Les nouvelles Culture francaise par Jean Poulain A tous ceux qui s’inquie- tent du déclin possible de la langue francaise dans les affaires, une firme. de Montréal offre une conso- lation. Elle a réussi a convain- cre un ordinateur a aban- donner son jargon codé habituel, pour adopter en direct la langue de Mo- liére: non seulement. le robot comprend-il la. fran- cophonie mais i] y répond sans la présence d’un in- terpreéte. Il a fallu plusieurs an- nées de travail a la So- ciété Gemini Software Sys- tems Ltd, de Méntréal, pour mettre au point un systeme ‘de pxograrama- tion qui utilise diretbtement la langue francaise plutot que .des codes qui ne sont a la portée que de quel- ques spécialistes. : Avec le systeme Gemini, toute personne, avec ou sans expérience. préalable en informatique, peut im- médiatement ‘as i Vordinateur.. Des économies Ceci, au point de vue économique, permet de réaliser des économies substantielles de personnel spécialisé. ’ Mais l’avantege princi- pal du systéme, selon M. Raymond Piché, vice-pré- cident et directeur général de Gémini, est d’étre ‘‘ou- vert”: dans une program- mation par code, Je sys- téme est ‘“fermé” c’est-a- dire“ limité. Cela signifie que l’ordinateur program- meé par code ne peut répon- dre qu’aux questions pour lequel il a été conditionné au départ. Avec’ une programma- tion en clair, il est tou- jours possible d'ajouter des données et d’élaborer ses propres programmes. Pour tirer profit de ce procédé, il n’est pas néces- saite de posséder un or- dinateur, ni méme d’instal- ler un cable spécial relié a un ordinatier public. iDans les deux sens ll suffit de s’y relier par telephone. Le dialogue avec ordinateur se fait par écrit, dans les deux sens. La “machine a écrire’ (terminal) qui permet d'utiliser le sys- téme est retiée a votre ap- pareil de teléphone, qui assure la transmission, vers ou en provenance de l'ordinateur. Il faut, évidemment que ordinateur lui-méme ait été conditionné au systéme Gémini. C’est la qu’intervient la | société Com-Share (C a- nada) Limited avec qui la Société Gemini Ltée vient de conclure une entente internationale pour la mise en marche du pro- cédé de programmation a langage clair (francais, anglais et autres langues ecrites). Com-Share met a la dis- position de sa clientele du “temps partagé”, c’est-a- dire louc ses ordinateurs sur une base de temps. La compagnie est une filiale de Polymer Corporation, ‘elle-méme société fédérale de Ja Couronne. Les frais Selon M. Piche, sur les $816 millions dépensés au Canada ‘en 1970 en frais dordinateur, $528 millions représentent des depenses de programmation, c’est- a-dire Je temps utilisé par les spécialistes de ]’utilisa- teur a integrer leur pro- gramme dans l'appareil, pour seulement ensuite en tirer profit. : De l'avis de la sociéte Gemini, J'introduction de leur systeme en clair per- mettrait la réduction de 75 a 90 p. cent des frais d‘implantation de départ, pour le client. C’est pourquoi M. Piché est confiant que Ic nou- veau procede devrait met- tre l'informatique a la -portee des petites entrepri- ses ef meme, bientot, a celle du simple particulier. Drogues ee par Marcel ADAM PARIS + Le probleme de la dro- gue, maintenant considéré en Fran- ce comme un probléme national, vient de conhaitre un rebondisse- ment avec les déelarations fracas- santes faites par un enquéteur ameé- ricain 4 deux journaux marseillais. M. John T. Cusak, directeur pour I’Europe du Bureau américain des narcotiques et drogues dange- reuses, a déeclaré aux journaux Le Provencal et Méridional-la-France qu’il se trouve a Marseille quatre ou cing “gros bonnets” bénéficiant de “protections” qui controlent une douzaine de laboratoires clandes- tins, lesquels traitent la morphine base pour en faire Vhéroine qui est ensuite acheminée sur le marché nord-américain. Et dens une se- conde entrevue M. Cusak s’en est pris 4 la passivité de la police francaise devant l’activité de ces laboratoires. Les réactions officielles n’ont pas tardé. Dans un premier temps la police nationale a demandé a M. Cusak de lui communiquer les preuves de ce qu’il avance; ensuite ‘M. Comiti, secrétaire d’Etat a la eunesse et aux sports, un élu de arseille, a nié qu'il y ait “une sorte’ de comspiration du silence a Marsdille” et soutenu que tout y est fait pour lutter contre la dro- gue. ‘Ce fut ensuite le chef del'Of- fice central de répression du trafic jiicite des stupéfiants. M. Le Mouet, qui a dit a la radio: “Ii n’y a personne qui soit protégé. Ilya des trafiquants professionnels, dont bilité”. a eu un entretien avec M. Le Mouet devant qui il a désavoué les propos qu’on lui préte. Mais le len- demain, M..John Ingersoll, chef du Bureau américain des narcotiques et patron de M. Cusak, prenait le relai et se disait ‘“‘extrémement dégu” par les résultats obtenus par la police francaise qui dit-il n’ont pas réussi a fermer un seul labora- toire en dix-huit mois. Hommage a la police francaise Peu aprés l’ambassade américaine a Paris émettait un communiqué rendant hommage a J’action de Ja police’ francaise et démentant les ‘il est difficile de prouver la culpa- Apres ses déclarations, M. Cusak pos de M. Cusak répandues dans la presse. _ Cet incident a ranimé la petite guerre que se livrent sourdement depuis un an les services améri- cains et francais chargés de la ré- pression du commerce de la dro- gue. L'an dernier M. Cusak avait formulé des critiques semblables et A quelques reprises des journaux et des parlementaires américains s’en étaient prix: a Vinefficacité de la police francaise. Et lors de la vi- site du ministre frangais de ]’Inte- rieur a Washington, l’an dernier, Jes autorités américaines auraient eu a ce sujet des propos peu ame- nes. Cette controverse survient peu aprés la proposition faite par le ‘président Pompidou aux pays du Marché commun et a la Grande- Bretagne d’organiser deux fois l’an une réunion de tous les ministres eontroverse. I] est vrai qu’elle ar- boutir a une action concertée né- cessitée par les facilités de dépla- cement. des trafiquants et de leur marchandise a J’intericur des six pays. de la CEE. mauvaises interprétations des pro- |: Dans Ja presse trangaise on s‘in- ‘terroge sur les motifs qui poussent les Américains a relancer celt rive opportunément, étant donne la tenue a Ottawa, cette semaine de Vassemblée générale de 1’Interpol, dont les travaux seront parachevés ensuite a Washington, ef ot on s'attend que les Américains tente- tont d’obtenir de jouer un role ma- jeur dans la lutte aux stupefiants'! dans le monde. D’autre part, on s ‘demande s’il n'y a pas dans cette ‘démarche une tentive de diversion, ‘a l’approche des élections présiden tielles de 1972, alors que !’admini tration Nixon aura des comptes 2 rendre au sujet de la lutte contre ce fleau en terre américaine. ~ Quoi qu'il en soit un fait de-| meure, Marseille est une plaque tournante du commerce de la dro- gue; et les caids qui le dirigent sont connus de tous mais personne’ ne peut les. énerver et encore moins leur toucher faute de preu- ves. Surtaxation americaine OTTAWA - Le gouvernement Trudeau profitera de toutes les occasions qui lui seront offertes durant le mois pour faire connaftre son point de vue au gouvernement améri- cain et pour tenter de déter- miner si l’administration américaine est résolument engagée dans une stratégie protectionniste. L’opération canadienne survient au moment ou 1|’ad- ministration américaine s’ appréte A évaluer les ré- sultats obtenus durant les trois premiers mois d’ap- plication de ses mesures économiques extraordinai- res. Décrétée le 15 aont, lasur- taxe américaine a été quali- fiée de temporaire par le président Nixon alors que les controles sur les prix et les salaires américains étaient décrétés de fagon temporai- re, pour une période préci- se de trois mois. Le président Nixon a fait savoir en termes non équi- voques que la Maison Blan- che n’abandonnerait pas la surtaxe de 10 p.cent unique- ment pour ‘‘apaiser ses amis’ (‘‘to placate our friends’’) et que la mesure demeurerait en vigueur tant et aussi longtemps qu’un ré- ajustement des monnaies ne viendrait pas faciliter la ta- che des exportateurs amé- ricains. Au méme moment, le pre- mier ministre du Canada, M. Pierre Elliott-Trudeau, affirmait sur les ondes dela chafne anglaise de Radio- Canada. que le Canada de- vrait procéder A une réé- valuation fondamentale de ses relations avec les USA si Washington continuait a4 surtaxer les produits cana- diens arrivant en territoire américain. Aprés avoir pris le soin de souligner que le gouvernement canadien ne cherchait pas une guerre commerciale avec son voi- sin, il a ajouté que le Ca- nada ne se contenterait pas d’un role de fournisseur de richesses naturelles dans une Amérique du Nord réar- rangée selon les voeux et désirs des Etats-Unis. Le gouvernement canadien, comme devait le reconnaf- tre M. Trudeau aux Com- munes, trouve important de bien faire comprendre son point de vue a4 la Maison Blanche A une époque ou, selon toute évidence, elle décide des politiques qui viendront dans les prochains mois. M. Trudeau a répété qu’il faut absolument mettre le des dégats causés au Ca- nada par la surtaxe. A cette fin, le gouvernement utili- sera tous les moyens 4 sa disposition y compris les représentations auprés des dirigeants américains, au- prés des hauts-fonctionnai- res, diplomates, du comité ministériel canado-a méri- cain et de ses sous-comités ad hoc. Le secrétaire parlementai- re du ministre des Finan- ces, le député de’ Calgary- président Nixon au courant _ Sud, M. Pat Mahoney, apro- fité de la réunion des parle- mentaires de l’OTAN, pour brosser un tableau (aprés- surtaxe) de la situation éco- nomique canadienne. Il était méme question, dans la capitale, que M. Trudeau rencontre le sénateur Ted Kennedy qui fait partie de la délégation sénatoriale amé- ricaine A ces assises pour faire le tour de la question. Au bureau du premier mi- nistre, on a cependant in- diqué - qu’il n’existait aucun projet a cet effet. Le secrétaire d’Etat aux Affaires extérieures, M. Mitchell Sharp, prenant la parole devant les membres du Centre pour les relations interaméricaines, 4 New York, avait demandé |’aban- don de la surtaxe américai- ne pratiquée contre les im- portations par Washington. Cette offensive, le Canada la poursuivra lors de laréu- nion du groupe des Dix et des pays membres du Fonds monétaire international. Amchitka WASHINGTON - La Cham- bre a approuvé le 22 sep- tembre, par 376 voix con- tre zéro, un projet de loi déja approuvé par le Sénat qui vise A interdire a la commission de l’énergie atomique d’effectuer une ex- plosion nucléaire souterrai- ne de cing mégatonnes dans 1’fle Amchitka, aux fles alé- | outiennes au large de 1l’Alas- ka, ‘*A moins que le prési- dent ne donne son approba- tion directe A cette expé- rience’’. ~ Le texte a été renvoyé au Sénat pour qu’il se prononce | définitivement. L’engin ato- mique, le plus grand qui ait jamais été prévu pour un essai souterrain en Amé- rique du Nord, a,été des- cendu A quelque 300 pieds (100 métres) de profondeur alors méme que le prési- “dent Nixon n’avait pas don- né son approbation 4 cette expérience. Le Japon critique ce pro- jet qui est destiné A essayer une ogive nucléaire destinée A un systéme de missiles antimissiles. Le Canada a également protesté comme le Japon contre les dangers que l’explosion n’engendre des tremblements de terre et des raz de marée et sou- -ligne le-fait que l’essai pour- rait dégager des radiations dans l’atmosphére. ~ LE SOLEIL, ler OCTOBRE 1971, XV