Testament de |’ Abbé Pierre Qui ne connait pas Il’Abbé Pierre ? Ce saint homme merveil- leux, décédé récemment en France, aprés une longue vie active en faveur des démunis et des sans-logis. II est aussi le fondateur de la Société d’Emmaiis qui a des ramifications dans plusieurs pays, dont le Canada, et au Québec en particulier. Son livre intitulé « Testament... » est un recueil qui rassem- ble les innombrables textes et les réflexions collectionnés et gardés dans les tiroirs de sa table de chevet. Ecrits a la premiere personne, les témoignages de cet homme de foi nous apprennent que sa vie « est questionnement perpétuel... » . I] a choisi de vivre dans le milieu laic pour mieux réaliser son engagement social et satisfaire son besoin spirituel. Un homme d’action certes, mais aussi de priére libre de toute convention liturgique comme 1’on voit souvent dans les églises et les paroisses. « J'ai connu, écrit-il, des jours de joie merveilleuse au milieu des communautés : en France, au Chili, au Japon, en Uruguay. Partout, volontaires et amis d’Emmaiis travaillaient avec des jeunes des quartiers défavorisés ou avec des hommes cabossés par la vie. » Il a c6toyé des chefs d’états, [] a siégé comme député et a pratiqué la politique pour mieux défendre les intéréts des pauvres et des laissés pour compte dans la société frangaise. Il a plaidé pour le bien-étre des clochards et des sans-logis. I] a fait des campagnes 4 la radio et a la télévision, dans les journaux et les médias écrits afin de chercher des fonds et construire des logements aux familles _ infortunées. Paris-Match était un instrument de choix parce que la photo- graphie n’a pas besoin de mots pour convaincre et persuader. Dans sa page intitulée Horizons, le journal Le Monde du mercredi 28 janvier 2004 nous rappelait la saga de l’Abbé Pierre et donnait un exemple dans I’ceuvre d'amour et de charité de ce prétre né bourgeois et décédé pauvre et détaché des biens de la terre. Janine avec ses enfants vivaient sous une tente dans une ban- lieve parisienne. Elle trouvera un foyer, a elle, grace al’ Abbé Pierre et son équipe de mécénes. Sa fille Annie a eu une vie un peu agitée, mais sa petite-fille, Marléne, fille d’ Annie sera avocate et habitera une belle villa. Un changement en trois générations, pour le meilleur, C’est un jour de 1951, deux ans aprés la fondation d’Emmaiis et trois ans avant le fameux appel a « linsurrection de la bonté » sur les ondes de la populaire radio RTL, qu’il fait la découverte de Janine et sa famille dans le clan des miséreux- un gar¢on de trois ans et un mari qui l’‘abandonnera quelque temps plus tard. Il a rencontré des personnes importantes dans sa vie comme Teilhard de Chardin, un célébre philosophe chrétien ou encore le non moins célébre homme de science Albert Schweitzer. « Mais, dit-il, les personnes importantes que j'ai rencontrées dans ma vie n’ont jamais été pour moi des modeéles ». II estime cependant que « le chemin de toute vie est bordé par des personnes » et que « ce n’est pas un chemin dans le désert » méme s’il est considéré que la solitude repré- sente. des moments importants pour la priére et le recueillement. Il en cite comme exemple sa propre experience, le besoin qu’il a senti de s’isoler, non.pas dans sa chambre ot il ne pouvait s’endormir aprés une journée de travail chargée, mais en faisant une marche de nuit sur la plage de CopaCabana au Brésil. II était 4 ce moment-la 4 Rio de Janeiro ou il participait 4 un rassemblement en présence de Monsignor Helder Camara, archevéque de Recife, une autre figure célébre du clergé libéral contemporain. Lors du cinquantenaire du mouvement d’Emmaiis, |’ Abbé Pierre est de nouveau la vedette des médias. Sur la chaine 2 de la télévision francaise, retransmise par TV5 au Canada, il dénongait encore l’injustice et l’inaction des autorités gouvernementales frangaises. Une république dont le slogan est « liberté, égalité et fraternité » mais dont la fraternité est absente et ignorée. II dénonce ce qu’il appelle les marchands du sommeil, ces propriétaires véreux qui exploitaient par un loyer trop élevé des citoyens laissés pour compte soit dans le chémage, soit acculés 4 des emplois peu rémunérés. En conclusion, une vie exemplaire, celle de 1’ Abbé Pierre. Dieu est amour, affirme-t-il, et homme ne peut vivre sans amour. La foi, la tendresse, la solitude, la priére — celle du croyant ou de l’autre- serait inutile sans l’action, celle « du concret, du neuf, du réel » dira-t-il, parce que « la vie n’est pas un chemin dans le désert ». Voila un beau petit livre, un témoignage qui éclairera le chemin a parcourir dans la vie. Vous trouverez ce bouquin a la bibliothéque de la Société francophone de Victoria. Abbé Pierre, Testament... Paris, Bayard, 1994. Simon Henchiri