6 — Le Soleil de Colombie, vendredi 11 novembre 1983 ee OT PO nn a an a a ee a ee en ea Société Historique Franco-Colombienne 9, Broadway Est, Vancouver, C.B. V5T 1V4 Tél. 879-3911 Les Caisses Populares: Une excellente formule Toujours dans la méme veine de l'oeuvre d’Alphonse Desjardins, sa Caisse de Lévis (Québec), d'un minuscule or: ganisme installé a méme sa résidence, avec 23 membres- sociétaires, le 23 janvier 1901. atteignit en 83 années, le chiffre incroyable de 11 500 avec oun _— actif de $ 52 000 000. Le groupe de Lévis, élargi au fil des années, rayonna dans tout le Québec pour englober dans les 116 Caisses d'Economie Desjardins _ et 1250 Caisses Populaires Des- jardins, regroupées en une Confédération, servaient qua- tre millions de Québécois, qui leur ont confié environ onze milliards de dollars. On ne peut nier que la for- mule de ce valeureux vision- naire était bonne, voire ex- cellente, puisque depuis 1908, elle s'est répandue du Qué- bec, en Ontario, au Nouveau- Brunswick, dans d'autres de nos provinces, pour déborder dans les Etats de Nouvelle- Angleterre (Maine, New Hampshire, Vermont, Massa- chusetts, Rhode Island, Connecticut) . Tout ce préambule histo- rique a pour but de mettre en évidence ce qu'un homme décidé, convaincu de ses idées et de sa mission, est 4 méme de réaliser: cet homme, un Canadien-frangais. Il est temps de passer a notre province de Colombie britannique... un nom qui n’a pas plu, bien que choisi par sa Reine Victoria, en 1858, au Secrétaire aux colonies, Henry Pelham Clinton, 5e Duc de Newcastle, disant “Ni origi- nal, ni de quoi s’en félici- ter” appuyé par un autre Secrétaire aux Colonies, Ed- ward George Bulwer Lytton, au sujet de New Westmins- ter “Non pas seulement pro- saique, mais la quintessence du vulgaire...” (voir l'ouvrage de Margaret A. Ormsby, Bri- tish Columbia: A History). Colombie britannique On cite deux premiéres ten- tatives de Credit-Unions, une a Burnaby et l'autre a Powell River. Pourquoi et comment? L’histoire ne le dit pas. Puisque la formule Desjar- dins s'est avérée excellente, il n'y avait aucune raison qu'elle ne le fut pas ici: elle se glissa au sein de la communauté anglophone sous le vocable Credit-Union, et a celle de la ¥ communauté —_ francophone sous le vocable Caisse Popu- laire, plus significatif puisqu’il y a “peuple”. Puisque la chronologie est la science des temps et des dates, nous la respectons, ren- dant a César ce qui est a César, la premiére Caisse Populaire canadienne - fran- caise fut fondée a Maillard- | ville le 6 avril 1946. Pour- quoi? Parce que Maillardville, depuis sa fondation, il y a 75 années, vivait dans l’euphorie de la venue de ses centaines et centaines de pionniers de l'Est-Canadien, tous dédiés a une cause, celle d’implanter un bastion franco-canadien dans une terre alors sauvage. 1946 a été appelée l'année magique, parce qu'elle a vu une activité débordante, com- me on n’en verra jamais. Une Assemblée Générale de la Fédération Canadienne-Fran- caise de la Colombie britan- nique, devenue par la suite la Fédération des Franco - Co- lombiens. Egalement, en Franco-Colombiens fondaient la Paroisse Nationale du Saint-Sacrement, a Vancou- ver, d’autre part, a Maillard- ville, une deuxiéme paroisse, celle de Notre-Dame de Fati- ma, la premiére étant celle de Notre-Dame de Lourdes (1909). Une année heureuse d’événements, d’autant plus que la fin de la Deuxiéme Guerre Mondiale avait attiré ici un trés grand nombre de familles francophones. Notre intention n’est pas de marcher sur les plates-bandes de la Caisse Populaire de Maillardville, qui a préparé, par les bons soins de M. Roméo Paquette, une brochu- re concernant sa propre his- toire, rendant un_ vibrant hommage aux hommes et femmes qui se sont dédiés a sa fondation, qui n’ont jamais cessé d’y oeuvrer pour attein- dre, a ce jour, un résultat dépassant, et de loin, toute espérance. Elle sera publiée prochainement. Caisse Populaire Saint-Sacrement Le mouvement coopératif et la fondation de la Caisse a Maillardville devaient accro- cher a la métropole de Van- couver, parmi les Canadiens- francais du quartier Saint- Sacrement, sis a la 16e rue, dorénavant ainsi consacré, qui avaient de nombreuses personnes toutes prétes a se dédier, a s'identifier autour de la nouvelle paroisse, puisque la théorie Desjardins prenait comme épicentre de dévelop- pement, le clocher. Elles avaient également le désir d’'adopter un affranchisse- ment économique par le tru- chement de la coopérative d’épargne et de son corrollai- re, le crédit. 1946, les - Un développement phénoménal Ainsi comprise, une Caisse marque une _ concentration forcée d'une population fran- cophone dans le périmétre im- médiat de l’institution. D'un article de “La Survi-- vance”, journal de 1’Associa- tion Francaise de |’Alberta, du 3 novembre 1948, nous relevons les lignes suivantes: “Dimanche 31 octobre, réunion générale, la premié- re, 50 personnes dédiées pour fonder une Caisse Populaire dans notre paroisse. Nous voulons coopérer au bien-étre social et économique des né- tres. L'assemblée était sous la présidence de M._ Albert Lefebvre et de M. Joseph Chaussée, chef-trésorier des Caisses Populaires de la Co- lombie britannique.” “Un comité provisoire de neuf membres a été nommé, avec Mlle Luce Lambert, se- crétaire.” M. Albert. Lefebvre, un ardent promoteur de la Caisse Populaire Saint-Sacrement, de ses premiers jours, nous a livré un mémoire ov il expri- me sa premiére expérience avec une institution financiére de type coopératif; elle eut lieu en 1938, lors de sa visite a son frére ainé domicilié 4 Morinville (Alberta), situé a 20 milles au nord d’Edmon- ton, ow il dirigeait une Caisse de 300 membres-sociétaires, composée de fermiers, de petits commercants, de tra- vailleurs manuels. Lorsqu’il fut mis au courant de son systéme et des métho- des d’épargne pour les jeunes et les personnes agées, les méthodes des préts, du plan d’assurance-vie, il s’est dit, si cela est possible dans ce petit coin de la province de ]’Alber- ta, pourquoi pas 4a Van- couver, la grande métropole. M. Albert Lefebvre conti- nue: Ce fut en 1945, que la Fédération Canadienne-Fran- caise de la Colombie britan- nique donna une dimension provinciale a son existence. Le groupe de promoteurs A part lui-méme, Albert Lefebvre cite le nom de chacun des autres enthousias- tes du projet en question: Docteur Jean-Baptiste Paris, Docteur Henri Saint-Louis, Maurice Ecarnot, Josaphat Gagnon, Oscar Loiselle, Do- Brunette, en nat Bougie,: Armand Adam, J.B. Tisseur, Alma McDou- gall, Léon Goguillon et tant d'autres. Au cours de décennies, des difficultés, des obstacles ont surgi, inhérents a toute nou- velle entreprise dotée, méme de bonne volonté, mais de compétences en la matiére non encore acquises. Albert Lefebvr: bon départ Albert Lefebvre continue son récit: il fut élu président de la Fédération Canadien- ne-Francaise de la Colombie britannique et c’est 4 ce mo- ment-la que la question de fonder un Caisse Populaire fut envisagée sérieusement: les réunions successives ne donné- rent pas de résultats positifs, tandis qu’a Maillardville, il en existait une depuis 1946, sous le premier nom de Caisse Populaire Notre-Dame de Lourdes. : Nous avons poursuivi, dit A. Lefebvre, notre tache de persuasion en d’autres réu- nions avec des progrés tangi- bles. Je fus approché 4 main- tes reprises afin de convaincre la population de cette néces- sité absolue. Un groupe me _ signifia, qu’étant président de la F.C.F.C.B., il m’incombait de faire tout mon possible pour fonder pareille Caisse Popu- laire. Henri Meek, S.S.S._ Jallais donc, au début d’octobre 1949, 4 la rencon- tre du Pére Henri Meek, le Curé de la Paroisse, en le priant d’annoncer aux fidéles, aprés le sermon dominical, qu'une réunion générale se tiendra dans la salle parois- siale: la réunion fut un suc- cés total. J'ai présidé l’assem- blée, 4 mes cétés, M. Joseph Chaussée, de la B.C. Electric Street Railway et Trésorier de la B.C. Central Credit Union et M. Vic Muller, un des fondateurs de la Caisse de Maillardville, originaire de Suisse, qui préta sa maison aux débuts de cette Caisse, ‘et ce, parmi une cinquantaine de personnes enthousiastes du projet. Jai décliné, disait M. Lefebvre, la présidence de la Caisse, étant celui de la F.C.F.C.B., mais accepté la vice-présidence, le Docteur Jean-Baptiste Paris, s’est dé- voué, en mes lieu et place, mais a la condition que je sois le vice-président. La Caisse Populaire Saint- Sacrement devint alors une réalité. Le gouvernement de la Colombie britannique _ prit connaissance de |'implanta- tion successive de ces Credit- Unions et leurs homonymes, les Caisses Populaires, qu'il décida de légiférer, en votant une loi, appelée “British Co- lumbia Credit-Union Act” un produit de sérieuses études de _ la part d’un comité d’univer- sitaires de !’Université de Colombie britannique. Les débuts Ils furent des plus modestes, cela se concgoit. Le premier bureau se trouvait en contre- bas de l’entrée de la Salle Paroissiale St. Sacrement, ou- vert quelques jours sporadi- ques de la semaine, mais toujours les dimanches, aprés l'office dominical: Mlle Luce Lambert assurait, a elle seule, les opérations. Le succés s’'annongait lente- ment, mais strement. Un local s'imposait, aussi petit soit-il. M. Maurice Ecarnot, le premier €picier francais de la région, offrit le sous-sol de sa demeure sise au 3075, rue Willow (quartier St. Sacre- ment, pendant une période d’environ quatre années, il alla plus loin, il en fut le gérant et se dédia avec opi- niatreté, en dépit de ses pro- pres affaires. Maurice Ecarnot Encore plus loin, changeant de résidence, au 804, de la 14@me avenue ouest, il prit avec ses meubles, la Caisse, toujours étant gérant. Nous reviendrons plus loin sur cet homme conscient de ce qu’il devait donner 4 sa commu- nauté. Thibeault et Pignon sur rue Ce n'est qu’en 1963 que la Caisse Populaire St Sacre- ment, aprés 14 ans de vie itinérante, jugea le moment venu de se doter d’un immeu- ble décent; elle en avait les moyens, grace a son dévelop- pement progressif. Elle le devait, d’abord, a ses mem- bres-sociétaires, puis vis-a-vis de la communauté canadien- ne-francaise, donnant un cer- tain relief au quartier St Sacrement et son entourage immédiat. M. André Piolat, un mili- tant chevauchant ses idées, ses vues de visionnaire, entre Vancouver et Maillardville, fut président de la Caisse en 1959-1960, puis de 1963 a 1965, ensuite en 1969, connaissant son affaire, il trai- ta, en 1963, l’achat d’un im- meuble bien placé sur un ter- rain d’angle rue Heather et 16e rue. La transaction fut trés ardue, un propriétaire co-. riace vis-a-vis d'un acheteur qui ne se laissait pas faire. __ Total payé $ 25 000, une paille par rapport aux prix actuels: c’était probablement la meilleure affaire de toute la vie de la Caisse. Le processus suivi pour de- venir propriétaire d'un im- meuble a été identique a celui de la Caisse Populaire de Maillardville, dés sa fondation il a eu des “itinérances” pour enfin avoir le superbe siége que nous connaissons actuelle- ment. Effraction et vol C'est encore une narration de M. Albert Lefebvre. L’inci- .dent eut lieu en 1961, lors- qu'il était président de la Caisse, donc des détails de premiére main. Deux individus, aprés ef- fraction, ont_emporté le cof- fre-fort qui contenait les fonds, les titres d’hypothe- ques, les procés-verbaux des séances, etc. Le coffre-fort (pas fort, ni lourd, puisque facilement transporté, fut re- trouvé, le jour suivant, entre les 19e et 20e rues, dans un terrain désert éventré et natu- rellement vidé. On fit appel 4 Mlle Ruth Thibeault, s'il était possible de reconstituer les documents et archives disparus: aprés tant d’années de gestion, il était difficile de procéder a cette reconstitution. Sur les conseils de R. Josaphat Gagnon, un militant de la premiére heure et vice-prési- dent, en 1954, Albert Lefeb- vre signale qu'il s’était adressé a Mme Myriam McTiernan, archiviste du B.C. Central Credit-Union (Victoria): la solution fut trouvée en ce sens que cette organisation centra- le avait des copies des docu- ments, depuis les. archives étaient a jour. Lhistoire ne dit pas si la direction de la Caisse prit des mesures de protection adé- Pod aa Bs