VICTORIA A CETTE EPOQUE Victoria fut une surprise! La ou il n’y avait qu’une vingtaine de cabanes aux toits d’écorce lorsque Mgr Demers avait quitté le pays, l'année précédente, il y avait maintenant, hormis le fort construit en 1843 et la résidence épiscopale, prés de deux cents habitations et une multitude de tentes dressées en hate par des prospecteurs et aventuriers venus de tous les pays tenter leur chance dans la ruée vers l’or des Cariboo. La population était passée de mille 4 quatre mille habitants. La ruée vers l’or avait transformé la ville. PREMIER COUVENT, PREMIERE ECOLE Dés le premier jour, aprés un repas a l’évéché, les soeurs prirent possession de leur demeure et commencérent aussitét a travailler, leur priorité était d’enseigner aux petites “sauvagesses” et métisses. Le lendemain étant un dimanche, Soeur Marie-Luména enseigna le catéchisme aux femmes et aux enfants venus au “couvent” par curiosité. Le couvent, ou premiére résidence des Soeurs de Ste-Anne, leur premiére école également, était des plus modeste comme le décrivait Soeur Marie-Angéle: “Notre maison de trente pieds sur vingt-quatre est lambrissée. Elle a deux fenétres avec une porte au milieu, sur le devant, autant derriére et une fenétre a chaque extrémité. C’est une jolie maison a l’extérieur; mais il n’en est pas ainsi au dedans; les joints ne sont pas encore tirés, il n’y a pas non plus de plancher en haut. ..Elle est séparée en deux avec de la planche toute brute, et a une cheminée double au milieu”. C’était probablement dans cette méme cabane de rondins que, prés de dix ans auparavant, en 1849, le pére Timothé Lempfrit o.m.i. avait fondé a Victoria, la premiére école de Colombie- Britannique. Quelques semaines plus tard, grace a la bienveillance de Mgr Demers et avec l’aide des Clercs de St- Viateur, ce batiment fut agrandi. Onze petites métisses furent confiées aux religieuses. Parmi les premiéres éléves on retrouve: Elizabeth Douillette, Caroline et Elionore Falardeau, Héléne et Justine Lavoie, Genevieve Lecuyer, 6 LES SOEURS STE-ANNE Céline Méné et Emilie Morel. L’enseignement des Soeurs de Ste-Anne n’eut été prodigué qu’a la population indienne et métisse, selon l’orientation missionnaire de ces religieuses, si les employés de la Compagnie de la Baie d’Hudson n’étaient intervenus pour modifier une telle orientation. En effet, a ouverture des classes, les religieuses durent accepter dans leur école les filles des employés de la Compagnie parmi les- quelles les filles de James Douglas, chef commissionnaire, qui vint lui-méme les conduire au couvent, cet exemple fut suivi par les autres fonctionnaires. II fut alors nécessaire d’organiser une classe spéciale, en anglais, sous la direction d’une titulaire compétente, pour ces fillettes. C’est ainsi qu’en 1859, les Soeurs Marie-du-Bon- Secours et Marie-de-la-Providence arrivérent de l'Est pour ouvrir un couvent pour les “demoiselles”. Soeur Marie-de-la-Providence, alors agée de 22 ans, forma les religieuses a l’enseignement en anglais, tandis qu’elle-méme étudia le Chinook. Elle organisa une classe pour les fillettes des familles bourgeoises dans une maison louée au centre ville. Afin d’attirer lattention sur cet établissement de fortune, elle l’appela “select school” en contraste avec l’école des premiers jours ou étaient encore recus les garconnets et les orphelines ainsi que les malades abandonnés, école dénommée “color school”. TRIBULATIONS ET SUCCES DES SOEURS DE STE-ANNE Les religieuses faisaient l’admiration de tous par leur dévouement et leur zéle; mais elles ne purent pas, malgré cela, bénéficier de subsides coloniaux pour I’enseignement ainsi que le déplorait Mgr Demers: “le gouvernement colonial ne me donne aucune aide, pas méme pour des fins éducationnelles”. Finalement, a partir de 1865, les écoles confessionnelles ne sont plus reconnues par la loi (“free school act”). Ce fut alors la responsabilité de Mgr Demers de financer lenseignement confessionnel pour lequel il s’etait déja imposé de fortes dépenses en faisant venir les religieuses; celles-ci ne pouvaient compter sur les contributions privées pour maintenir et organiser de telles institutions. Bien qu’agrandie, l’école des premiers jours ne pouvait suffire aux besoins croissant des religieuses. Aussi, au printemps 1860,