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6, Le Soleil de Vancouver, 7 septembre 1973.

Une enfant nommés

MERCEDES

La voix fr afche de Mercé
dés Benegbi grimpe l’esca-
lier, triomphante: Maman
maman, j’ai obtenu 22 sui

25 pour mon examen d’an-
Quelques

glais. secondes

Avec 150 autres enfants ca-i

_nadiens, Mercédés_ Bengbi.

de ville d’Anjou, banlieue
de Montréal, est victime d’u-
ne tragédie qui remonte 4
onze ans déja: c’est une
enfant de la thalidomide.

Le public a peut-étre ou-
blié les péripéties de ce
drame international qui a
touché prés de 10,000 fa-
milles dans le monde, en

ea

plus tard, la fillette offre
sa joue de pécheau baiser
recompense. La preuve dt
succés est la, une feuille
Suspendue aux petites mains
atrophiées, prés del’épaule.

Allemagne surtout ot des
comprimés sans expérimen-
tation suffisante, ont d’abord
été proposés aux femmes
enceintes pour apaiser leurs
nausées.

Les parents de ces enfants
sans bras, quelquefois sans
jambes, n’ont pas oublié eux.

KKM

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Na MES)

Texte: Céline Legaré
Photos: Faber

Marcos et Colette Benegbi

n’ont pas oublié. Et ils vi-

vent plus douloureusement

que leur fille unique, encore
dans le monde protégé de
l’enfance, son grave handi-
cap.

**Nous l’avons choyée pour
lui faire des provisions de
bonheur; les larmes vien-
dront bien assez vite et quel
jouet pourra alors la con-
soler de la solitude du
coeur . ’’ murmure sonpére
qui redoute pour sa petite
la phase de l’adolescence,
de l’éveil des sentiments.

Le pére de Mercédés est
Marocain de culture espa-
gnole; depuis 16 ans, le Ca-
nada est sa patrie, la mére
est Québécoise. A deux, ils
ont tissé un cocon de ten-
dresse autour de leur fille,
vive, chaleureuse, trés so-
_ciable, ses immenses yeux
marrons pétillants de ma-
lice et d’intelligence. Cet-
te tendresse ne fut jamais
apitoyée mais tonique. Mer-
cédés aura besoin plus que
quiconque d’un caractére
trempeé. Ses parents la
forment 4 l’indépendance A
travers toutes les phases
de son adaptation & la vie.

Pas? | 1
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Colette Benegby et sa fille aiment les
courses endiablées a travers les champs.

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Mercédés aime s'amuser

Avec une trentaine d’au-
tres petits Québécois, la
fillette a suivi un program-
me spécialement con¢u pour
les thalidomidiens 4 L’Ins-
titut de Réhabilitation de
Montréal et subventionné a-
lors par le ministére de la

Santé. Dés l’Age de 14 mois ~

elle a subi ses premiers
tests; 4 18 mois, ce _ fut
l’entrafmement aux prothé-
ses qu’elle ne porte plus
depuis quatre ans, plus ha-
bile sur le clavier de l’or-
gue familial avec ses pro-

”
an

— sane

Marcos et Colette Benegbi

n’ont rien négligé pour 1’é-
panouissement de leur fille.
Pour
quand ils ne seront plus 14,
ils ont une autre bataille A
livrer, juridique cette fois,

sa sécurité future,

en groupe d'amis.

pres doigts que par crochets
interposés. Puis, plus péni-
ble que tout, ce fut l’inter-
vention correctrice qui em-
prisonna ses pieds dans le
platre pendant six mois.
Elle n’avait alors que qua-
tre ans.

Pendant ce temps, les pa-
rents de Mercédés ont trou-

vé, auprés des médecins,.

des psychologues et des
techniciens de 1’Institut,
conseils et réconfort, mais
les ressources de leur

coeur ont décuplé leur ima-

Mercédés aime le grand air de leur villa d'été au Lac-aux-sables.

afin d’arrondir une rente ju-
gée insuffisante. Non qu’on
monnaie un drame de cet or-
dre, mais la riche maison
distributrice du médicament
fatal doit assurer aux enfants
de la thalidomide une 2xis-

Rien ne l'arréte au jeu.

gination. Ainsi, pour stimu-
ler les premiers pas de sa
fille,
tourner des marches sur le
tourne-disque. Pour amortir
ses chutes, il a adapté un
casque protecteur qui fut
recopié 4 Toronto et méme
en Angleterre. Il a tour 4
tour adapté le guidon du
tricycle, de la bicyclette et
les jeux de Mercédés au
chalet du Lac-aux-Sables,
construit par son pére.

tence 4 l’abri du besoins. Il
serait indécent que, pour as-
surer le pain de l’avenir, on
oblige Mercédés et ses pa-
reils 4 6tre les victimes
d’une erreur humaine re-
grettable.

papa Benegbi faisait —