Notre pays jet nous Jpar Roger Dufrane Les jardins publics de Vancouver éparpillent aux quatre coins de laville leurs carrés de gazon. Les en- fants, avant la rentrée des classes, s’y sont dépensés a plaisir. Balangoires, jeux de ballon, piscines, rien ne manque sur ces terrains pour l’épanouissement phy- sique des gargons et filles. A deux pas de chez moi, Trafalgar Park étend son pelage jauni des coups de=} fouet d’un été bref. J’y pas- | sais récemment en compa- gnie d’un professeur de mes | amis. Il est né en Colombi e- Britannique et il enseigne la littérature anglaise dans un collége de Vancouver. Grace A ses voyages et a ses connaissances, il conci- lie ensonesprit l’expérience des deux mondes. Le temps était radieux. Nous obser- vions, dans les lointains du parc, des gamins, en chan- dail rouge ou bleu selon l’équipe, bras et jambes rembourrés d’une fagon plus pratique qu’esthétique, l’un d’eux tapant avec une batte sur une balle dure. : - Une si grande surface, } dans les pays d’Europe, se- rait aménagée autrement, remarquai-je- En bordure de la plaine de jeux, nous verrions des massifs et des | sentiers menant 4a une petite | place. Et le dimanche, les promeneurs, assis 4 des ta- bles rondes, y dégusteraient une limonade ou une biére en écoutant la fanfare. : - Je sais. Mais vous n’étes pas en Europe, me dit en riant mon interlocuteur. Au- tres pays, autres moeurs ! - Comment se fait-il, de- mandai-je, qu’&a part vous qui aimez la marche, et moi, nous ne croisions jamais de promeneurs? - Cela ne devrait pas vous ' géner. On ne rencontre per- - sonne Tant mieux ! La route | vous appartient ; et les sen- tiers déserts de Dunbar ou Shaughnessy devraient vous enchanter. D’ailleurs, vous changez sans le savoir. L’année passée, vous vous promeniez tous les jours ; ' maintenant toutes les se- Maines ; et bientOt ce sera fini. Vous roulerez en voi- ture comme tout le monde. - Non ! J’aimerai toujours la promenade. N’est-ce pas la meilleure maniére pour bi en voir ? - Sans doute. Et je plains comme vous ceux quil’igno- rent. Mais la voiture est utile non seulement pour aller plus loin, mais aussi pour dominer les paysages sur un autre plan. Nous, Canadiens nés, nous voyons grand, et nous nous arrétons peu au détail. Nous dévorons en voi- ture des milles et des milles. | On court ainsi un théatre in- fini dont on se saofle. Di- manche prochain, je vous emmeéne dans la montagne. Vous comprendrez. Le dimanche suivant, vers quatre heures aprés-midi, nous roulions tous deux vers Stanley-Park. Les voitures serpentaient, longeaient la lagune ponctuée de cygnes et de canards insouciants, et s’enfoncaient, carrousel 4 la boucle immense, sous les hauts cédres. Le paysage se déroulait comme un film. - On n’avait pas le temps de l’approfondir, mais ons’em- plissait les yeux de belles images. Nous franchfmes le 1 NTS eA ap NP. Bd RP kms A PRESARICOSIIS AW Na pws ‘e } se fg W \ WS asp ~ PO ea TE Bovis pont suspendu. ' cain de Manhattan aura l’es- ' prit carré. Et moi, comme A travers les poutrelles qui défilaient, jentrevis la flaque de l’eau bleue. Le bateau de Nanaimo voguait tout petit vers 1’?Ouest. Sur la rive Nord, des arbres échoués s’entas- saient comme un jeu de jon- chets. Je me dis alors que mon compagnon avait raison. La voiture est utile, 4 condi- tion de savoir la laisser 1a de temps en temps pour une promenade a pied. Plus haut dans la montagne, nous nous sommes arrétés. Mon ami, d’un geste large, m’a déployé le Canada. Que Vimmense Stanley-Park, sous sa toison bleuatre, me paraissait petit ! - Voila le pays qui m’a fa- ¢onné et vous fag onne a votre insu, me dit mon ami. La terre et sa parure modélent les gens. Un Italien élevé dans le décor de Florence sera un artiste. Un Améri- vous désormais, vivant dans un pays grandiose et neuf, nous voyons le monde autre- ment. Nous sommes rentrés sans}- nous hater. Et en roulant sous les grands arbres do- rés par le couchant, je me disais qu’il est vain de re- procher aux différents peu- ples leurs défauts ou leurs gots. Choisissons-nous le lieu de notre naissance D’ailleurs, n’est-ce pas lal diversité des sites, des vi- sages et des esprits, qui con- tribue a l’agréable et infinie variéte de notre univers “Lock Up Your Daughters” par Jennifer Lutham . ‘Pourtant, l’assistance van- ‘‘Enfermez bien vos fil- les, mais donnez-nous la clé !’’, ainsi chantent les roués Ramble et Sotmore, d’un air malicieux qui a en- chanté le public venu voir cette farce musicale au Me- tro. ? La piéce a dQ prolonger sa saison, tant elle avait de suc- cés. Et avec raison, puis- qu’il y avait beaucoup pour | plaire : de la musique agréa- bl e, des paroles spirituel-, les et une compagnie débor- dante de vitalite. Adaptée d’une oeuvre de Henry Fiel- ding, fortement censurée en 1736 par le gouvernement de Robert Walpole, la piéce |; avait encore soulevé les cla- , meurs 4 Boston en 1960 ! | couveroise ne semblait : guére offusquée par ce the- | me de libertinage insouciant, | mais plutdt ‘‘ravie’’. La direction et la mise en scéne, confiées respective- ment A la compétence de Michael Berry et Grace MacDonald, serejoignent pour créer un va-et-vient spontané mais discipline, une satire joyeuse du dix- huitiéme siécle. Les galants courent aprés les filles riantes, les mes- sieurs respectables croient ferme au mot imprimé, igno- 'nes’’, rent tout ce qui se passe autour d’eux, et la loi est _corrompue, gentiment bien 'Sfr. Le tyran-magistrat , | Squeezum est tellement ab- ' surde qu’on ne peut pas lui en vouloir. Interprété par ' Norman Slack, ce papa-ga- teau est inoffensif et malin comme une petite fille sous sa belle perruque blanche. Brimé par laredoutable 'Mme Squeezum, son époux cherche de petits plaisirs /auprés des femmes accu- 'sées. C’est avant un rendez-vous secret avec la belle Hilaret / que Squeezum atteint le com- ble de- sa drdlerie. Pavoi- sant dans un gilet doré, sous le pseudonyme de ‘‘Mr. Jo- il exulte d’avoir re- trouvé ses forces et tré- buche sur un tabouret. Hilaret, l’hérofne, est chantée et jouée avec finesse par Philippa Purchase, une Nouvelle Zélandaise. Trés belle sur scéne, en satin rose garni de dentelle, cette ac- trice brune connaft son mé- tier. - Parmi tant de choses admi- rables, citons encore Ram- ble, le trousseur de jupes incorrigible, joué par Bruce Smith ; la plantureuse Mme Squeezum jouée par Lorrai- ne Butler, excellente dans son solo ‘*‘When Does the Ravishing Begin ? PE ANS petit vieux, Faithful, joué par Ken Eadie, inoubliable { } avec sa téte tremblotante ; et son cornet acoustique, qui sait ott est 1l’héroine mais n’arrive pas 4 se fai- re entendre. ACTIVITES Secrétariat et centre culturel 301 rue Richmond Reunions du conseil general 1&f samedi du mois a 19 h 30 - VICTORIA Soirées recreatives yer samedi du mois a 21 h. | Seances de cinema 1002 rue Broad TEN-O-TWO Casse-croute | Michel et Marie Hubert, propriétaires 382-1638. VIII, LE SOLEIL, 22 OCTOBRE 1971