_ celui «des lions», i tt Le Soleil de Colombie, vendredi 5 février 1988 - 11 VOYAGES Par Jean-Claude Boyer M aarid (capitale de l’Espa- gne), le matin du 2 novembre 1984. En arrivant a la gare Atocha, je me dirige vers la «consigna automatica» pour y déposer mon sac a dos. Un tableau indique que les cases sont hors d’usage, et ce, me dit-on, depuis de récents attentats terroristes. Je me fais bientdt «accrochef» par un Samaritain en mal de pourboires qui me force, pratiquement, 4 le suivre jusqu’a une gargote ot! on a aménagé une consigne provisoire. Un jeune préposé marque mon sac d’un grand «I» a la craie, me donne un recu en échange d'un billet de 100 pesetas (0,90$) et parvient a me faire comprendre, d’un air enjoué, que la «consigna» restera ouverte jusqu’a 23 heures. Jentre ensuite dans un café au sol jonché de déchets de table. Je remarque un adolescent en train d’attaquer un morceau de je-ne-sais-quol appétissant. Quelques signes suffisent pour lui faire comprendre que j’aimerais commander la méme_ chose. Comme il s’appréte a écrire le nom du mets, le je-ne-sais-quoi (qu'il tient en main) tombe par terre. Je me confonds en excuses en fran¢ais (!) et lui demande, en lui montrant deux doigts, d’en commander deux autres . (un pour lui, un pour moi). Il a ~ compris, il refuse. J’insiste. I] finit par accepter, la rougeur au front. En retournant a la gare, aprés le repas, je rencontre le bon Samaritain qui poursuit, avec un autre touriste, sa besogne charitable. Et je reprends le train, cette fois pour Toledo, 67 km de Madrid. Le soleil est de plomb, les paysages arides. En entrant dans la magnifique gare de Toléde, jimagine un pareil batiment en sol canadien; ce serait 4 coup sir une attraction touristique. Je m’achemine maintenant vers la célébre cathédrale. Traversée d’un pont moyenageux au-dessus du Tage a la surface écumeuse. Puis me voila errant comme un chat dans des venelles pentues et tortueuses. Parvenu enfin au coeur de la cité, je m’asseois un instant sur un rebord de pierre, histoire de reprendre mon souffle en laissant mon imagination se transporter dans des _ temps lointains ot Romains, Wisigoths, Espagnols, Maures, Juifs ont fait de Toléde une des villes les plus prestigieuses d’Europe. La cathédrale gothique (XIIIe- XVe siécles), d’inspiration fran- Gaise: quelle merveille! Un agencement de _ styles fort complexe, une éblouissante orgie de formes et de _ couleurs! Comment en parler briévement, sans verser dans le genre «guide de voyage»? Qu’il suffise d’énu- mérer de maniére impression- niste. A l’extérieur: chevauche- ment de tours et de portails (dont abondamment sculpté), dynamisme des reliefs (la Vierge présentant une chasuble a saint Alphonse, la 2 derniére Céne), jaillissement de ~ colonnettes, pointes des pinacles, portes de bronze, ogives d’un cloitre... En pénétrant al’intérieur, je me _ joins discrétement a un groupe Récit d'un tour du monde Toledo: Ol guidé en anglais. J’ai du mal a ne pas regarder partout 4a la fois, conscient que je m’appréte a visiter en une ou deux heures ce qui pourrait prendre une journée entiére. Nef, transepts, choeur, chapelles, sacristie, salle capitu- laire, trésor, crypte, c’est a n’en plus finir. Et dire, par exemple, que l’extérieur de la grande chapelle est 4 lui seul une étape importante de la visite! Partout, une profusion de sculptures: énorme transparent (motif déco- ratif sculpté a jour) du plus pur des douze Apétres... Vétements sacerdotaux somptueux, reli- ques, bible du XIIle siécle... Et que dire de la salle capitulaire? Portail mudéjar (de _ style islamique), plafond en caisson, fresques, portraits, _ stalles... Quant au trésor, c’est, bien sir, un autre musée: croix, armes, reliefs en argent, crosses, ostensoir géant (décoré de pierres précieuses et de 260 statuet- tes!)... Dans une des petites chapelles, le guide, sérieux comme un pape, nous fait un bref Christ de <da Vegan» baroque, reliefs, niches et exposé sur la liturgie et l'art statues, armoiries et effigies, mozarabes. Un autre retable, de gisants et tombeaux de marbre. Superbes verriéres; rosaces de style gothique flamboyant a vous rendre extatique. Porte dite «de l’'Empereur» (sous les grandes orgues) ; monuments de rois et de reines... Nous arrétons maintenant devant ce que le guide appelle une «fricassée de marbre», un ensemble décoratif qui jure, certes, mais dont l’exécution a exigé une maitrise technique indéniable. Et ce sont d’autres statues, des fresques, des tableaux. Ici un croissant de lune, une coquille Saint-Jacques, la arabesques et feuillages dorés, tapisseries... Ce qui m’impressionne le plus: Yimmense retable sculpté, peint et doré derriére le maitre-autel de la grande chapelle. Annoncia- tion, Adoration des Mages, Christ en croix..., quel raffine- ment dans les détails! Dans le choeur, mal éclairé, j’admire des stalles sculptées a la perfection, des colonnettes en jaspe soute- . nant des arcades de reliefs... C’est un musée en soi. Comme d’ailleurs la grande sacristie: tableaux du Greco, de Goya, Bellini, Van Dyck... Représenta- tions du Déluge, de la Nativité, _de la Mise au tombeau; chacun lécole flamande cette fois. Décidément, ca _ suffit! Et pourtant, dés que je sors de la vaste cathédrale, j'ai l’agréable impression d’étre au coeur d’un musée a ciel ouvert, et me voila encore attiré par d’autres merveilles. Les principaux monuments étant rapprochés les uns des autres, je me retrouve bientét dans la synagogue «del Transito» (XIVe siécle), de style maures- que. Un guide raconte qu'une importante colonie juive a fondé, au Xe siécle, des écoles renommées, ajoutant plus de prestige au réle déja prédomi- nant de Toléde dans la vie religieuse et culturelle de la péninsule ibérique. Je me laisse éblouir: superbes décorations mudéjares, plafond lambrissé, arcades, arabesques, inscriptions en hébreux. Mais le temps presse... J’arrive 4 la maison dite du Greco (XIVe siécle) juste avant sa fermeture. Je dois malheureusement la visiter a la hate. Tableaux aux figures allongées caractéristiques. Une «Vue de Toléde» me frappe particuliérement: cette — ville n’aurait donc pas changé depuis 400 ans! Plusieurs tableaux du grand artiste _n’ont, parait-il, jamais quitté Toléde! De nouveau dans une ruelle, je saisis mon appareil-photo pour croquer sur le vif un ane blanc surchargé de babioles, de poteries; le vendeur grisonnant en costume traditionnel, cha- peau noir et pompon rouge, suit la béte d’un pas pesant. Ma propre démarche se fait moins légére. J’entreprends tout de méme une longue promenade au hasard. Toléde m’apparait main- tenant comme une _ véritable anarchie d’époques et de styles, un mélange fort pittoresque de batiments médiévaux, d’églises, de synagogues, de mosquées, une sorte de symbole de coexistence pacifique. L’histoire nous montre que l’harmonie et la tolérance religieuses se sont détériorées au point que I’Inquisition y a allumé ses bichers dés 1485. Il est pourtant fascinant de constater que les vestiges des civilisations chrétiennes, musulmanes_ et juives continuent encore, pour ainsi dire, 4 se compléter. L’ombre de la nuit descend peu a peu dans les petites rues fébriles. Des illuminations don- nent bientét a la vieille cité un aspect tout différent, rendant aux détails architecturaux une valeur accrue. Je m/attarde devant des étalages de souvenirs- bibelots («made in Japan»), fausses antiquités, cartes posta- ‘les, qui défigurent l’impression médiévale. Une des _ cartes présente un grand crucifix dont le Christ a le bras droit détaché, raide, pendant; a ses pieds un buste de la Vierge sur lequel on a fixé un glaive en métal. Je furéte a ma guise. Certains fonds de cour Approvisionnements et Services Canada sont eux-mémes artistiquement décorés. Brin de causette en anglais avec un résident 4 l'oeil vif. I] a du mal a croire que l'immense Canada n’a que 24 millions d’habitants alors que sa petite Espagne en a 38 millions. «Quoz! Montréal n'est pasla capitale canadienne?» ajoute-t-il 4 mes propos savants. Jentre dans un _ magasin général, qui rappelle la ruée vers lor du Klondyke, pour y acheter a trés bon compte des provisions que je consommerai dans le train. En reprenant la direction de la gare (un bon vingt minutes de marche), je me_ retourne souvent... Que de synagogues, mosquées, €églises Renaissance, musées j'aurais aimé prendre le temps de visiter! I] me faudra revenir a tout prix. Je traverse a nouveau le vieux pont, d’un pas accéléré. L’Alcazar, au_ loin, découpe sa silhouette chargée d’histoire dans le ciel étoilé. Le retour a Madrid me permet enfin de me reposer. Voyage agréable, malgré la forte odeur d’ail que dégage mon voisin. Mieux vaut l’haleine d’un cheval! Je me distrais, une main sous le nez, avec la lecture d’un excellent article sur «Amadeus», qui vient de prendre d’assaut les écrans de cinéma. (Un Francais m’a donné, il y a un instant, le dernier numéro du «Nouvel Observa- teur») . Et je finis par m’assoupir, lesprit réveur, la téte emplie de mille et une images qui €évoquent avec magnificence toute l'histoire espagnole. Pas étonnant que Cervantés ait qualifié Toléde de «gloire de l’Espagne.» Olé! DOODDOOSBOOOoooooo i+ Supply and Services Canada Jar wae a * Automobiles * Camions légers Inspection et vente vendredi le 12 fevrier 1988 samedi le 13 fevrier 1988 Date decléture de vente seront considérées. Lieu dela vente 12171 Horseshoe Way Richmond, B.C. (604) 272-9062 Materiel du Gouvernement VENTE PUBLIQUE (Offres cachetées) Les offres seront regues sur les lieux jusqu’a 13h, le samedi 13 fevrier. Les formulaires doffre d'achat et les conditions de vente seront disponibles sur les lieux. Sodas eS SUA Te PRS BL ee ain a peers APPROVISIONNEMENTS ET SERVICES CANADA Le Centre de distribution des biens de la Couronne ‘de 9h a 15h de 9h a 13h Canada ror