG ) mais de rendre a la
main-d'oeuvre sa véritable va-
leur. (...)

Les adversaires de 1Sramni
gration chinoise accusent en-
core la race jaune de causer,
par sa présence, un ralen-
tissement dans, Ajmmigration
européenne et'un'retard dans
la colonisation du pays. (...)
on peut difficilement admet-
tre’ que” : présence des cé-

—

~ convenablement,

lestials sur quelques points de
la céte empéche les colons de
se porter vers les immenses
territoires qui s'’ouvrent a la
civilisation et attendent la
main-d’oeuvre.

Faut-il s'inquiéter du repro-
che qu’on adresse aux Chinois
de retourner en Chine et d’y
emporter leurs économies?
Nous ne le pensons pas. Tout
salaire étant la rémunération
d’un service, il est bien cer-
tain qu’en emportant leurs
€conomies, les immigrants
laissent l’ouvrage qu'ils ont
accompli. Ils ne doivent rien a
personne.

(...) Par contre, on peut
facilement démontrer que les
Chinois de la basse classe abu-
sent de l’opium et qu’ils vivent
dans la débauche. Pour étre
juste, il convient d’ajouter que
ces mémes hommes ne s’eni-
vrent jamais, et que, syamnais ils

ne jettent ‘le troublé‘dans les

familles, ni ne pervertissent les
enfants qui leur sont confiés.
Nous devons critiquer la mal-
propreté des Chinois, la mau-
vaise tenue de leurs logements
et signaler a la police locale les
sentines repoussantes oi s’en-
tassent ces misérables.

C’est un devoir pour les
administrés d’obéir aux lois et
réglements concernant les éta-
blissements dangereux, in-

commodes et insalubres; c'est.
également un deyoir- pour ~
T’administration de veiller a

l'exécution de ces prescrip-
tions. Pourquoi ne forcerait-
on pas la population jaune a
se soumettre aux exigences de
la civilisation? En contrai-
gnant le coolie a se loger
a se vétir
d'une maniére décente, a se
tenir proprement, on aug-
menterait peut-étre ses be-
soins. Ow serait le mal? Dé-
pensant davantage, il récla-
merait un ‘salaire mieux en
tapport avec son. nouveau

genre de vie; Partant, la
concurrence serait moins pé-
_ nible pour les*blancs.

‘du pays, ne se-soient pas aper- —

Les Célestials ne sont a |
charge de personne. Ils n
réclament ni soins pour les
malades, ni secours pour les —
indigents. Loin d’étre une
cause de dépenses, ils sont —
déja pour la province une ~
source féconde de revenus. Ils _
ont activé la construction du
Pacifique-Canadien, _facilité
la colonisation et commencé —
l'exploitation des mines de
houille. Ces résultats sont-ils si
mesquins? a

finan tai

A mesure que la Colombie —
se transformera, le Chinois
deviendra: cordonnier, fila-
teur, marchand, journalier,
manoeuvre, domestique.
Faut-il en conclure que la
contrée formera un annexe de ~
Empire du Milieu? Rien nele
fait supposer. Le Chinois ne
demeure pas dans le pays, ity =
passe. Jamais il ne s'y marie;
toujours il retourne en Chine. —
C'est en Asie que le app
lent sa famille, ses intéréts, et
ses souvenirs. Dans le pays ot
il immigre, les droits civils et
politiques lui sont refusés. En —
réalité, sa. concurrence est
réduite a la main-d’oeuvre.

Que louvrier n‘ait vu, dans —
la question chinoise, qu'une
question. de salaire, on le
comprend, Mais que des As- —
semblées, composées d'hom-

mes graves et.dévoués au. bien

‘gues qu’elles entamaient une
campagne. contre leurs pro
pres intéréts, la chose parait

plus dese Ge a

hantent I’esprit du penseur. :
Un jour, l’Empire du Milieu —
débordera sur ses cétés. Il fera
1a tache d’huile et sa popula- —
tion de 400 millions d’habi- —
tants, consciente de sa force,
sentira, peut-étre, le besoin de _
se répandre. Qu’adviendra- —
t-il a cette heure et quand
cette heure. sonnera-t-elle?, a

Saas > tay

Par Alexandre Spagnolo

La grande porte
d’entrée

On arrive a avancer que la
grande porte d’entrée devait
étre indiscutablement, la par-
tie la plus avancée de la
Sibérie, le Détroit de Béring
— @ sec ou sous l’eau — et la
partie la plus avancée de
lAlaska, dont l’énorme Asie
devait étre la plate-forme
véhiculant des individus de

» tout poil.

Théoriquement, cette porte
d'entrée ne pouvait étre du
cété de l’océan Atlantique et

- de ses rivages s€parés d’autres
continents par d’énormes dis-
tances, sujets 4 des tempé-

» tes.

Aprés tout, le Détroit de
Béring (80 kilométres) n'est
pas un obstacle majeur, d’au-
tant plus que les Iles Diomé-
des se trouvent au milieu,
refuge d’un nombre considé-
rable d’oiseaux, donc du gi-
bier et aussi un point de relai:
dans ces conditions favora-
bles, des canoés en peaux de
bétes suffisaient pour trans-
porter des chasseurs et leurs
familles d’Asie au. continent
Nord américain. L’Asié fut un’
continent ot l’homme se déve-
loppa, et, a partir diquel’ il
s'‘étendit dans le” monde
d’alors, durant des millénaires
et des millénaires.

Histoire de chiffres

Combien étaient-ils ces In-
diens? Combien sont-ils? Nous
arrivons a des chiffres ahu-

PAS Whe 2a!

rissants, incroyables, - en
consultant les ouvrages de D.
Jenners “The Indians of
Canada”, les deux volumes du
Washington Smithsonian Ins-
titute “Handbook of Ameri-
can Indians”.

D’abord, le nombre de
langages: il varie de 1000 a
2000 avec plusieurs genres de
culture, variant d’un groupe a
un autre.

La population, aux envi-

rons de l’année 1492, est citée ©

comme énorme, le chiffre le
plus bas aurait été, dans les
deux continents, de 9 millions
et le plus élevé de 112 mil-
lions... et on ajoute, le plus
raisonnable aux environs de
50 millions, c’est incroyable.
Plus prés de nous, facon de
s'exprimer, le chiffre serait
tombé a 25 millions, puis a
un définitif de 10 millions da

aux maladies, la plupart im- -

portées d’Europe, aux fami-
nes, aux guerres sauvages in-
ter-tribales, aux mouvements
telluriques.

Quelques années aprés
Christophe Colomb, le véni-
tien Cabot (1450-1498), de-
venu britannique, qui entre-
prit un voyage d’exploration
sous l’égide du roi Henri VII,
au sud de l’actuelle provin-
ce de Terre-Neuve, croyait,
comme Colomb, avoir atteint
Asie.

Il signala, a son retour en-

Europe, avoir vu des aborigé-
nes avec une peau ocre-rouge,
qu'il appela Indiens Rouges,
“Hommes Rouges ou Peaux-

Rouges. Cette appellation de-

meura; pourtant, ces hommes
ne sont pas des Indiens ni des
Peaux Rouges. Ce qu'il avait
vu réellement a son époque;,

ma sete ak Bs ee tigis eB

~ Ces Ameérindiens,

D’ou viennent-ils?

cétait la fameuse tribu des
Béothuk, d’ailleurs extermi-
née beaucoup plus tard, par
les Indiens Mic-Mac, alliés

aux Francais, et des pécheurs

blancs.

Travaux agricoles

En principe, l’indien est
chasseur et pécheur, pas agri-
culteur. Toutefois, certains
auteurs mentionnent. que’ des
travaux agricoles débutérent
dans les deux hémisphéres
7000 ans avant Jésus-Christ,
quelle précision... mais ceux
du Nouveau Monde, légére-
ment plus tét. Les espéces
étaient totalement différentes,
parce qu'il n’y avait pas de
contacts, d’échanges.

_ Pendant environ 5000 ans,

l’agriculture indienne demeu-_

ra stagnante avant de pouvoir

relativement nourrir; Ja popu- -

lation.

L’habitation. se développa
plus-convenablement chez les
Indiens progressivement jus-
qu’a l’arrivée des missionnai-
res.

A partir de 10 000 ans
avant notre ére, ces hommes
chassaient le mammouth, trés
répandu en Sibérie, qui pou-
vait bien passer en Alaska,
ainsi que les autres animaux
préhistoriques, par quels mo-
yens? Mystére.

On a accusé les Indiens
d’étre des prédateurs, méme
une société de prédateurs axée
sur la chasse et la péche a
outrance, sans trop chercher a
améliorer le rendement. ali-
mentaire plus varié, par le
moyen de I’agriculture.

=

Qui sont-ils’

Vers 8 000 ans avant Jésus-
Christ, le retrait définitif des
glaces, symptéme des grands
bouleversements climatiques,
provoqua de profondes trans-
formations au sein de la faune
et de la flore: les grands
mammiféres disparurent nous
laissant des fossiles, tandis que
les conditions écologiques de-
vinrent presque semblables a
celles que nous observons au-
jourd’hui.

Morphologie
des Indiens

La morphologie des Indiens
n’est pas du tout uniforme,
elle varie suivant l’origine et
des lieux d’origine: il y a de
nombreux types.

Les Indiens de la Colombie

britannique ont une large
téte, un visage proéminent,
comme la poitrine, le cou

puissant, les cheveux. flot-
tants,.de grosses moustaches,
le nez. busqué, mais toujours
de type Mongol.

Par contre; l’Esquimau, qui
somme toute a des racines

‘indiennes, a une téte plus
longue et plus étroite, un nez
assez fin, tenant aussi du
Mongol.

Au cours des derniers sieé-
cles, un grand mélange se
produisit avec des individus de
différentes régions. Ainsi, les
Indiens vus par Christophe
Colomb ne sont plus les
mémes, au point de vue mor-
phologique, aprés cing siécles.

1

PERTES DES INDIENS

Les tribus indiennes com-

STAR See ST

ces. - Esquimaux,

Type cdexChef Ts

& ree eee ee ger, wea Te

imshian

meficérent a perdre la pro-
priété de la terre (pratique-
ment tout le Canada, pour ne
mentionner que ce pays) ily a
850 années environ. Les hom-
mes blancs qui ont successi-
vement pris ou conquis cette
terre, semblent leur avoir
apporté, en contrepartie...
des avantages manifestes,
mais quoi? Au prix de leurs
conditions de vie, passable-
ment bouleversées: leur corps
n’était pas immunisé contre
les nouvelles maladies, la tu-
berculose, la vérole, les véné-

riennes, etc. Dans les grandes
lignes, leur nourriture tradi-
tionnelle a presque disparu,
au fur et a mesure que les
colonies de blancs se créaient
et l’agriculture se développait
au rythme européen. |

Le troc s'implantait: ar-
mes-munitions contre fourru-
res, etc. Les anciennes habi-
tudes ou méme coutumes se
perdaient graduellement et
leur fierté ancestrale s’estom-
pait.

A suture

ek