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~CARNET D’UN PROMENEUR par roger DUFRANE

Prestige des Images

Bien pourvus d'un chez-
nous, d'amis, de parents,
pensons=—nous parfois au jeu-
ne homme seul venu chercher
fortune sur la Céte du Paci-
fique, et qui erre en exil
dans la ville étrangére?

Il est sorti, ce soir de
pluie, et se heurte 4 l'indif-
férence des passants. L'asphal-
te noir Iuit et gicle au pas-
sage des autos. La foule cir-
cule, bruyantdé, et l'ignore.
Le jazz qui déborde d'un éta-
blissement de nuit, la lumiére
tapageuse des réclames, lui
font mal. Il se sent seul. Il
aspire & la lumiére de son
pays, A une chaude présence
un ami, une femme, une famille.

Les bienfaits que dispense
la destinée lui seront, sou-
haitons-le, départis un beau
jour. En attendant, que fera-
t-il pour tromper son ennui?

Les cinémas le sollicitent.
Ici, les photos du hall d'en-
trée exhibent un homme velu
comme un gorille,qui terrasse
ses ennemis et fait tomber des
vamps pareilles 4 des tigres-
ses. La, une de ces tigresses,
fort peu vétue, est subjuguée
par des hommes-robots. Le jeu-
ne homme se procure un billet
et entre dans la salle obscure
pour se droguser pendant deux
heures d'images brutales et en-
votitantes.

Il existe deux catégories de
films. Ceux d'une certaine
valeur, les plus rares, et une
marée de films comnerciaux qui
noient les premiers. L'abon-
dance des films médiocres a
‘fait du cinéma ce qu'un probe
cinéaste a nommé " un instru-
ment de stupeur".Le mauvais

cinéma plonge ses adeptes dans -

une vie factice, illusoire, et
abrutissante.

D'ot vient cette pléthore
de productions nuisibles? C!
est que la mise sur le marché
dun film cofite cher. Pour ga-
gner plus d'argent, il faut
plaire aux masses. De 14 le
manque de caractére de tant de
films. Quelques producteurs
consciencieux poussent 1'amour
du métier au point de mettre
l'art au-dessus de la finance.
Ils deviennent célébres parfois
et cueillent la récompense de
leur probité professionnelle.

Personnellement, c'est vers
1945 que me fut révélé le vrai
cinéma. J'entends pear 1& un

enchainement d'images évocatri-
ces d'une vérité profonde. Le
film des " Visiteurs du Soir "
de Marcel Carné, aux photogra-—
phies mouvantes et splendides de
Robert Hubert, fut tourné en
France inoccupée vers 1942,
dans un chateau féodal. Les
dialogues étaient du poéte Ja-
eques Prévert et l'intrigue se
déroulait dans 1'atmosphére

du lioyen Age. Je revois encore

‘le montreur d'ours qui s'avance
q

vers le chateau blane, une ron-
de de gnomes, le reflet san-
glant d'un duel sur une fon-
taine. Sous les traits cyni-
quesde Jules Berry, le diable
en habit noir & boutons de
diamant changeait en pierre
deux amants dont le coeur con-
tinuait & battre pour 1'éter-
nité. Cela symbolisait l'amour
vainqueur.

Depuis les premiéres images
du muet jusqu'au cinérama, la
technique du cinéma a prodi-
gieusement évolué. Le cinéma
a-t-il progressé dans la voie
artistique? Il est permis d'en
douter. Du temps du muet, déja,
un clignement d'yeux, un fré-
missement de roseaux, suggé-
raient tout un drame. Le par-
lant nuit trop souvent 4 l'ex-
pressivité des visages et aux

signes des choses, et la couleur

& l'ambiance dramatique ou
poétique des films.

Il est vain de regretter le
muet, r6m3 s'il représente 1'
age d'or du cinéma. Le muet a

_ accompli son cycle et ne sau-

rait renaitre.

Quant au film noir et blanc,
les meilleurs metteurs en scéne
le préférent au film en couleur.
Cocteau le savait qui a créé en
noir et blane son chef-d'oeuvre
de la Belle et la Béte. Le dua-
lisme du monde s'exprime mieux
en noir et blanc, cette lutte
entre l'ombre et la lumiére,en-
tre les antagonismes ot se nou-
ent les destins.

L'amateur averti veut des
films qui lui donnent & réflé-
chir. Nous aimons que musique
et parole se subordonnent a
l'image, et que parfois les
bruits se taisent pour laisser
parler les choses picturales.
Nous voulons des films dont
l'aventure se prolonge en nous.
Les héros seront-ils heureux?
A nous de répondre selon le
film noir ou en couleur de no-
tre destinée.

*
*
‘

61 Est i5éme Avenue
ancouver, 10, C.B.

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» No,de téléphone:

*

LE SOLEIL de VANCOUVER

6
V;
Ci-inclus la sonme de $
d au journal " Le Soleil de Vancouver"

Le Soleil de Vancouver,page 5, 21 mars 1969.

LA FRANCOPHONIE:
(Suite de la page 8)

Ie nouvel état chercha a signer
un traité d'amitie’ avec Haiti, mais
le Président Boyer: envahit Santo—Do-
mingo qui capitula en 1822, et resta
une partie d'Haiti pendant 22 ans,

Boyer, un dictateur,décréta des
mesures tres strictes afin d'intro=
duire un genre de securite dans 1'é-
conomie, Menacé par la ~-France et
craignant la réoccupation, il fut
force’ de payer une indemnité exhor~
bitante en rembourseme:t de la perte
des planteurs francais,Et pour y ar=
river, il emprunta d'énormes: sommes
dtargent de la France.En 1843, Boyer
fut exild, ;

le chaos économique, provenant
de la corruption politique et d'une
administration inapte conduisit Hai~

‘tia un continuel manquement a ses

cbligations monetaires internationa=
les. Ia ( " National City Bank" ),
banque de New-York qui a le controle
de presque toute la Banque Naticnale
d'tHaiti, réclame ltassurence d'une
plus grande securite et pousse le
gouvernement d'Haiti a demander de
ltaide aux Etats-Unis,

la _situation politique est de-
venue tres mauvaise et le 28 juillet
1915 le président, Guillaume Sam,fut
traine de son abri a la legation
francaise et lapidé dans la rue, par
Ja foule, * ;

Le méme jour,les Etats-Unis dé=
pécherent. des troupes et les ™ mari-
nes * commenctrent 1tocecupation mi=
litaire du pays, Ltordre fut rétabli
et le gouvernement d'Hé@iti contraint
par les Etats-Unjs d'taccepter-. un
traite pemettant aux envahisseurs
dtavoir la main haute sur les doua=
nes et d'implanter d'autres réformes.

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