90 VENDREDI 20 JUIN 1986 Récit d’un tour du monde - Hystérie d Par Jean-Claude Boyer Jean-Claude Boyer, québécots vivant en Colombie-Britannique depuis six ans, vient d’effectuer un tour du monde d’un an. Espagne, 2 novembre 1984. Aprés une journée aussi haras- sante que passionnante 4 visiter Toléde, j'arrive 4 Madrid (67 km) juste 4 temps pour l’express de nuit pour Barcelone. Je déboule un dernier escalier. Le train est sur le point de se mettre en branle, comme un serpent aux aguets. “Barcelona?” Le contréleur me fait signe d’avancer vers la téte. Je ne vois par les fenétres que des couchettes. J’'avance donc d’un pas rapide. Craignant que le train ne parte a l'instant, je m’'appréte a monter. Aussitét, un jeune préposé me lance une volée _ de phrases nerveuses dont je ne saisis que le mot “camas” (its) . Je continue a avancer, d’autant plus que je ne vois toujours que des couchettes. Comme le train se met en branle, j’apercois des siéges. D’un bond, m’y voila, sitét assis, seul, dans un compartiment ultra-moderne, ravi de pouvoir enfin prendre mes aises. Le jeune contréleur a tét fait de venir vérifier mon “bzllete”. Lorsque je lui présente mon Eurailpass lére classe, il se met a m’engueuler dans la langue de Cervantés, me faisant com- prendre, malgré tout, qu'il m’a pourtant prévenu de ne pas monter. Il va chercher un confrére qui, lui, est déja “sur ses grands chevaux”. Ni l'un ni l'autre ne parle ni anglais ni francais. Les reproches tombent drus, aussi incompréhensibles qu'une violente condamnation en chinois. Ils réussissent tout de méme a me faire réaliser, tout a coup, que ce train de nuit ne contient que des couchettes. (Je ne savais méme pas que ¢a existait). Il] me faut payer un supplément, l’€quivalent de 5$. Or, je n’ai plus, en devises espagnoles, que de quoi prendre un petit déjeuner a Barcelone, puisque je m’en vais en France. Je leur montre également l’argent portugais que j'ai gardé pour la collection de mes neveux, une réserve de francs frangais et, bien sir, ma petite liasse de chéques de voyage. Les voila en furiel Ils fulminent, les deux en méme temps. Nous sortons du compar- timent; la porte claque. L’un saisit mon sac 4 dos et le dépose rageusement entre une sortie et un cabinet de toilette; c’est 1a que je devrai attendre le prochain arrét dans quelque... 4 heures. Debout, bien que prét 4 me taper 12 heures de sommeil, je regarde, ahuri, des silhouettes d’arbres et de maisons, ou des lueurs incertaines, défiler a vive allure. Je recois d’abord la visite de celui qui est sans doute le chef de train. Ine parle, lui aussi, que l'espagnol. Il s’assure finalement que je descendrai 4 Saragoza a $h10. Puis, passent 2 jeunes filles a qui je m’adresse en francais. L’une d’elles comprend. Je me ’ vide le coeur, racontant briéve- ment la fin de ma journée épuisante dans le labyrinthe du vieux Toléde jusqua ma condamnation a cette cellule improvisée. Les questions fusent. Le chef revient, échange quelques mots avec l'interpréte. Jinsiste pour m’expliquer davan- tage: jai pris ce train 4 la derniére minute sans méme savoir que des trains composés uniquement de wagons-lits exis- tent. Croyant que je suis déterminé a ne pas descendre a Saragoza, il parle de faire intervenir la ‘“‘policia’”. Un jeune passager bilingue s’empresse de prendre ma défense. Pour montrer, concrétement, le ridicule de la situation, d’autant plus ridicule que le supplément a payer est trés minime, je dispose en éventail mes chéques de voyage et ce qui me reste en devises espagnoles, portugaises et francaises. Le chef répéte que je suis dans ]’illégalité et insiste pour que je ne sorte pas de ce coin jusqu’a Zaragoza. Les 3 jeunes s‘excusent de ne pas pouvoir m’aider, n’ayant disent-ils, que peu d'argent de la St-Jean a tous les Canadiens francais STERN — SERVICES FINANCIERS* Rapports d’impots (Canada et E.U.) Planification fiscale Comptabilité générale Etats financiers Conseillers en gestion des entreprises Evaluations Fusions e Acquisitions (*) Une division de Jonathan Stern et Associés, Inc. 1525 rue Robson, piéce 600 Vancouver, C.B. V6G 1C5 Tél. (604) 683-9683 662-3366 eux-mémes, . LE SOLEIL DE COLOMBIE ans un train espagnol liquide. “Buenas noches’. L’air froid qui entre par le bas de la porte m’empéche de demeurer assis sur le plancher. Je prends ma patience a deux mains, pour ne pas dire le taureau par les cornes, et tue tant bien que mal, en révassant, Yennui et la fatigue qui m’accablent. Lorsque le train s'arréte, au milieu de la nuit, j'apercois le visage abruti d’un des contréleurs dont j'ai di subir l’hystérie qui surveille ma descente. Je m’é- tonne de l’animation qui remplit l'immense gare a cette heure tardive. Prochain train pour Barcelone dans, une heure. Dieu qu’il fait bon s’étendre de tout son long aprés avoir attendu, debout dans la monotonie d’un train de nuit, un arrét qui n’en finit pas de ne pas venir. Depuis, chaque fois que j’entends Carmen chanter sa fougueuse passion toute espagnole, je me rappelle cette nuit ot j'ai été traité, m/’a-t-il semblé, comme une menace a la _ sécurité nationale de l’Espagne. Banque Nationale de Paris Succursale de Vancouver anada) Suite 1570, 701 West Georgia P.O. Box 10159, Pacific Centre, Vancouver, B.C. V7Y 1E4 Téléphone: (604) 688-2212 Télex: 04-51569 vie Ath ur A Nurra x 685, rue Smithe Vancouver 684-2477 Ecoles de danse franchisées de Vancouver 6161, rue Cambie Vancouver, C.-B. L'Alliance Francaise souhaite une St-Jean trés agréable Tél: 327-0201 J VANCOUVER’ © oo 7611 Alderbridge Yeay Biches B.C. '3-8466, V6X 1Z9 Tél, : (604) 2 @ Imprimeuses International Corp. Ltd. 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