3h 2% Paren La voix des parents de Colombie-Britannique thése Volume 6 - Numéro 3 - Octobre 2010 Billet d’‘humeur Qu’ est-ce que je veux pour mon enfant ¢ Au début de l’année scolaire, j'ai fait la connaissance d'un des copains de la classe de mon fils (je vais le nommer Alex - nom fictif) et de sa mére. Francaise d'origine, son fils était nouveau a |’école et elle connaissait trés peu de familles francophones dans son entourage. Elle m'a confié qu’Alex, Ggé de 6 ans, ne parlait pas beaucoup frangais et qu’elle trouvait cela difficile d’élever son enfant en milieu minoritaire. Nous avons planifié de nous revoir, avec nos enfants, pour qu’ils aient la chance de socialiser en francais. Mon fils vient de m'apprendre qu'Alex a quitté I'école. Il trouvait trop difficile de s’adapter 4 sa nouvelle éco- le francophone. Je dois avouer que ¢a m'a fait quelque chose. Je me suis dit : « Encore un autre enfant qui a de bon- nes chances d'étre happé par I'assimi- lation ». En Colombie-Britannique, qua- tre enfants sur cing seront touchés par l'assimilation. Vu d'un autre angle, ¢a veut dire qu'on transmet notre héritage francophone a seulement un enfant sur cinq! Un enfant sur cing... Oui, c'est possible! Ce n'est pas facile de faire en sorte que son enfant s’épanouisse dans sa langue maternelle, le fran¢ais, lorsqu’on habite en milieu anglo-dominant. Sur- tout quand notre conjoint ou conjointe ne parle pas le francais. Ce n'est pas facile, certes, mais c'est possible avec beaucoup d’efforts, de ténacité, d'outils et de connaissances. Je suis convain- cue, par exemple, qu’Alex serait tou- jours a l’école francophone aujourd'hui si sa. maman avait eu, dés la naissance de son fils, les connaissances et les outils nécessaires pour l'aider 4 lui transmettre sa langue maternelle, méme en milieu anglophone. La construction identitaire, c'est cela : avoir la capacité de transmettre une partie de son identité de francopho- ne a ses enfants. Et ca se fait en pleine connaissance de cause. Il faut le vouloir et trouver des moyens pour le faire par exemple en participant a un groupe de jeu, en fréequentant une prématernelle francophone, en profitant de l’'accés a des livres ou G des €vénements culturels en francais, etc. Il est trés facile de tom- ber dans le piége de |’assimilation. Et le plus souvent, on ne s’'en rend méme pas compte! On parle de plus en plus anglais avec nos enfants... c'est tellement plus facile! (Et surtout, plus accepté sociale- ment.) On favorise la consommation de produits culturels en anglais (DVD, livres, etc.}... c’est tellement plus accessible! Et nos enfants finissent par se retrouver dans !a statistique des quatre enfants sur cing qui se font assimiler! En francais dés la grossesse Avoir le droit de faire instruire ses en- fants dans une école de langue francai- se en Colombie-Britannique est un ap- pui inoui pour les parents francophones. Cependant, cela ne garantit pas que ces jeunes s'identifieront comme fran- cophones ni qu’ils maitriseront parfaite- ment le francais. Les parents, le franco- phone comme le non-francophone, ont un grand réle d jouer, et ce, dés la nais- sance de leur enfant... Et méme bien avant! Les recherches démontrent que la capacité d’apprendre une langue est optimale a partir de la 36° semaine de grossesse jusqu’d |’dge de 2 ans. Elle décroit ensuite rapidement jusqu'a 6 ans. En d’autres mots, cela veut dire que si l'on veut que notre enfant ait comme langue maternelle, comme langue du coeur, le frangais, il faut lui apprendre cette langue avant qu'il ne commence l'école. Sinon, le francais sera tout au plus, pour lui ou elle, une langue secon- de. Une langue scolaire. La construction identitaire, ¢a s'ap- prend. Case travaille. Et ca se vit a tou- tes les étapes du développement de son enfant. C'est d’ailleurs le theme du congrés annuel de la Fédération des parents cette année (voir en pages 8 et 9). J'ai envie d’inviter la mére d’Alex au congrés de cette année pour lui montrer qu'elle n'est pas toute seule a vivre des moments difficiles en tant que parent francophone en Colombie-Britannique; qu'il faut persévérer et qu’il n'est jamais trop tard pour se poser la question : Qu'est-ce que je veux vraiment pour mon enfant? Et surtout, pour prendre les moyens pour y arriver. Marie-Andrée Asselin, directrice générale de la Fédération des parents