sorte. Une voix intérieure qui s’exprime dans le je a la premiére per- sonne, et une voix double qui utilise le tu, a la deuxiéme personne. Une voix intérieure des émotions et une voix somme toute extérieure, celle de la conscience, de la raison. Un recueil de textes en vrac. Les uns comptent une page, guére plus. D’ autres se réduisent 4 la ligne, parfois moins. Mais tous débordent de poésie, de lyrisme. Tous font plonger le lecteur dans le cceur du subcons- cient. Ils lui parlent, lui font sentir plutét, le drame intérieur qui se joue, qui torture, qui s’interroge sur la vie, 4 un point extréme, a la limite de la schizophrénie. Le je intérieur et le tu interrogateur s’entrelacent et se choquent et se fau- filent dans une mémoire marquée par le fer de I’ oubli et l’incapacité chronique de se saisir. Des phrases courtes, |’emploi du verbe a I’ infini- tif, les répétitions de mots du vocabulaires a trois, quatre reprises, tout cela traduit le désarroi et met a jour la crise intérieure. Pour cette raison et 4 cause d’une telle technique d’écriture, ces textes poétiques sont aussi - davantage peut-étre —-dramatiques. Une mise en scéne avec décor et des personnages - je et tu - qui interpréteraient le flux et le reflux des émotions débordantes 4 la maniére d’un mouvement de pendule, transporteraient beaucoup plus de spectateurs que ne le ferait la poésie dans le texte pour le lecteur. Dans une telle dramatique, s’ajouteraient l’éclairage pour préciser l’expression du visage - celui de la raison (tu) et celui de la déraison (je) - et les mouvements corporels absents dans le texte et dans la lecture du texte. En conclusion, Carnet de déraison es un premier livre de Guylaine Tousignant, un livre qui promet beaucoup plus. Un travail assidu et minutieux lui permettra sans doute dans l’avenir d’écrire un chef d’ceuvre dans la prospection du moi intérieur par la voie du § théatre ou celle du roman. Guylaine Tousignant Carnets de déraison Simon Henchiri, Vancouver, C.-B. Guylaine Tousignant, Carnet de déraison, Sudbury (Ontario), Prise de parole, 2005.