4 par Keith SPICER Courtoisie du Vancouver Sun Vancouver.-Parlons donc d'un sujet déplaisant, mais inévitable: trop de Cana- diens anglophones disent que, par la faute de Pierre Trudeau, le Canada n’est gouverné que par des Qué- bécois francophones. Aux yeux de nos conci- toyens francophones qui ris- quent leur vie politique (et souvent leurs amis person- nels) a Ottawa, cette accusa- ‘tion absurde fait figure de triste plaisanterie. Mais cet- te folie est de nouveau au goit du jour, particuliére- ment 41’Ouest et dans les provinces de l'Atlantique, et elle mérite d’étre contredi- Comme tous les menson- ges politiques, le mythe de “Vinvasion frangaise” s’ap- puie sur quelques faits soi- gneusement triés: le gouver- neur-général et le premier ministre actuels du Canada -sont tous deux francophones et originaires du, Québec. Le ministre des Finances Jean Chrétien et le ministre d’E- tat aux relations fédérales- provinciales Mare Lalonde, les seules ministres fédé- raux a avoir conservé leur autorité et leur prestige nationaux, sont également des Québécois francophones. Méme a I’échelle provin- ciale, les ministres-vedettes ‘d’étoffe nationale viennent m du Québec, comme par exemple, le premier minis- tre René Lévesque et, le vent en poupe, le chef libéral Claude Ryan. Bref, les centaines de gros titres et d'images télévisées que nous voyons chaque semaine nous donnent par- fois la nette impression que le Canada est gouverné par des francophones. Du cété des anglophones, si l'on ex- clut quelques feux de paille journalistiques comme !’inté- rét suscité par le ministre des Sports Iona Campagnolo aux Jeux du Common- wealth, c’est apparemment le désert... Les raisons sont multi- ples. Tout d’abord, qu’on aime ou qu'on déteste Pierre Tru- deau, on ne peut nier que _son envergure est exception- nelle dans n‘importe quel . contexte politique - un trait que les hommes d’Etat et les commentateurs étrangers ne se privent pas de souli- gner, ce qui a le don d'irriter au rius haut point ses enne- mis du pays. Jean Chrétien et Marc Lalonde, deux hommes au talent incontestable, se haussent d’un cran parce quils jouissent clairement de la confiance personnelle de M. Trudeau. Ensuite, les démissions d’anglophones (pour ceci ou pour cela) sont allées bon train ces dix derniéres an- nées et M. Trudeau a été abandonné par ses collégues anglophones les plus solides et les plus brillants. Paul Hellyer, Eric Kierans, John Turner, Mitchell Sharp ou Don Macdonald auraient pu tenir le rdle de “lieutenant canadien-anglais”. Mais il y eut d'autres pertes doulou- reuses: Bryce Mackasey, Bud Drury et, il y a quel- ques jours, Ron Basford; aucun de ces porte-parole de différents secteurs d’opinion “anglais” n’a été remplacé. On ne compte plus les théories qui tentent d’expli- - quer le taux de mortalité politique des ‘anglophones: l'entétement de Trudeau, le dilettantisme de Trudeau, la devise machiavélique du “Diviser pour régner”’ de Trudeau, l'inaccessibilité de Trudeau, l’intellect écrasant de Trudeau. Jamais pourtant dans tou- tes ces rumeurs un ministre démissionnaire n’a paru ad- mettre que ses raisons per- sonnelles ou familiales s’ac- compagnaient d’une peur é- trange de confronter le pre- mier ministre. De plus, si les francopho- nes occupent le devant de la scéne, c’est que leurs adver- saires politiques anglopho- nes sont plutét pales. Le chef conservateur Joe (alias John) Clark et le chef NPD Ed Broadbent sont des hom- mes estimables, voire méme astucieux. Pourtant, pour une raison quelconque, ils n’appartiennent pas 4a la catégorie des colosses - des Gullivers chez les Lillipu- tiens. Malgré leur potentiel pour batir des réputations super- nationales, les provinces el- les-mémes'n’ont pu accou- cher d’un seul premier mi- nistre anglophone remar- quable par sa vision natio- nale et son pouvoir écono- mique conjugués. Ce mois-ci, a laconférence des premiers ministres provinciaux a Ré- gina, les neuf dirigeants anglophones _s’accrochérent obstinément a leurs querel- les de clocher et a leurs griefs contre Ottawa. Résul- tat: ils finirent par devenir des pions dans le jeu de René Lévesque, quiest de torpiller toute tentative fé- dérale sérieuse pour met- tre au point une nouvelle La Caisse Populaire et la Communauté ‘par Roméo PAQUETTE > - = = 5iéme article . série 2. Pour une liberté spirituelle Pour conclure cette deuxi- éme série d’articles, il fau- drait peut-étre reprendre nos raisonnements des: cha- pitres précédents et-cher- cher a simplifier des aspects qui pourraient avoir été présentés comme des pro- blémes impossible 4 résou- dre. Notre objectif consistait a faire valoir le rdle qui re- vient a la caisse populaire, dans la réalité sociale d’au- jourd’hui. Peut-étre aurait-il été mieux d’associer a ce réle d’humanisation, d'autres ins- titutions traditionnelles. Toutefois, l'objet de ces arti- cles consiste en une ré- flexion sur engagement d’u-, ne institution particuliére, la coopérative d’épargne et de- erédit, qui, malgré ses objec- tifs fondamentalement hu- manistes, doit subir les pres- sions de la société matéria- listes d’aujourd’hui, comme, -par ailleurs, les autres insti- tutions. Vu que ces articles éma- nent d'une caisse populaire, continuons de traiter du sujet a partir des préoccu- pations qui sont les siennes. Le dilemme qui nous con- fronte pourrait s’énoncer comme étant le phénoméne de “homme unidimension- nel” décrit par le sociolo- gue bien connu, Herbert Marcuse. Nous vivons dans une “civilisation industrielle a- vancée ov prévaut une for- me de non-liberté conforta- ble, douce, raisonnable et démocratique”. I] s’agit d’u- ne forme de “totalitarisme sans terreur a base de coor- dination technico-économi- que qui fonctionne par la manipulation des besoins. Ces manipulateurs sont les détenteurs de droits acquis”. Nous avons un exemple du pouvoir de manipulation de ces détenteurs de droits acquis chaque fois que nous entendons des énoncés de politique économique gou- vernementale. Depuis plusieurs années, déja, nous assistons au phé- nomeéne inflationniste ac- compagné d'un taux élevé de chémage. — En juillet 1969, le Premier Ministre du Canada annon- cait des mesures draconnien- nes pour freiner la montée en spirale des prix et des revenus: - Par la suite, il créait la ‘Commission de surveillance des prix et des salaires. Les années passérent et la spira- le s’accéléra. En désespoir de cause, et contrairement a lengagement.qu’il avait pris devant I’électorat, le méme premier ministre, M. Tru- deau, lui-méme économiste, annonga la création d’une Commission de contréle des prix et salaires, dirigée par M. Jean-Luc Pépin. Une certaine stabilisation sembla s’installer dans 1’é- chelle des prix, mais le ché- mage ne fit qu’empirer. Sui- te aux pressions répétées des entreprises, d'une part, et des syndicats ouvriers, d’autre part, le gouverne- ment dut faire retraite et liquider la Commission Pé- pin. A sa place, l’on installa une sorte de commission d’enquéte perpétuelle, sans pouvoirs, quia pour tache d'identifier les zones de dé- linquence et en faire rapport au gouvernement. Résultat: les indices du -cotit de la vie. en juillet, démontraient que la spirale est repartie de plus belle, alors que le taux de ché- mage a a peine régressé pour se maintenir 4 une moyenne dépassant9%. La conclusion a tirer est évidente: les gouverne- ments ne peuvent étre que le reflet de la situation, et _ cette situation apparait pour le moins confuse. I] est un dicton qui se précise de plus _ en plus dans mon esprit: “Il est impossible de satisfaire tout le monde et son pére”, et l'on pourrait ajouter sur- tout quand on a la respon- sabilité des solutions. N’avez-vous pas remarqué que tous les experts sont, soit dans les partis d’oppo- sition, 4 la téte des mou- vements de pression, aux machines a écrire des grands journaux, morts ou sur les conseils d’acministration des grandes entreprises. Dés qu’ils passent le seuil du gouvernement ou s’iden- tifient 4 une commission officielle, ils prennent figure d’amateurs, sinon d’igno- rants. Avez-vous déja entendu un parti d’opposition ap- puyer les politiques du parti au pouvoir? La formule ha- bituelle se résume de la facon suivante: “C’est la mauvaise solution...ils au- raient di nous écouter...si nous avions eu a prendre la - alternative fédéraliste a l'in- dépendance du Québec dans le cadre du référendum qui approche rapidement. C'est aussi la nature mé- me des questions dominant notre vie politique - unité nationale et économie - qui explique I’éclipse des “An- > glais” a la téte du pays. Si M. Trudeau et ses col- légues québécois nous sem- blent les seuls a faire rimer convictions et passion, c’est peut-étre parce qu'ils sont entrés en. lice littéralement pour sauver leur pays. Bien que dans tous les partis beaucoup d’hommes politi- ques anglophones soient pro- fondément attachés au Cana- da, aucun n’exprime les tour- ments et les espoirs de la nation avec autant de feu que les Québécois a Ottawa. Le grand danger actuel, pour le Canada, réside au Québec (qui est loin pour- tant d’étre la source de tous nos mécontentements): il n’est done pas surprenant que les Québécois conti- nuent de dominer le débat sur “l’unité nationale”. Il en sera de méme jusqu’a la phase post-référendaire, mo- ment auquel il faudra définir une nouvelle relation entre le Québec et le reste du Canada. - Pour ce qui est du réle disproportionné que les Qué- bécois semblent jouer dans l'économie canadienne, deux facteurs entrent en jeu. Le Québec vient aprés tout en deuxiéme position parmi les provinces riches du pays, et avec le climat politique pré- eaire qui y régne, chaque grincement économique - le départ d’une compagnie ou _Tintransigeance d'un syndi- cat - fait la une des jour- naux. Deuxiéme facteur: Jean Chrétien au poste de minis- tre des Finances. Depuis son fiasco sur la taxe de vente, il sait sans doute que sa char- ge actuelle est un aimant de choix pour toutes les coléres d’ordre économique. Comme l'économie est 4 présent en aussi pietre état (a peu de choses prés) que lorsque John Turner a prudemment pris du large en septembre 1965, M. Chrétien devient 4 coup sir un “Québécois” trés en vue. Enfin, les Canadiens an- glophones d’envergure sem- blent tenus a l’écart des fonctions nationales? C'est bien parce qu’ils le veulent. Qu'ils invoquent pour excu- se famille, carriére, philoso- phie ou désaccord avec le style de leadership de M. Trudeau, il n’en reste pas moins un fait frappant: les éléments les meilleurs et les plus dynamiques du Canada anglais restent massivement hors de l’aréne: politique - ceci 4 une époque ov les tensions économiques et cul- turelles provoquent un véri- table état de crise. Alors, ils sont outrés, les “Anglais”, de voir “tous ces Francais” gouverner “leur” pays? Qu’ils n’aillent pas maudire le charmant accent de Jean Chrétien le soir du discours sur le budget. Qu’ils se demandent plutét pour- quoi le Canada anglais ne peut pas fabriquer quelques John Christian. décision, nous aurions pris la bonne...” ‘ Tlen est de méme pour des -journaux, 4 l'exception de ceux. qui appuient ouverte- ment le parti au pouvoir... Les éditorialistes semblent toujours avoir une ligne se. En réalité, les détenteurs de droits acquis, auxquels nous nous référions plus haut, sont des minorités dont les intéréts ne sont pas toujours convergents Tout ce qu'il y a de com- mun entre eux, c’est le fait que le systéme actuel sert leurs fins propres. Le dilemme réside du fait que l’ensemble de la popu- lation partage des bénéfices ‘matériels qui pcurraient €é- tre perdus, si les intéréts dont ces bénéfices dépen- dent ne se perpétuaient pas. Les gouvernements, qui doivent étre élus et main- tenus au pouvoir par tous ces intéréts divergents, ne peuvent faire autrement que refléter l'état de confusion dans lequel vit la société. ouverte avec la science infu- Nous pouvons donc pré- voir que la spirale inflation- niste continuera; que les luttes entre les détenteurs du pouvoir économique et politique se traduiront par \'élimination des plus faibles et par la création de mono- poles de plus en plus puis- sants; et que l'ensemble des populations préférera la ca- eve dorée du confort maté- riel 4 la recherche d'une ‘liberté fondée sur un choix . vraiment libre d'un style de vie propre a une conception © indépendante de ce qu’est le bonheur. == Toutefois, il est possible d'atteindre une liberté rela- tive, qui peut donner des fruits appréciables, tant sur le plan personnel que sur le plan communautaire. C'est la liberté de l’esprit. La “Société Unidimension- nelle” posséde les moyens _ d'information qui peuvent permetttre a l’esprit vrai- ment libre de se situer vis a vis d'elle. C’est ce que j'ap- pellerais la recherche de la liberté spirituelle. Lorsque celle-ci est acquise, l'autre devient possible. =. “La Presse” _Aimeriez-vous obtenir, chaque jour, le jour- nal “La Presse” de Montréal. C’est possible. Il suffit que cent personnes s’inscrivent et le service pourra étre créé. Le journal arrive- rait 4 l'aéroport, chaque jour, en fin de matinée. Si vous étes intéressés, téléphonez ou écrivez au. plus vite au “Soleil de Colombie”. :