ne se perd, rien ne se crée. C’est d’une telle évidence que nous le savons tous, mais nous passons notre existence a le nier. D’ou pensez-vous que vient I’entomophobie, l’arachnophobie? Notre crainte de la mort se sublime en crainte de l’insecte. Et cette grande vérité aussi posséde ses prophétes. Tout comme les autres fadaises religieuses ont leurs prédicateurs. Mais voila, ces paraboles passent inapergues comme s'il ne s’agissait que de littérature de divertissement. Aussi, qui peut se targuer d’avoir cogité sur les implications métaphysiques de cet échange que Shakespeare préte a ses personnages Hamlet et le Roi? Eh bien, Hamlet, ot est Polonius? —A souper. —A souper? Ou donc? — Non pas [a ou! l'on mange, mais la ou I’on est mangé. Un certain congrés de vers politiques |’a pris en charge. Pour les plaisirs de la table, le seul vrai souverain, c’est votre ver. Nous engraissons toutes les créatures pour nous engraisser et nous nous engraissons pour le ver. Un roi gros et un mendiant maigre, ce n’est plus qu’un menu varié: deux plats pour la méme table, puis c’est fini. - Hélas! Hélas! - N’importe qui peut pécher avec le ver qui a mangé un roi et manger le poisson qui a mangé le ver. - Que veux-tu dire par la? - Rien, rien. Sauf vous montrer comment un roi peut procession- ner dans les boyaux d’un mendiant. € Voila pourquoi on dit que la mort est la seule véritable justice. Quoi ? Croyiez-vous sincérement qu’il y avait des castes post- mortem ? Que nous nous réincarnions selon l’importance de notre rang social? Nenni! Nous ne sommes tous que des larves. Certes, l'acceptation de ceci demande une grande humilité, qui n’est pas le propre de l'Homme géocentrique et €gocentrique. Pourtant, les grandes révélations sont la, sous nos yeux, mais nous les ignorons, sciemment ou non, ayant trop peur de nous confronter a l’inéluctable. L’évidence est-elle sous nos yeux que nous nous aveuglions, persuadés de mériter meilleure destinée que celle des 9